varages

Le bourg de Varages est situé dans le département du Var, entre la ville de Barjols et le village de la Verdière, à quelques kilomètres de Saint-Maxim in. Varages faisait partie très anciennement du Baillage de Barjols, lorsque Barjols appartenait à la comtesse Jeanne de Provence. La situation d.e Varages est, je puis dire, exceptionnellement pittoresque. En effet, au fond d'une petite vallée sur le plateau qui la termine, se trouve une source abondante qui sort d'un rocher, au pied d'une colline peu élevée. Cette source a la propriété de former des Tufs. Aussi a-t-elle créé parla suite des siècles, à son orifice, un espèce de promontoire déroches qui surplombe sur la vallée; vallée qui se prolonge, d'un côté sur Barjols et de l'autre vers Saint-Maxmin. C'est sur ce promontoire de roches factices, très élevé, que se trouve bâti le village de Varages. Il domine.ainsi tout le pays.'Plusieurs fois les habitants ont eu la crainte de voir le village s'effondrer dans la vallée, si bien que ces craintes donnèrent lieu le 8 octobre 1771, à une sommation de la part du seigneur, alors membre de la famille de Forbin. Sommation, dit l'acte, « a l'effet de provoquer une consultation du sieur Siméon, au sujet d'un Tuf qui menace ruine et d'enjoindre à la communauté, de deffendre l'arrosage sur lé précipice. » La même année le 21 octobre, le même seigneur, fit une nouvelle sommation à la Communauté, pour lui imposer l'obligation de couper les parties de Tuf, dont la chute était imminente. Ces craintes, fondées ou chimériques, mirent cependant quatre ou cinq cents ans à se produire, attendu que le village de Varages, existait bien avant le XIVe siècle. A son origine, Varages appartenait à la Curie royale et ne faisait point encore partie de la seigneurie de la Verdière ; laquelle fut confisquée à la maison de Castellane en 1.189, rendue en 1247, confisquée de nouveau en 1287, échangée avec le comté de Vintimille en 1262, elle rentra dans la maison de Castellaneen 1417.

Varages faisait partie du Baillage de Barjols et du domaine delà Curie royale, comme je l'ai dit. Les donations faites par la Curie royale, ont été évidemment l'origine de plusieurs co-seigneuries qui se sont formées par alliances, ou droits d'héritages entre co-seigneurs, appartenant aux familles de Cornuty, d'Oraison, de Prohane de Gérente, de Puyyert, de Vintimille, autant de co-seigneurs, venant tous se fondre en 1643, dans la maison de Castellane, pour finir en 1673, dans la maison de Forbin.

En 1282, la Curie royale, dit un acte, donne à bail un. moulin au quartier de la Roque à Bertrand Cornuty de Saint-Etienne. Les Cornuty en 1288 font cession à Reynaud d'Oraison et les Cornuty et d'Oraison, passent en 1306, une transaction entre eux. Aimé Cortiany, veuve de Raynaud d'Oraison, prend possession de la co-seigneurie en 1307 et la fait passer à Elzéard d'Oraison son fils, en 1341, mais en 1367, un échange intervint entre Louis d'Oraison et Bertrand Cornuty : et enfin de compte, les d'Oraison vendent en 1373, leur co-seigneurie à Honoré de Caslillon.

D'autre part, le roi Robert passa reconnaissance en 1312, à Jean Prohane, mari de. Marguerite Cornuty, fille de Bertrand Cornuty le même à qui la Curie royale avait passé le bail d'un moulin. Plus tard, en 1482. Marguerite Cornuty, veuve Prohane, institue son fils Antoine Prohane, dans sa co-seigneurie. Cette possession des Prohane finit à Louise Prohane. mariée à Louis de Castellane.. Un acte de 1554, nous apprend que lès biens de Prohane, échurent à Balthasard de Gérente, probablement par suite d'une alliance avec les Castellane ; puisque Magdeleine de Gérente, femme d'Escalis de Sabran, vendit en 1643, ses droits de co-seigneurie à J.-B. de Castellane, lequel en fit donation à J.-B. de Forbin, son petit neveu, en 1673.

