Eglise

Les monuments et l'état actuel de Solliès

église de Sollies villeLe doute n'est plus permis sur le style architectonique de l'église de Solliès-Ville. Il n'a fallu qu'un simple examen à la lueur des données les plus élémentaires de l'archéologie, pour voir disparaître les fables accumulées sur ce monument du moyen-âge.

Que la fondation de Solliès-Ville se perde dans la nuit des temps et qu'au dire de M. Philémon Giraud (Hist. de Bormes), elle ait été le siège du chef-lieu des Bormani ; que les Romains y aient séjourné à leur tour, c'est une concession que l'on peut faire et qui trouverait même sa justification dans quelques monnaies mises au jour par des fouilles. Que ces hardis conquérants y aient laissé quelque témoignage de leur séjour, bien que rien ne l'atteste aujourd'hui, nous n'aurons garde de le contester, non plus, et il ne nous en coûte point de le croire ; mais il nous répugne d'admettre que le monument qui est encore debout intégralement, ait servi à honorer des idoles avant d'être consacré au culte de notre religion, car rien ne saurait l'établir. Ce qui fait persister bon nombre d'habitants et même d'ecclésiastiques, dans l'idée étrange que c'est là un temple profane, c'est la dénomination de Solliès que l'on fait provenir du sigle de Solis œdes, et de la forme extraordinaire des deux piliers à pied-droit, qui s'élèvent dans le sens de l'axe de l'église de façon à cacher le grand autel. Nous avons essayé d'expliquer cette raison d'être dans notre brochure, raison qu'il faut rejeter sur la solidité à donner à un édifice si hardiment élancé sur un plateau fort circonscrit. Une autre opinion non moins plausible est venue en donner aussi la clef. Les francs-maçons auraient bâti ce temple. Or, les francs-maçons atteints de manichéisme, se seraient attachés à faire prévaloir, dans tous les pays du monde, la doctrine des deux principes. En conséquence, les églises qu'ils bâtissaient, n'avaient que deux nefs égales, symbolisant ainsi la dualité, et montrant leurs œuvres en parfait accord avec leurs idées.

Or, les francs-maçons ont évidemment demeuré à Solliès-Ville ; un fronton triangulaire, encadrant tous les attributs de la francmaçonnerie, l'atteste et fait acquérir, à une simple probabilité, tous les degrés d'une certitude.

Nous croyons avoir suffisamment prouvé dans notre brochure, que c'est-là un des plus beaux temples romans qui caractérisent le onzième siècle. Rien n'est venu ébranler notre conviction jusqu'à ce jour et les observations que nous avons recueillies à cet égard, ne sont pas de nature à la modifier. A défaut de documents, c'est aux principes de l'archéologie qu'il faut ramener les points en litige pour les juger.

Pensez-vous, nous a-t-on dit, que les Templiers, fidèles à un type de construction adopté par leur ordre, soient étrangers à l'édification de l'église de Solliès-Ville ? Cette hypothèse ôterait peu à son origine romane, ainsi qu'à sa vétusté, puisque l'institution des Templiers remonte à 1118. Mais nous sommes fondé à croire, par la raison même invoquée, que l'église de Solliès-Ville existait avant les Templiers ; puisque plus d'un détail dans les chapiteaux et dans le fût des colonnes et des piliers différencie l'église de Solliès-Ville de celle d'Hyères, où les marques d'une époque plus avancée nous semblent évidentes. Or, cette dernière, passe pour être positivement l'œuvre de cet ordre puissant.

Il existe une autre opinion vulgaire, d'après laquelle cette église se serait élevée sur le parquet de la salle du seigneur de la localité. Comment cela serait-il possible, puisque l'aile gauche porte encore les traces de la tribune des Templiers ? Donc, ce monument est bien antérieur à l'époque où les seigneurs ont cessé d'habiter Solliès-Ville. D'ailleurs, si ce temple s'éloignait moins des temps modernes, on n'hésiterait pas à le reconnaître, caries essais d'une architecture embarrassée à se donner un caractère propre à force de combinaisons nouvelles greffées sur l'antique, n'avaient pas encore inspiré l'idée, comme aujourd'hui, de l'imitation byzantine ou du retour au caractère austère du XIIIe siècle.

Là où l'ouvrier s'est livré au caprice de quelques remaniements, ceux-ci offrent tout le cachet d'une superfétation hybride, comme dans l'église de Cabasse, où le roman le plus lourd et le plus disgracieux se marie aux clochetons du XIVe siècle.

