Ancien couvent des Carmes, actuellement Institut catholique de Paris

Edouard Branly, inventeur du cohéreur à limaille, principal radioconducteur des appareils de réception de la télégraphie sans fil, avait établi son laboratoire dans un bâtiment construit en 1932 par son gendre, Paul Tournon, dans le jardin de l'Institut Catholique. Restent aujourd'hui le bureau du savant, avec une peinture murale réalisée par sa fille Elisabeth, la cage de Faraday partiellement tronquée, et une partie de l'ancien grand laboratoire. Au sous-sol, dans les anciens ateliers, sont encore visibles les piliers de béton armé ancrés au sol.

Histoire

Ce fut en 1254 que parurent pour la première fois en France les religieux du Mont-Carmel. Plusieurs d'entre eux avaient quitté les rochers de la Syrie, où ils étaient en butte à de violentes persécutions, et se mettant à la suite du roi saint Louis, ils vinrent à Paris et s'installèrent dans une chétive habitation située sur les bords de la Seine, à l'endroit où fut élevé plus tard le couvent des Célestins. Les Carmes portaient alors une sorte de manteau blanc rehaussé de bandes noires, ce qui leur fit donner par le peuple le surnom de Barrés (La rue des Barrés Saint-Paul, qui existe encore, doit son nom à ces religieux. Elle conduisait à leur couvent). En 1309, Philippe le Bel consentit à leur donner une maison beaucoup plus vaste, et surtout beaucoup plus saine. Cette maison, dite du Lion, était située au bas de la montagne Sainte-Geneviève, près la place Maubert. Enfin plus tard, sous Philippe le Long, leur nouvelle habitation étant encore devenue insuffisante, ils achetèrent, le 9 août 1386, les bâtiments du collège de Dace, qui étaient contigus aux leurs, et firent construire un vaste monastère avec une église dont le portail donnait sur la rue SaintHilaire (Cette portion de la rue Saint-Hilaire est aujourd'hui la rue des Carmes. Le couvent et l'église furent détruits en 1811 pour l'installation du marché de la place Maubert).

Les choses demeurèrent en cet état jusqu'à la fin du XVIe siècle ; mais à cette époque de graves abus s'étant glissés dans l'ordre tout entier, des réformes importantes furent adoptées en Espagne, puis en Italie, par de nouveaux moines qui prirent le nom de Carmes-Déchaussés (discalceati), parce qu'ils ne portaient que des sandales aux pieds. Bientôt le pape Paul V, émerveillé de ces réformes, écrivit à Henri IV pour obtenir de lui l'admission en France des Carmes Déchaussés. Le roi y ayant consenti, deux révérends pères se mirent en route pour Paris.

Voici comment Jacques Dubreuil raconte leur arrivée :

« Ces religieux viennent de Rome, et l'occasion qu'ils eurent de venir fut un propre mouvement du Pape, auquel l'archiduc et l'Infante de Flandres avoient requis qu'il leur envoyast de ces religieux, tant pour les establir en leurs pays comme aussi pour avoir soin des religieuses Carmélites, lesquelles ces princes avoient fondées et establies trois ans auparavant à Bruxelles et autres endroits. Le Pape voyant qu'il falloit que ces religieux passassent par le royaume de France pour arriver en Flandres, voulut escrire un brief exprès au Roy par lequel il lui offroit ceste religion et le prioit de s'en servir en son royaume. Et en escrivit un autre à M. le cardinal de Joyeuse par lequel il lui commandoit de les présenter* au Roy, et prendre soin de leur establissement. Tandis qu'ils estoient en chemin, advint la mort lamentable du feu roy, et arrivans à Paris, ils saluèrent la Royne et M. le cardinal lui présentai brief addressantau feuRoy. Sa Majesté les reçut humainement et avec charité, et commanda que l'on leur depeschât lettres. Ce qui fut faict et entrèrent en possession de la maison où ils sont à présent aux fauxbourgs Saint-Germain, l'an 1611, le jour de la Pentecoste, laquelle a été achetée des aumosnes des gens de bien. Ils n'ont encores à présent qu'une chapelle d'attente, laquelle sera ruinée quands ils auront une église.

L'un de leurs principaux bienfaicteurs est, comme j'ay entendu, monsieur Vivian, qui a acheté le lieu de M. Barat »

Les lettres patentes du roi avaient été délivrées au mois de juin 1610, mais cela ne suffisait pas ; il fallait qu'elles fussent enregistrées par le Parlement, et ce dernier mit une certaine hésitation à accomplir cette formalité.

