Eglise Saint-Germain-des-Prés

Bas-côté nord de Saint-Germain-des-Prés

Histoire de Saint Germain des prés

Il est impossible de tracer l'histoire de cette aïeule de nos églises, sans parler de l'abbaye célèbre, dont l'existence remonte au premier temps de la monarchie chrétienne.

Tous nos historiens conviennent que l'abbaye de Saint-Vincent, depuis Saint-Germain-des-Prés, fut fondée vers 543 par Childebert Ier, fils de Clovis. Ce prince, accompagné de Clotaire, était allé en Espagne faire la guerre aux Wisigoths. Les deux rois, ayant réuni leurs forces, mirent le siège devant Saragosse, qu'ils réduisirent à l'extrémité. Les habitants consternés, n'espérant plus aucun secours humain, se couvrirent de cilices, et, chantant des psaumes, portèrent en procession autour des murs de la ville la tunique de saint Vincent. Les deux rois, touchés de compassion, accordèrent la paix, à deux conditions, toutefois : l'une que l'arianisme serait entièrement banni d'Espagne, l'autre qu'on leur donnerait la tunique de saint Vincent. Ces conditions furent acceptées par les vaincus, et Childebert apporta la tunique à Paris en grande solennité.

Quelque temps après, ce roi résolut d'élever une basilique, pour déposer la sainte relique et une croix qu'il apportait de Tolède. Sur l'emplacement que choisit le prince, l'on voyait encore les débris d'un temple consacré à la déesse Isis ; Childebert voulut faire succéder le culte du Dieu du ciel, à celui des fausses divinités de la terre.

L'édifice construit en l'honneur de saint Vincent, martyr, et de la sainte croix, était soutenu par des colonnes de marbre ; les murailles étaient ornées de peintures à fond d'or, et le pavé formé de pièces de marqueterie. L'extérieur de l'église répondait à la magnificence de l'intérieur. L'édifice couvert de cuivre doré jetait un si vif éclat qu'on le nomma plus tard Saint-Germain-le-Doré.

Cette abbaye fut dédiée par saint Germain le jour même de la mort de Childebert, 23 décembre 558. Dès le 6 du même mois, ce prince avait donné sa charte de fondation. Cet acte consiste principalement dans la donation du fief d'Issy avec ses appartenances et dépendances, du droit de pêche sur la rivière, depuis les ponts de Paris jusqu'au ruisseau de Sèvres, d'un chemin de dix-huit pieds de large des deux côtés du fleuve, et d'une chapelle de Saint-Andéol que remplaça depuis l'église de Saint-André-des-Arts.

Saint Germain fit bâtir au midi de l'édifice consacré à saint Vincent un oratoire sous l'invocation de saint Symphorien, et le monastère fut d'abord occupé par des religieux qui suivaient la règle de saint Basile, de cet homme qui, au moyen d'une haire et d'un sac, était parvenu à rassembler sous ses lois plusieurs milliers de disciples.

Le corps de saint Germain fut inhumé dans la chapelle de saint Symphorien. Bientôt Dieu couvrit la tombe du pieux évoque de miracles éclatants, en proportion des vertus du saint homme ici bas, et la dévotion du peuple fit donner le nom de Saint-Germain au monastère et à l'église conjointement avec celui de Saint-Vincent. Dans plusieurs actes des VIIe et VIIIe siècles, on nomme cette abbaye la basilique de Saint-Germain et de Saint-Vincent. Le 25 juillet 754, en présence de Pépin et de ses deux fils, Carloman et Charles, le corps de saint Germain, qu'on avait exhumé de la chapelle saint Symphorien, fut déposé dans la grande église au rond-point du sanctuaire.

Sacristie de Saint-Germain-des-Prés, dessin de 1824.

Sacristie de Saint-Germain-des-Prés, dessin de 1824.

