photo : michel
Le Lude (Sarthe), petite ville sur le Loir. Curiosité : le château, le parc de ce château, la statue d'Hercule étouffant Antée, par Mongendre; l'ameublement intérieur, la chambre où coucha Henri IV, les voûtes des cuisines, les caves des tours
Source : Guide classique du voyageur en France par Jean-Marie-Vincent Audin 1841.
Le château du Lude, dit M. Bodin, ouvrage du XVIe siècle, était flanqué de quatre tours énormes: il n'en reste plus que trois (l'une d'elles s'étant écroulée vers la fin du siècle dernier) : elles sont décorées, ainsi que le principal corps de logis, de pilastres, d'arabesques et de divers ornements , parmi lesquels on voit des sirènes ; toutes ces sculptures sont médiocres, pour ne pas dire mauvaises ; mais la critique est désarmée lorsqu'on aperçoit, sur deux des piédestaux de la balustrade de la terrasse du côté de la rivière, deux porcs-épics en demi-relief, sans doute placés là pour rappeler le souvenir d'un bon roi, de celui que les grands appelaient le Roi roturier, et que les roturiers appelaient le Père du Peuple, qui avait pris pour devise le porc-épic avec ces mots qui s'y frotte s'y pique. Ces figures emblématiques portent à croire que le château a été bâti par Jacques de Daillon , qui, par ces sculptures, aura voulu apprendre à la postérité qu'il avait été honoré de la faveur de ce prince, dont il fut conseiller et chambellan.
On remarque sur la façade qui se présente du côté du parc, plusieurs rangs de bustes en médaillons des rois de France, sculptés en relief. De la terrasse dont nous venons de parler, la vue s'étend sur les jardins, sur le parc, orné d'un groupe en marbre blanc représentant Hercule étouffant Antée, ouvrage d'un manceau, Mongendre , dont il a été parlé à l'article Ecommoy ; et sur les collines, entre lesquelles serpente la rivière du Loir ; ce qui offre un très-agréable coup d'œil. Un fossé large et profond environne le château qui, dans le dernier siècle, a été augmenté de plusieurs corps de bâtiments.
Le château du Lude, dit M. Vaysse de Villiers, est un des plus beaux de cette partie de la France. Sa hauteur majestueuse, sa construction, partie gothique, partie moderne, sa forme carrée, les énormes tours rondes qui ressortent de ses quatre angles, tout cela lui donne un aspect imposant, auquel ajoutent encore beaucoup sa situation avantageuse sur le bord du côtean qui domine le Loir. Au bout de l'allée est une large porte qui figure la principale entrée du château, comme cette allée en figure l'avenue : du côté du parc ce n'est qu'une porte charretière ; en dehors, c'est un beau portail gothique, orné de sculptures, avec créneaux, meurtrières et mâchicoulis.
L'intérieur a été nouvellement et richement meublé ; on en vante la distribution, et l'on y fait voir un appartement, dont les meubles, du XVIe siècle, ont été conservés, et où sont placées deux inscriptions : on lit sur la 1re :
« Henri IV a couché dans cette chambre, la veille du sacre (Fête-Dieu), l'an 1598, et a assisté à la procession, qui fut la première cérémonie catholique où il se trouva depuis sa conversion.»
Sur la 2e :
« Louis XIII a couché dans cette chambre, le 5 juin 1619, en allant en Touraine voir Marie de Médicis sa mère qui s'y était retirée ; d'où elle alla à Angers, excita une révolte qui fut apaisée en 1620, par la prise du Pont de-Cé, où le roi se trouvait : il était alors âgé de 18 ans. »
On y fait remarquer aussi les belles voûtes des cuisines, ainsi que les caves et l'épaisseur des murs dans les trois tours, ayant jusqu'à trois mètres un tiers (10 pieds). La cour du château, décorée de statues et de pilastres en marbre, est carrée : elle a quelque chose d'antique qui rappelle les petites cours carrées de Pompéïa. Elle est ornée depuis 5 à 6 ans de beaux orangers. On prétend que les travaux faits à ce château par M. de la Vieuville, vers 1787 , lui ont coûté 279,000 francs.
Source : Dictionnaire statistique de la Sarthe par Julien-Rémy Pesche 1829.