Le 23 septembre 1610 le roi Louis XIII, sous la régence de Marie de Médicis, sa mère, envoya au Parlement, représenté alors par la chambre des vacations, un ordre ainsi conçu :

« Nos amez et féaux ; Par nos lettres patentes en forme de charte du mois de juin dernier et autres à vous advenantes du 4e de ce mois, vous verrès la permission que nous avons donnée aux religieux de Notre-Dame de Mont-Carmcl, autrement dit les Carmes-Deschaussez, de s'establir en cette bonne ville de Paris et en celle de Lyon, le consentement des ordinaires et des communautez, à la vérification desquelles nos lettres, nous vous mandons et ordonnons procéder incontinent et du contenu en icelles, faire, souffrir et laisser jouir les dits religieux, cessant et faisant cesser tous troubles et empeschements à ce contraires. Car tel est notre plaisir.

Donné à Paris le XXIIe du mois de septembre.

Signé Louis.»

A la réception de cette lettre, le procureur général du roi se présenta devant la chambre des vacations ; mais celle-ci renvoya la délibération au lendemain de la Saint-Martin, époque à laquelle les vacances du Parlement devaient cesser.

Cependant le 12 novembre arriva et on temporisa encore. Il était manifeste que l'admission des Carmes Déchaussés soulevait de l'opposition au sein du Parlement. Mais au mois d'avril 1611, M. de Verdun, nouvellement nommé premier président, entra en fonctions. Il se montra favorable aux nouveaux religieux, et peu de temps après son installation, les lettres patentes du roi furent enregistrées ; le 22 mai suivant, l'archevêque de Paris, Henri de Gondy, leur octroya à son tour les autorisations qui le concernaient.

« Toutes les licences nécessaires estant obtenues, dit Claude Malingre, aussitost noble hommeM. Maistre Nicolas Vivyan achepta de M. Barat maistre d'hostel du roy par l'entremise de M. de Lusson, controlleur de la chancellerie, une maison et un jardin assez ample au fauxbourg de Sainct Germain des Prez pour y construire un monastère sous le titre du glorieux espoux de la très-pure Vierge, le grand saint Joseph 3. Et bientôt après les religieux ayant accommodé quelques petites cellules assez grossièrement avec des ais et planté la croix, ils prirent possession du lieu. De sorte que la fondation du monastère de Saint-Joseph des Carmes-Deschaussez de Paris fut faite et commencée le propre jour de la Pentecoste de l'année 161 i. Jour heureux, jour de feu et de flamme, jour de sanctification, de dons célestes et de bénédictions surabondantes du sainct Esprit.

« Cette grande feste échéoit cestevannée-là au 22e jour du mois de may, auquel jour la cérémonie fut faite par monseigneur le nonce Ubaldin, de la maison de Médicis et neveu du pape Léon XI... Il célébra la première messe dans la salle de ladite maison où autrefois les Huguenots avoient tenu leur presche et où les mondains faisoient leurs plus notables récréations. Si bien que ce lieu prophane fut heureusement changé en lieu de saincteté et de bénédiction où se chantoient les louanges de Dieu...

«En l'année 1613 le concours du peuple croissant de plus en plus, les premiers pères qui estoient pour lors, résolurent de commencer la fabrique de leur couvent et de bastir leur grande église où ils sont maintenant. Et en tesmoignage d'une sincère bienveillance, ils jugèrent à propos de déférer cet honneur à M. "Vivyan leur premier bienfaicteur après Dieu, que de mettre les premiers fondements du couvent et en présence de toute la communauté des religieux, avec les prières et cérémonies accoustumées de l'Église, le septième jour de février de la mesme année 1613 ; le dict sieur Vivyan y mit la première pierre du costé droict du lavoir, comme on entre dans le réfectoire.

« Quant à leur église, la première pierre y fut mise le jour de leur glorieux père et patriarche saint Elie, qui est le vingtième de juillet en la même année 1613, par la Reyne mère Marie de Médicis, régente en France durant la minorité de son fils Louis XIII, accompagnée de quelques princes et princesses de sa cour qui assistèrent à la cérémonie et aux bénédictions qui furent faictes par le cardinal de Bonzi, évesque de Beziers, revestu pontificalement; la noblesse, avec les gardes et quantité de peuple qui estoit accouru pour voir la cérémonie, se rangèrent autour des fondements qui estoient très-profonds.

« La bénédiction de cette première pierre dura bonne espace de temps durant laquelle, afin de tempérer les grandes chaleurs qu'il faisoit et pour empêcher l'ardeur du soleil, on avoit dressé des tentes et pavillons pour y mettre les personnes de qualité. Les bénédictions ecclésiastiques étant achevées, les religieux vinrent en bel ordre en procession, tenant des cierges allumez en leurs mains, se renger modestement auprès du lieu où elle devoitestre posée. La Reyne les suivoit avec une gravité royale, et arrivée à l'endroit désigné, Sa Majesté s'agenouilla humblement. Et auparavant que d'asseoir cette première pierre, on y jeta quelques pièces d'or et d'argent avec mille bénédictions, acclamations de joye et d'actions de grâces que cette noble assistance donnoit à Nostre Seigneur.

« Tous les cœurs furent remplis de resjouissance et d'allégresse quand on vit la Reyne prendre du mortier sur une truelle d'argent qu'elle jetta de bonne grâce sur la pierre béniste qui estoit de marbre, et sur laquelle estoient gravées ces parolles latines : Maria Medicea Regina mater, fondamentum hujus ecclesiœ posuit anno 1613. Cette première pierre fut mise au costé droict de l'église, c'est-à-dire au gros pillier qui est à costé du grand autel où se chante l'Évangile et qui soutient l'arcade de la chapelle de la très-saincte Vierge Marie.

« Tels furent les heureux commencements de cet illustre monastère. »

On ne se doutait guère alors que, moins de deux siècles plus tard, ce couvent, inauguré sous d'aussi favorables auspices, deviendrait le théâtre des scènes les plus sanglantes, et qu'à ces acclamations de joie succéderaient les cris de farouches massacreurs et les gémissements de nobles victimes !

En même temps que les Carmes se faisaient construire ces bâtiments que rendait indispensables le nombre de leurs prosélytes, ils reculaient par des acquisitions successives les limites de la propriété Barat, en sorte que peu d'années après leur installation ils se trouvèrent possesseurs d'un vaste enclos que bornaient à l'est la rue Cassette, à l'ouest la rue du Regard, au nord celle du Chasse-Midi (aujourd'hui Cherche-Midi) et au sud le chemin du Valgirard, actuellement rue de Vaugirard.

Au commencement du XVIIIe siècle, ils firent élever sur la façade de la rue Cassette et sur celle de la rue du Regard plusieurs hôtels qu'ils louèrent avantageusement, et qui, au dire de Piganiol de la Force, devaient rendre ce couvent le plus riche de l'ordre lorsque les pères auraient acquitté les dettes qu'ils avaient contractées pour construire ces beaux édifices.

Source : Le couvent des Carmes et le séminaire de Saint-Sulpice pendant la terreur par Alexandre Sorel

photo pour Ancien couvent des Carmes, actuellement Institut catholique de Paris

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 121402
  • item : Ancien couvent des Carmes, actuellement Institut catholique de Paris
  • Localisation :
    • Ile-de-France
    • Paris 06
  • Adresse :
    • 19, 21 rue d'Assas
    • 70 rue de Vaugirard
  • Code INSEE commune : 75106
  • Code postal de la commune : 75006
  • Ordre dans la liste : 6
  • Nom commun de la construction : 3 dénomiations sont utilisées pour définir cette construction :
    • couvent
    • oratoire
    • laboratoire
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction : 3 différentes époques marquent l'histoire du lieu.
    • 17e siècle
    • 20e siècle
    • 2e quart 20e siècle
  • Année : 1932
  • Type d'enregistrement : site inscrit
  • Dates de protection :
    • 1977/12/13 : classé MH
    • 1977/12/13 : inscrit MH
    • 2004/10/18 : inscrit MH
  • Date de versement : 1993/07/08

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • Le décor est composé de : 'ferronnerie'
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : Site inscrit 06 08 1975 (arrêté)
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :11 éléments font l'objet d'une protection dans cette construction :
    • escalier
    • élévation
    • salle
    • décor intérieur
    • galerie
    • cloître
    • réfectoire
    • prison
    • salle capitulaire
    • couloir
    • bureau
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : inscription propriété d'une association 1992
  • Photo : 5f804d4fdf5ad6c0c4279003059e6847.jpg
  • Acteurs impliqués dans l'oeuvre : Branly Edouard (commanditaire, ingénieur)
  • Détail :
    • Les façades et toitures
    • la salle des Epées
    • le cachot du général Hoche
    • l' escalier donnant sur la façade sur le jardin et conduisant au premier étage
    • la salle capitulaire
    • la salle des novices
    • la salle des inscriptions ou salle des Girondins
    • les couloirs des différents étages (cad. 06 : 03 BG 65) : classement par arrêté du 13 décembre 1977 - La galerie du cloître
    • le grand escalier avec sa rampe en fer forgé
    • le réfectoire
    • l' actuelle salle du Foyer International
    • l' annexe de la salle des Novices
    • les niveaux supérieurs de l' escalier donnant sur la façade sur jardin
    • les cellules
    • autres pièces et éléments interieurs non classés (cad. 06 : 03 BG 65) : inscription par arrêté du 13 décembre 1977 - Les parties suivantes de l'ancien laboratoire d'Edouard Branly à l'Institut catholique de Paris, 19, rue d'Assas : les façades et toitures du laboratoire construit par Paul Tournon
    • l'ancien grand laboratoire transformé en musée
    • l'entrée actuelle
    • le bureau d'Edouard Branly
    • l'ancien laboratoire isolé à usage de cage de Faraday (cad. BG 102) : inscription par arrêté du 18 octobre 2004
  • Référence Mérimée : PA00088500

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

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