Une autre considération : les pierres tumulaires, recouvrant le sépulcre des seigneurs, se trouveraient-elles au pied de l'autel, l'une devant l'autre ?

Une salle des anciens seigneurs aurait-elle eu cette dimension ? Et c'est ici encore le moment de rappeler que le palais de ces derniers, n'est nullement attesté par l'angle qui reste debout, ainsi qu'on le croit encore communément à Solliès-Ville. Ce débris appartient à la maison des Templiers, que le canon ennemi a détruite, ainsi que l'attestent une trouée à travers un mur d'un mètre d'épaisseur et des pierres d'appareils écornées, plus un boulet trouvé sous ses décombres.

Les guerres de religion et le passage du prince Eugène sont pour beaucoup dans la destruction complète de Solliès-Ville, où il ne reste rien, absolument rien des anciennes constructions,que quelques pans de mur, une arcade avec archivolte du XIe siècle, plaquée sur un vieux portail récent (maison de M. Joseph Vache), quelques emblèmes de franc-maçonnerie et une gargouille à face de bul-dogue, placée aujourd'hui dans une ruelle qui conduit à la petite entrée de l'église.

Cependant, nous ne saurions clore cet article, sans parler d'une relique échappée au vandalisme des hommes et des temps : c'est un Christ qui, comme le tableau en bois, adossé à l'angle gauche, et décrit dans notre brochure, est, lui aussi, un spécimen du XIIe siècle.

On sait que la statuaire des églises romanes fut calquée sur les modèles orientaux, grâce à une certaine vogue accréditée par les croisés, revenus de Jérusalem. Lorsqu'un grand événement s'est accompli dans un pays éloigné et peu connu, tout concourt à le rappeler. De tout temps, les vêtements, les ustensiles, les armes et les arts se sont modelés servilement sur les mœurs et les goûts des pays vaincus : l'étrangeté se transforme en mode et s'impose même aux caractères les plus sérieux.

Les artistes du XIe siècle, tout en créant des œuvres dont la pensée, le plan et l'exécution leur appartenaient, se montraient pour certaines formes, sous l'empire des traditions romaines. On voyait encore partout, l'empreinte d'une élégance mâle, ample, majestueuse. Les figures étaient encore assez régulières et assez belles. Mais au XIIe siècle on adopta deux genres : l'un trapu, rond, informe, destiné à caricaturer les vices, l'autre plein d'un bizarre engouement pour l'Orient, offrant des figures raides, malingres, d'une longueur exagérée, et portant des vêtements aux plis symétriques et parallèles, qui semblent emmailloter les corps plutôt que les couvrir, comme dit Charton. Les formes du corps ont quelque chose d'aigu, de mince, de brusquement coudé ; dans la sculpture même les rinceaux sont isolés, les extrémités effilées, les feuilles exprimées par des angles profondément rentrants.

Or,notre Christ rappelle incontestablement cette époque ; haut de 145c, appliqué sur des croisillons dont le vertical est de deux mètres avec un diamètre de 20c, il appartient à l'école byzantine : nimbe croisé de bleu, figure grecque se terminant en pointe, membres anguleux, côtes en saillie sur corps amaigri. Il est vrai que les pieds ne sont pas cloués séparément sur une tablette, comme était l'usage du temps ; que le Christ n'a ni toque ni tunique, selon le type offert par M. de Caumont ; mais nous savons aussi que ce type se montrait déjà singulièrement modifié dès le principe du XIIIe siècle, et il est possible qu'il le fût dès l'époque de transition. Les doigts des pieds sont étalés et peu en proportion avec les minces dimensions des tibias : le bas du corps est serré par une pagne ou bande de couleur marron doublée rouge-flamme, mais étriquée, raide, ayant quelques plis d'une uniformité marquée. C'est en 1670 qu'il fut cédé à notre église et appliqué au pilier où on le voit aujourd'hui C'est sans doute à cette époque où il a dû être réparé.

Solliès-Ville, d'après un ancien manuscrit que nous possédons, était autrefois compris dans les Alpes-Maritimes avec Embrun, Digne, Senès, Glandevès et Vence, (chef-lieu).

Sollies Ville

Il nous a été impossible de trouver aucun document sérieux hormis des dates, ou de recueillir la moindre légende qui put nous éclairer sur l'histoire et les mœurs de cette localité. Les cérémonies religieuses que l'on y célèbre aujourd'hui, ne remontent pas au-delà du XVIIIe siècle. Celle qui nous a paru la plus touchante c'est l'institution des 12 apôtres : on la doit à la générosité d'André Monier, qui légua le 18 septembre 1723, deux propriétés sises, l'une à Solliès-Pont, l'autre à la Crau, avec redevance en bléau profit de l'hospice de St-Roch. Voici comment on procède pour accomplir la volonté du testateur.

La veille de Noël, les autorités constituées, les conseillers et tous les notables du pays, se réunissent à la mairie, y compris les 12 apôtres choisis parmi les plus nécessiteux. On sort de là eu bon ordre, précédé d'un trompette ou d'un tambour, et cierge allumé en main. Après que l'on a parcouru processionnellement les rues principales du village, on rentre dans la maison commune. Le curé commence par entonner le De profundis pour l'âme du bienfaiteur, puis bénit les vivres et la distribution a lieu. Si la fête de Noël échoit un dimanche, chaque apôtre reçoit un kilo de pain, une livre et demie de porc ; si au contraire, la solennité se rencontre un samedi ou un vendredi, une livre de fromage remplace le porc, avec accompagnement de noix, de figues sèches,etc.

Les libations achevées, on distribue un kilo de pain à tous les assistants indistinctement ; or, l'an passé, sous l'administration de l'excellent Maire, M. Joseph Requier, la cérémonie avait environ 200 habitants pour témoins.

Géologie locale

Pour compléter ces renseignements sous tous les rapports, ne faut-il pas que nous ajoutions quelques mots sur la formation géologique du pays ? En venant de la Farlède pour aboutir jusqu'à la rue dite des Marseillais, on rencontre à gauche et à droite le grès bigarré alterné de couches de marnes verdâtres de psammites laminaires, rougeâtres, bariolés, d'argiles bleuâtres ; plus haut, on n'aperçoit plus que le grès rouge à sa gauche. Ces énormes bancs s'élèvent jusqu'à 300 mètres au dessus de la mer ; couronnés de pins, ils contrastent agréablement avec le fer carbonate, limoneux, agglutiné, qui, broyé par un rouleau de pierre, fournit de la terre exploitée à la Farlède, pour des briques, etc.

Ces bancs un peu inclinés vers l'Ouest, plongent au Nord. On se rendra compte de ce gisement, si l'on considère qu'à mi-côte, on remarque deux bancs, dont l'un rappelle le grès vosgien, à gros galets de quarz, l'autre plus haut, d'un grès très fin et très compacte, se rapprochant beaucoup, à la couleur près, du grès rouge de Bretagne. Très peu friable, il sert aux murs de clôture et même à la bâtisse. Plus loin, c'est du calcaire bitumineux ou grenu tel que l'offre l'assise supérieure du Muschelkalk. Mais du moment qu'on est arrivé au haut du village, l'œil ne découvre dans toutes les constructions, dans toutes les ruines et l'église même que le muschelkalk bitumineux noirâtre dont la carrière n'est pas loin, et du calcaire grenu. Dans les environs vers le nord et nord-ouest, on rencontre du lias, ce qui prouverait que le soulèvement du grès bigarré est antérieur à la formation du terrain jurassique.

Le château, l'église et le couvent des templiers ont été bâtis sur le calcaire du Muschelkalk supérieur, en partie caverneux comme le tuf. En fait de fossiles, nous ne pouvons citer que des térébratules, des peignes, le moule d'un univalve globuleux que nous n'avons pu reconnaître.

Quelque soin que nous ayons pris à réunir tous ces détails, nous sommes loin de croire que Solliès-Ville, ne laisse plus rien à explorer ; l'investigateur patient pourra, à l'aide d'un heureux hasard et en dépit de la rigueur des temps révolutionnaires, faire des découvertes que le peu de loisirs dont nous jouissons, nous rendues impossibles.

D. Rossi 1863,
Directeur du Propagateur du Var, membre de l'Athénée de Paris, etc

photo pour Eglise

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 136600
  • item : Eglise
  • Localisation :
    • Provence-Alpes-Côte d'Azur
    • Var
    • Solliès-Ville
  • Code INSEE commune : 83132
  • Code postal de la commune : 83210
  • Ordre dans la liste : 2
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : église
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction :
    • Nous n'avons aucune informlation sur les périodes de constructions de cet édifice.
  • Date de protection : 1846 : classé MH
  • Date de versement : 1993/06/04

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : 18 04 1914 (J.O.)
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Photo : dd1bb682348d5a6f4a0fe556456ca16b.jpg
  • Détails : Eglise : classement par liste de 1846
  • Référence Mérimée : PA00081745

photo : joel.herbez

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