Chapelle Saint-Vincent

Saint-Laurent-d'Agny est un immense atelier de cordonniers ; tout le monde y travaille sur le cuir et confectionne diverses sortes de chaussures. Des commissionnaires, parcourant le pays, achètent tous les produits de cette industrie, et en approvisionnent, soit les bazars de Lyon, soit les foires et marchés des environs.

A demi-lieue du village et au-dessus d’un petit hameau s’élève, sur un des mamelons du mont Agny, une modeste chapelle, dédiée a saint Vincent, patron des vignerons. On en fait remonter l’origine au IX^e siècle ; mais le bâtiment a été reconstruit plusieurs fois ; celui qui existe actuellement ne date pas de plus de 400 ans (NdW : comprendre les dernières modifications ne datent pas de plus de 400 ans en 1868, voir annotation de Monsieur D. Robert ci dessous).

Il est lourd, massif et étayé par de forts piliers. On y entre par une porte basse ; deux étroites fenêtres ogivales ne l'éclairent qu'imparfaitement. Un clocher carré à ogives géminées domine ce rustique édifice, qui n'est ombragé que par le maigre feuillage de quelques tilleuls décrépits.

La grande messe que l'on y célèbre le jour de la fête du saint, et la procession des Rogations attirent à cette chapelle une foule de villageois ; le reste de l'année, il s'y dit pourtant bon nombre de messes particulières payées par les vignerons, qui appellent sur leurs récoltes les bénédictions du ciel, moyennant la modique rétribution d'un franc.

De ce point élevé, on jouit d'une vue magnifique. Craignant de tomber dans les redites, nous n'en détaillerons pas les beautés, laissant ainsi le plaisir d'une agréable surprise aux touristes qui feraient un pèlerinage à la chapelle de Saint-Vincent-d'Agny.

Source : Autour de Lyon: excursions historiques,pittoresques et artistiques par Achille Raverat 1865.

Dagninus : Saint-Vincent-d'Agny, aujourd'hui simple hameau de la commune de Saint-Laurent-d'Agny. Saint-Vincent est bien plus ancien que ce dernier village. Les actes de foi et hommage du XIII^e siècle des seigneurs de Saint-Laurent distinguent toujours Saint-Laurent du lieu appelé Dagnyns. Il en est de même du pouillé du diocèse de Lyon de la même époque, qui mentionne à la fois l'église de Daygnins et celle de Saint-Laurent. La transaction de 1323 déjà citée porte : Sanctus Laurentius de Dagnins ; le terrier de 1559 : Saint-Laurent et Saint-Vincent d'Aignins (Archives du Rhône, Inventaire des titres de Saint-Just. Terrier de Saint-Paul, fol. 150. Pouillé du diocèse de Lyon du XIII^e siècle).

Ce nom a été transformé en Agny, peut-être parce qu'on n'a pas pris garde au trait placé sur l'I dans les manuscrits, peut-être aussi par abréviation de Dagnini villa. Quoi qu'il en soit, Saint-Vincent conserve encore son église romane du X^e siècle, aujourd'hui simple chapelle, mais qui, après avoir été la paroisse mère de Saint-Laurent, a conservé son titre d'annexe jusqu'en 1789. (Ann. 1000. Cart. de Sav. charte 366)

Source : Mémoires lus à la Sorbonne dans les séances extraordinaires du Comité par le Comité des travaux historiques et scientifiques 1868.

Annotation : Il faut ici comprendre, sans aucun doute, que les dernières modifications apportées à cette chapelle ne dataient pas de plus de 400 ans en 1868. En effet, le bâtiment en lui-même est visiblement, pour l’essentiel, de facture bien plus ancienne : l’appareillage des pierres, la nef unique en berceau, l’abside semi-circulaire en cul de four couverte de pierres plates, sont typiques d’une architecture romane primitive remontant très vraisemblablement au Xe ou au XIe siècle. D’ailleurs, l’existence de cette chapelle est attestée dès le IXe siècle, bien qu’on ne sache pas exactement à quoi elle ressemblait à l’époque.