Celle abbaye éprouva la fureur des Normands. En 815 et 858, ils pillèrent ce monastère, et y mirent le feu en 861. Huit ans après il fut réparé par les soins de l'abbé Gozlin ; mais en 885 les Normands ravagèrent encore les environs de Paris et ruinèrent l'abbaye de fond en comble. L'église et le monastère ne furent rebâtis que vers l'an 1000, par l'abbé Morard aide des libéralités du roi Robert. Le pape Alexandre III fit la dédicace de la nouvelle église le 21 avril 1163. L'abbé Eudes fit bâtir un nouveau cloître vers 1227. Le réfectoire et les murs de l'abbaye furent construits par Simon en 1237. Hugues d'Issy, qui le remplaça, fit bâtir la chapelle de la Vierge, qui était située à côté de l'église.

Après la construction de l'enceinte de Paris sous Philippe-Auguste, l'évêque prétendit à la juridiction spirituelle sur le territoire de l'abbaye Saint-Germain-des-Près, qui était renfermé dans la ville. L'abbé de Saint-Germain s'adressa au pape Innocent III pour conserver ses droits. Mais avant la décision du souverain pontife, il accepta pour arbitres Geoffroy, évêque de Meaux, Michel, doyen de Saint-Marcel et frère Guérin. L'évêque Pierre Hugues, doyen, tout le chapitre de Notre-Dame, Guillaume, archiprêtre de Saint-Séverin, Raoul, curé de la chapelle Saint-Sulpice, l'abbé et les religieux de Sainte-Geneviève, promirent tous, sous peine de payer deux cents marcs d'argent, de s'en rapporter à la décision qui serait rendue. La sentence arbitrale, dont les détails précieux peuvent indiquer la topographie de Paris à cette époque, exempta de toute juridiction épiscopale le territoire contenu depuis la tournelle de Philippe Hamelin (aujourd'hui le palais de l'Institut ) jusqu'à la borne séparant vers Grenelle la terre de Saint-Germain d'avec celle de Sainte-Geneviève, et depuis cette borne jusqu'à une autre, formant la limite des deux mêmes terres près du chemin d'Issy, enfin à partir de cette limite jusqu'à la quatrième, placée par les arbitres contre les murs vers Saint-Étienne-des-Grés.

La sentence décida en même temps que les terres enclavées dans l'enceinte seraient soumises à perpétuité à la juridiction de l'évêque.

Les abbés de Saint-Germain durent se repentir plus tard d'avoir accepté cet arbitrage. Au mois de juin 1211 ces religieux reçurent la réponse du pape, qui adjugeait à l'abbé la juridiction spirituelle sur tout le territoire de Laas, même sur celui qui faisait partie de la ville.

La différence des juridictions donnait quelquefois naissance à de vifs débats. Les anciens registres du parlement attestent un fait étrange. Deux faux-monnayeurs, arrêtés à Villeneuve-Saint-Georges au mois de mai 1256, furent pendus dans la justice de Saint-Germain-des-Prés, puis pendus de nouveau dans celle du roi. Une nouvelle décision fut prise à cet égard lors de l'assemblée du parlement tenu à Melun par Saint-Louis en septembre 1257. Le droit alors mieux éclairci, les deux faux-monnayeurs subirent une troisième exécution.

Les abbés de Saint-Germain-des-Prés jouissaient de plusieurs autres privilèges. Il en est un qui mérite d'être rapporté en raison de sa bizarrerie. Les maréchaux de France en raison de l'estuage du port de Milly, recevaient de l'abbé et des religieux, le 28 mai, jour de la fête de Saint-Germain, douze pains, douze setiers de vin et douze sols parisis. De leur côté, les maréchaux de France étaient tenus de marcher devant l'abbé, un bâton blanc à la main, pendant la procession et la messe. Cet usage fut en vigueur jusqu'à la fin du XVe siècle.

Saint-Germain-des-Prés. L'église au 15e siècle dessin de Auguste Jacques Régnier (19e)

Saint-Germain-des-Prés. L'église au 15e siècle dessin de Auguste Jacques Régnier (19e)

Un autre droit que possédait l'abbé de Saint-Germain-des-Prés était celui qu'il avait sur les habitants de Chaillot, qui étaient tenus de lui donner tous les ans, le jour de l'Ascension, deux grands bouquets et six autres petits, un fromage gras fait avec le lait des vaches qu'ils menaient paître dans l'Ile Maquerelle (des Cygnes), en deçà de la rivière de Seine et un denier parisis pour chaque vache.