En troisième lieu, Romée de Villeneuve, en 1286, avait fait une donation à Varages, à Bertrand de Puyvert son gendre. Bertrand de Puyvert vendit, peu de temps après, en décembre de la même année, cette partie de co-seigneurie à d'Avéne, femme d'Emmanuel de Vintimille. Sibile d'Avéne, réunit plus tard, soit par acquisition, soit par échange, une grande partie de là co-seigneurie, laquelle finit par tomber dans la possession de Sibile de Castellane, veuve de René de Vintimille, en 1370, et de là arriva encore à J.-B. de Castellane.

Ainsi donc du côté Cornuty et d'Oraison, la co-seigneurie passa à Castillon et finit en Castellane.

Du côté Puyvert et Vintimille, elle aboutit à J.-B. de Castellane et le côté Prohane et de Gérente, finit également à J.-B. de Castellane. J.-B. de Castellane, seigneur de la Verdière, Saint-Julien Braucn, Bèzaudun, réunit ainsi la co-seigneurie entière de Varages, dont il fit don, ai-je dit, a son petit neveu J.-B. de Forbin d'Oppède, en 1673.

J. B. de Forbin, en 1749,. fit érection en arrière fief avec juridiction moyenne et basse de biens à Varages à J. F. Gassendi, père du général Gassendi. Le général Jean-Jacques Basilien Gassendi, dont le buste se trouve sur une fontaine de la place publique, était général d'artillerie. Né à Digne, en 1748; il commandait-la compagnie où Bonaparte se trouvait lieutenant. Fait général de brigade en 1800. Bonaparte, premier Consul, lui donna le commandement de l'artillerie de l'armée de réserve qu'il conduisait à Marengo. Gassendi fit avec succès celte campagne. Il se distingua surtout au passage du Saint-Bernard, à son retour il fut nommé chef de division au ministère de la guerre, Conseiller d'Etat, grand croix de la légion d'Honneur et lui donna le titre de comte et celui de sénateur en 1813. Lorsque Gassendi eut adhéré à la déchéance de Bonaparte en 1814, il fut créé pair par Louis XVIII. En 1815, ayant changé de nouveau il redevint sénateur. Le ministre Decazes, en 1819, le rétablit sur la liste. Gassendi refusa d'abord et puis finit par accepter. Il mourut à Nuits, le 14 décembre 1828.

Les habitants de Varages sont laborieux, ils excellent à cultiver la vigne, dans des parties de bois qu'ils défrichent avec grand peine et beaucoup de travail. Ils sont également très industrieux, ils fabriquent une faïence qui a été longtemps très recherchée, soit par ses formes, soit par le choix des couleurs et des dessins. Le seigneur y possédait des ateliers dont les produits portaient F. 0. comme marque de fabrique. Cette industrie.était fort ancienne à Varages, puisque en 1470, un Prohane passa un nouveau bail pour un tournant à émail.

En outre de cette industrie, Varages possédait de nombreux moulins et une fabrique de papier. Au commencement du XVIIIe siècle, c'est-à-dire en 1738, le vent de la première Révolution commençait à souffler. Le seigneur se vit un jour, dans la nécessité de présenter un mémoire à la Communauté, pour soutenir son droit, au sujet d'une dotation annuelle au profit d'une pauvre fille à marier, dont-la nomination appartenait à Mme d'Oppède. Trente ans après, il fut obligé de protester contre le changement de son banc de famille, dans l'église, mais ce furent les contestations au sujet des eaux qui entraînèrent les conséquences les plus graves, malgré une transaction en date du 12 juin 1779, entre le seigneur et la Communauté, par laquelle celle-ci reconnaît la propriété des eaux au seigneur. La Communauté ne cessa de soulever des difficultésau sujet de ces eaux. Si bien que la maison de Forbin, fatiguée et impuissante à se défendre, finit en fin de compte par vendre tous les biens, moulins et engins qu'elle possédait à Varages.

Les armes du bourg de Varages rappellent évidemment,, les armes des Vintimilles de Signe qui portaient de gueules au chef d'or pour Vintimilles et de gueules au lion d'or pour Signe des vicomtes de Marseille.. Actuellement le mot Varages se trouve en lettres d'azur sur le chef d'or. Cette addition a dû être faite postérieurement.

L'auteur de l'Armoriai des villes et villages de Provence, a fait, je crois, erreur en leur donnant la famille de Sabran, comme origine.

Source : La Provence artistique & pittoresque 1881-1883.