photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies
Jusqu'au début du 18e siècle, la frappe des monnais se faisait sur la rive droite de la Seine. L'hôtel fut conçu en 1767 par l'architecte Jacques-Denis Antoine. Il comporte deux parties, l'une publique, l'autre industrielle.
Situé sur le quai de Conti, numéro 11 dans le quartier de la Monnaie.
Dans un édit de Charles-le-Chauve, de l'année 864, Paris se trouvait au nombre des villes ayant le droit de fabriquer des monnaies. Le bâtiment affecté à cette fabrication devait faire partie du palais de la Cité. Dès que le faubourg septentrional fut défendu par une enceinte, on y transféra la maison de la monnaie. Dans le quartier des Lombards, on voit encore aujourd'hui une rue nommée de la Vieille-Monnaie. Un acte de 1227 indique une de ses maisons sous le nom de Monetaria et de Veteri Moneta. Quelque temps après, cette fabrication fut transportée dans une maison où s'établirent plus tard les religieux de Sainte-Croix-de-la-Brelonnerie. Dans l'acte de fondation de ce coûtent il est dit: « que saint Louis donna aux religieux une propriété appelée de la Monnaie. »
Au commencement du XIVe siècle, un Hôtel des Monnaies était établi dans la rue qui en porte encore aujourd'hui le non ; les bâtiments y subsistèrent jusqu'à l'entière construction de l'édifice du quai de Conti. L'ancien Hôtel des Monnaies, tombant en ruine, fut alors abattu. En vertu des lettres-patentes du mois d'août 1776, on ouvrit sur son emplacement les rues Boucher et Estienne.
« Louis, etc. Par nos lettres-patentes du 7 janvier 1765, nous aurions ordonné, attendu la vélustè de notre hôtel actuel des Monnaies à Paris, qu'il en serait construit un autre sur le terrain vague entre la rue Royale et celle des Champs-Elysées (ci-devant appelée de la Bonne-Morue), derrière les façade qui servent de décoration à la place où est posé notre statue équestre ; ils nous aurait été représenté par nos chers et âmes les prévôt des marchands et échevins de notre bonne ville de Paris, que l’exécution de nos lettres-patentes pourrait ralentir l'activité du commerce de l'orfèvrerie, en ce que l'emplacement destiné pour ce nouvel hôtel des Monnaies se trouverait considérablement éloigné du centre de notre capitale, et que les orfèvres et autres correspondants aux monnaies seraient obligés de perdre un temps considérable pour y porter leurs ouvrages et matières, et comme nous n'avons en vue que le plus grand avantage des habitants de notre bonne ville de Paris, et la facilité et commodité du commerce, nous avons estimé convenable de déférer aux représentations qui nous ont été faites à cet égard, en assignant au nouvel hôtel des Monnaies, qu'il est nécessaire de construire, un autre emplacement plus à la portée des orfèvres et autres commerçants et trafiquants des matières d'or et d'argent, et en ordonnait tous les autres arrangements que ce changement exige ; nous y avons pourvu par arrêt rendu en notre conseil, le 18 septembre dernier, sur lequel nous avons jugé nécessaire de faire expédier nos lettres patentes ; à ces causes, etc.
Données à Versailles, le 16e avril l'an de grâce 1768, et de notre règne le 53°. Signé Louis. »
Ce monument, remarquable par ses nobles proportions, a été construit sous la direction de Jacques-Denis Antoine, architecte. Le principal corps de l'édifice, dont la façade se développe sur le quai de Conti, renfermee un magnifique vestibule orné de vingt-quatre colonnes doriques ; un bel escalier que décorent également seize colonnes ioniques ; un vaste cabinet de minéralogie richement ordonné ; plusieurs pièces où sont placées des machines ; des salles pour l'administration, accompagnées de grands logements.
Au fond de la grande cour est située la salle du monnayage. Elle a 20 m. de longueur sur 13 m. environ de largeur. L'architecte a pris soin de l'isoler afin d'éviter aux autres bâtiments les effets de l'ébranlement produit par le jeu des balanciers. Au dessous on trouve la salle des ajusteurs ; le surplus des constructions est employé aux fonderies, aux laminoirs, etc..
La décoration de la façade principale, percée de vingt-sept fenêtres, consiste en un avant-corps de six colonnes ioniques, élevées sur un soubassement de cinq arcades, ornées de refends en bossages. Un grand entablement avec consoles et modifions, couronne l'édifice dans toute sa longueur. Au-dessus de l'avant-corps est un attique au-devant duquel ont été placées six statues: la Loi, la Prudence, la Force, le Commerce, l'Abondance et la Paix.
La seconde façade, sur la rue Guénégaud, a son soubassement enrichi de bossages. L'avant-corps du milieu est orné de quatre statues représentant les quatre éléments. La cour principale, entourée d'une galerie, a 36 m. de profondeur sur 30 de largeur. La salle des balanciers s'annonce par un péristyle de quatre colonnes doriques. La voûte intérieure s'appuie sur quatre colonnes dont le style se rapproche de l'ordre toscan. Au fond de celle-ci s'élève une statue de la Fortune.
Le cabinet de minéralogie, qui occupe l'avant-corps au milieu, au premier étage, est décoré de vingt colonnes corinthiennes d'un grand module, qui supportent une tribune régnant au pourtour, dans la hauteur du deuxième étage. Ce cabinet est orné de bas-reliefs et d'arabesques. Les corniches, les chambranles des portes et des croisées sont enrichis d'ornements dorés dont les sculptures sont distribuées avec un goût dont la délicatesse est pleine d'harmonie et de pureté.
On a placé en 1839, sur le palier de l'escalier d'honneur de l'hôtel des Monnaies, le buste en bronze de l'architecte Antoine. C'est un juste hommage rendu à la mémoire d'un homme qui de simple maçon, est devenu l'égal des plus grands artistes du XVIIIe siècle.
Source : Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments 1844.