Une querelle violente s'éleva en 1278 entre l'Université et l'abbaye de Saint-Germain. Les maîtres et les écoliers de l'Université avaient coutume d'aller prendre leurs divertissements hors de la ville, dans un pré nommé, par cette raison, le Pré-aux-Clercs. Le chemin qu'ils traversaient appartenait à l'abbaye de Saint-Germain. Gérard de Moret, alors abbé, fit élever plusieurs maisons qui rétrécirent ce passage. Les écoliers adressèrent de vives réclamations à l'abbé, qui, se trouvant dans son droit, fit continuer les constructions. Le vendredi 12 mai, les clercs arrivent en bandes nombreuses, et tous, mettant la main à l'œuvre, démolissent en peu d'heures les bâtiments. Aussitôt Gérard de Moret fait sonner le tocsin et s'apprête à se défendre. Les vassaux de l'abbaye accourent, se rangent en bataille et fondent sur les écoliers. Plus de soixante étudiants furent tués ; on en saisit plusieurs qu'on jeta en prison. Gérard de Dôle, bachelier ès-arts, fut blessé mortellement. Jourdain, fils de Pierre le scelleur, périt sous le bâton, et Adam de Pontoise, frappé d'une masse de fer, perdit un œil.

Le lendemain de cette lutte meurtrière, l'Université présenta une plainte au cardinal de Sainte-Cécile, légat du pape, pour avoir raison de l'outrage. L'Université disait en terminant, que si dans la quinzaine justice n'était pas rendue, elle ferait suspendre tous ses exercices : seul remède que de pauvres étrangers et sans armes, tels qu'ils étaient, pussent opposer à ceux du pays.

Le légat, effrayé de ces menaces, condamna Etienne de Pontoise, prévôt de l'abbaye, comme coupable d'homicide, à être chassé de l'abbaye Saint-Germain. Philippe-le-Bel fit également examiner celte affaire en son conseil. Le roi présent au jugement prononça lui même la sentence. Les religieux furent condamnés à fonder deux chapellenies de 20 livres parisis de rente chacune, à payer 200 livres pour les réparations de la chapelle Saint-Martin , 200 livres à Pierre le scelleur pour le dédommager de la perte de son fils ; 400 livres aux parents de Gérard de Dôle, et 200 au recteur de l'Université pour être distribués au régent et aux pauvres écoliers. Dix des plus coupables d'entre les vassaux de l'abbaye furent chassés du royaume. Les tourelles bâties sur la porte de l'abbaye du coté du pré furent rasées jusqu'à la hauteur des murailles, et le chemin pour lequel on s'ètait battu fut abandonné à l'Université. Il ne se passa aucun fait important à l'abbaye Saint-Germain-des-Près jusqu'au règne de Louis XII.

Le cardinal d'Amboise, légat du pape, après avoir réformé les Jacobins et les Cordeliers établis à Paris, voulut également renouveler la discipline des couvents des Bénédictins. Il confia celle mission à deux religieux de Cluny, qui s'occupèrent d'abord de l'abbaye Saint-Germain-des-Prés. La nouvelle réforme se maintint seulement pendant quelques années. En 1507, Guillaume Briçonnet, évêque de Lodève, introduisait à Saint-Germain-des-Prés la règle de Chézal-Benoit.

La nouvelle discipline était d'une grande sévérité. Elle prescrivait, outre l'abstinence de la viande, une solitude complète et une vie uniquement occupée des exercices de piété.

La construction du palais abbatial date de 1685. Elle fut commencée par les ordres du cardinal de Bourbon, abbé de cette communauté. Dès 1630, la réforme de Chézal-Benoit avait été remplacée par la congrégation de Saint-Maur, autorisée par Grégoire XV. Parmi les hommes recommandables qu'elle a produits, brillent au premier rang Mabillon, Monlfaucon, Félibien, Clément et Lobineau.

