Eglise Saint-Germain Cintheaux, Cinthaux Sanctellae Sintellae

Cinthaux, Sanctellae, Sintellae.

L'église de Cintheaux, sous l'invocation de saint Germain, est une des plus remarquables de l'arrondissement de Falaise; elle appartient au style roman très-orné et doit avoir été construite dans le XII^e siècle.

Dans la nef, des arcatures avec archivoltes garnies d'un double zigzag forment une ligne continue au-dessous de la corniche sur les murs latéraux et sur le mur occidental. Autrefois ce dernier n'était point percé d'une porte comme aujourd'hui ; pour ouvrir celle qui existe, on a fait disparaître le contrefort qui divisait le gâble en deux parties.

On entrait alors dans la nef par deux magnifiques portes ouvertes l'une en face de l'autre, dans les murs du nord et du sud. Ces portes faites sur le même patron, sont couronnées d'un fronton saillant d'un pied environ sur la muraille, ce qui me fait croire que, dans l'origine, une toiture ou un porche protégeait l'une et l'autre entrée. Trois archivoltes en retrait, les unes sur les autres, forment la décoration de ces beaux portails. La première, en commençant par le centre, est garnie de losanges; la seconde d'un double rang de zigzags; la troisième, taillée en chanfrein, de manière à présenter sur sa face un tore sur lequel viennent s'appuyer des zigzags opposés.

Une tradition rapporte que l'abbaye de Barbery avait le droit de venir en procession à l'église de Cintheaux, et de la traverser, entrant par une porte et sortant par l'autre.

Ces deux portes sont bouchées.

La nef de Cintheaux qui n'est pas voûtée, offrait de chaque côté trois fenêtres seulement, correspondant pour le niveau aux arcatures extérieures ; ces fenêtres ont une colonnette de chaque côté et une archivolte garnie de zigzags.

On a pratiqué plusieurs fenêtres modernes au-dessous de l'arcature, qui ont brisé l'harmonie de la décoration.

Mais c'est dans le chœur surtout que ces actes de vandalisme s'étaient exercés, les deux travées qui subsistent encore ont été, à plusieurs reprises, considérablement altérées, surtout au nord ; non-seulement de ce côté on avait percé des fenêtres, mais on avait construit une chapelle qu'une arcade mettait en communication avec le chœur. Cette chapelle n'existe plus, l'arcade a été bouchée, mais une sacristie a été construite tout récemment du même côté.

C'est donc au côté du sud que le chœur a conservé quelque caractère. On y voit encore des arcatures et une porte à deux archivoltes garnies de zigzags.

Une abside à pans coupés a été ajoutée, il y a peu d'années (6 ou 7 ans); on s'est conformé exactement, pour les fenêtres, au style de celles qui existaient. Les modillons de la corniche ont été copiés sur les autres. M. Le Prévost, curé de Cintheaux, se propose aussi de faire rétablir plusieurs fenêtres romanes qui ont été détruites, et de faire disparaître des fenêtres modernes informes qui existent du côté du sud.

La tour latérale, au nord, peut dater du temps de Louis XIV. Elle est basse et mesquine, couverte par un toit de pierre à quatre pans.

L'église est sous l'invocation de saint Germain.

L'abbaye de Barbery avait le patronage et percevait les dîmes depuis l'an 1181 qu'elle les avait reçues de Robert Marmion, ainsi qu'il résulte du passage suivant de la charte de donation:

"Dono etiam ecclesiam de Brettevilla (Bretteville-sur-Laize) Cum omnibus pertinentiis suis, et ecclesiam de Quilleio (Quilly) ; Cum omnibus pertinentiis suis et ecclesiam de Saintellis (Cintheaux) ; Cum omnibus pertinentiis suis ..." (Charte de Robert Marmion pour l'abbaye de Barbery eu 1181).

Gomesnils et Robert-Mesnils sont des hameaux qui avaient des chapelles particulières aujourd'hui détruites; on rapporte qu'il y a eu autrefois jusqu'à 8 prêtres occupés au service religieux dans la paroisse de Cintheaux.

L'ancienne route de Caen à Falaise passait à Cintheaux et plusieurs souvenirs se rattachent à cette localité.

En 1106, Henry I^er et Robert-Courte-Heuse y eurent une entrevue aux fêtes Pentecôte; ces deux princes étaient en guerre ; l'entrevue, qui dura deux jours, n'amena aucun résultat pour la conciliation des deux frères. On sait comment la bataille de Tinchebray, gagnée par Henry I^er, dans l'automne de la même année, le rendit maître de la Normandie.

M. de Bras nous apprend que François I^er se rendant à Caen, en 1532, dîna à Cintheaux; on écrivait alors Sinteaux : Et le mercredy troisième jour du dict mois férié de Pasques, le Roy nostre souverain et naturel seigneur vint disner audict lieu de Sinteaux, pour faire son entrée en sa dicte ville de Caen, comme depieça il avait desir et affection.

Quelques anciennes maisons existent encore à Cintheaux; l'une d'elles est regardée par M. Galeron comme l'hôtellerie où dîna François I^er en 1532.

Source : Statistique monumentale du Calvados par Arcisse de Caumont 1850.