L'abbaye Saint-Germain-des-Près fut supprimée en 1790 ; ses bâtiments devinrent propriétés de l'état. Sur leur emplacement ont été construites les rues de l'Abbaye et Saint-Germain-des-Prés.

Une partie du palais abbatial subsiste encore dans la première de ces voies publiques. La demeure des princes-abbés est aujourd'hui descendue au rang d'une maison bourgeoise, en dépit de sa façade qui proteste contre cet abaissement.

Démolition de Saint-Germain-des-Prés. Chapelle de la Vierge dessin Gautier-Dagoty 1802.

Démolition de Saint-Germain-des-Prés. Chapelle de la Vierge dessin Gautier-Dagoty 1802.

Architecture de l'église Saint Germain des prés

Il nous reste maintenant à parler de l'architecture de l'église Saint-Germain-des-Prés. La tour de la façade est, de l'avis de tous les archéologues, un débris précieux de l'édifice élevé par Childebert. Il est malheureux que cette tour ait été taillée en carré lisse, cette restauration lui a fait perdre son caractère d'antiquité. Les piliers de la nef paraissent appartenir à la même époque. La seconde église bâtie en forme de croix est du XIe siècle. Elle avait autrefois trois clochers, un au dessus du portail, et les deux autres au-dessus de chacun des côtés de la croisée ; ces deux derniers ont été abattus en 1821. La croisée est éclairée aux extrémités par deux grands vitraux qui en occupent toute la largeur. Le chœur placé dans le rond-point est entouré de huit chapelles qui furent dédiées par Hubold d'Hostie en 1163.

Le portail ouvert dans la tour était orné de huit figures qui ont été détruites pendant la révolution. Parmi ces statues, six représentaient des personnages de l'Ancien-Testament, et les deux figures les plus éloignées de la porte étaient celles de Clotaire Ier et de Clodomir.

Au fond du porche et au-dessus de la porte de l'église on voit un bas-relief d'un style fort ancien représentant la Cène. Ce morceau de sculpture est aujourd'hui dans un triste état de dégradation.

Le caractère de l'architecture intérieure est tout-à-fait roman, à l'exception de quelques parties construites au commencement du XIIe siècle, et qui se rapprochent davantage du stylo gothique.

Des réparations importantes ont été faites à cette église au commencement du XVIIe siècle. On ouvrit alors les deux bas-côtés, on substitua la voûte au lambris doré qui en tenait lieu ; et dans chacune des nefs de la croisée furent construites les chapelles qui en occupent tout l'espace. On regrette amèrement que les artistes chargés de ces travaux n'aient pas su respecter le caractère primitif de l'architecture du monument. Dans les chapelles des bas-côtés du chœur ont été déposés en 1821 les cendres de Descartes, celles de Mabillon, de Montfaucon et le cœur de Boileau qu'on avait extrait de la Sainte-Chapelle.

Plusieurs tableaux de Sébastien Le Clerc, de Nicolas Bertin, de Vanloo, ornent cette église, qui est aujourd'hui la première succursale de Saint-Sulpice.

Source : Dictionnaire des rues de Paris et de ses monuments par Félix Lazare 1844.

photo pour Eglise Saint-Germain-des-Prés

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 121372
  • item : Eglise Saint-Germain-des-Prés
  • Localisation :
    • Ile-de-France
    • Paris 06
  • Adresse : 3 place Saint-Germain-des-Prés
  • Code INSEE commune : 75106
  • Code postal de la commune : 75006
  • Ordre dans la liste : 32
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : église
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction : 5 différentes époques marquent l'histoire du lieu.
    • 10e siècle
    • 11e siècle
    • 12e siècle
    • 2e moitié 12e siècle
    • 17e siècle
  • Date de protection : 1862 : classé MH
  • Date de versement : 1993/07/08

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : Classement confirmé 23 05 1923 (certificat) . Site inscrit 06 08 1975 (arrêté) . 18 04 1914 (J.O.) .
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Photo : 7175541517393bce5f9ce947439df0ce.jpg
  • Détails : Eglise Saint-Germain-des-Prés : classement par liste de 1862
  • Référence Mérimée : PA00088509

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies