Ensemble des grottes et abris préhistoriques de la vallée de la Save

La Statuette féminine de Lespugue (Haute-Garonne) Par René de SAINT-PÉRIER.

La statuette féminine, dont j'ai l'honneur d'offrir un moulage à la Société, pour ses collections, a été découverte le 9 août 1922, dans la grotte des Rideaux, à Lespugue (Haute-Garonne).

Cette grotte dont j'ai annoncé ici-même la découverte en 1911, a été remaniée dans sa partie antérieure, où le mélange d'objets paléolithiques avec des instruments médiévaux ne permettait pas une stratigraphie rigoureuse.

Mais à quelques mètres de l'entrée, le sol en place a permis une observation plus précise. J'ai reconnu là, en reprenant les fouilles, après la guerre, qu'un foyer paléolithique, non remanié, d'une épaisseur de 0m60 à 0m80 reposait sur une argile à Ursus speloeus et était recouvert d'environ 0m40 à 0m50 de-dépôts récents.

C'est dans ce foyer et à sa partie tout à fait superficielle (0m15 environ de profondeur) que j'ai recueilli la statuette, qu'un coup de pioche malencontreux d'un de mes ouvriers soulevant un bloc d'éboulement, a détériorée sur sa face antérieure. J'ai donné l'original à la galerie de Paléontologie du Muséum, et M. BOULE, en comblant les pertes de substance de la partie antérieure sur un moulage de la statuette a restitué, avec une approximation extrêmement voisine de la réalité, l'aspect primitif de l'objet. On pourra s'en rendre compte en comparant les figures ci-contre avec le moulage restitué des, collections de la Société.

La statuette est sculptée en ronde-bosse dans une défense de Mammouth. Elle mesure 0m147 de hauteur ; la tête est petite et ovalaire, le visage ne porte pas de traits distincts. Des lignes parallèles, figurant lès cheveux, descendent en avant sur les trois quarts de la face et en arrière jusqu'au niveau des omoplates. Le cou est mince, le thorax maigre, d'énormes seins en forme d'outres pendent jusqu'au ventre, petit et bombé, qu'ils repoussent en avant. Les bras, qui reposent sur les seins, sont détachés du tronc dans leur tiers inférieur, ce qui suppose chez le sculpteur une grande habileté technique. La région fessière est remarquable par son ampleur : les fesses sont rejetées latéralement et aplaties; elles présentent, à leur, partie inférieure, une bride surmontée d'une petite éminence qui me paraît correspondre à l'indication d'une fistule coccyigenne. Les cuisses présentent également une large saillie latérale, les jambes sont courtes et les pieds à peine indiqués. La fracture antérieure intéresse malheureusement la région pubienne, ce qui ne nous permet pas de savoir si les organes génitaux avaient été figurés. Il faut noter la présence, au-dessous des fesses d'un singulier vêtement, en forme de pagne triangulaire, qui paraît constitue par des bandes tressées, terminées par une frange.

Cette statuette se rattache au groupe des figurations humaines aurignaciennes, dites stéatopyges, que l'on connaissait déjà à Brassempouy, à Grimaldi, à Willendorf et à Laussel. Elle paraît, par certains de ses caractères, offrir même une manière de synthèse de ces curieuses figures. C'est ainsi qu'elle montre les seins pendants en forme d'outre, de la statuette de Brassempouy que Piette nommait « le manche de poignard », la tête globuleuse et sans, traits du visage des statuettes de Grimaldi, l'attitude des bras de la figurine de Willendorf.

Par là, s'affirme encore l'homogénéité de cet art sculptural paléolithique dont l'inspiration nous est inconnue. S'agit-il d'une représentation purement ethnique, d'une figuration d'ordre symbolique ou religieux ? Dans quelle mesure devons-nous rattacher ces figures au, type féminin de leur,époque ?

Je me bornerai à faire observer que l'étude de la faune et de l'outillage de la grotte des Rideaux, que j'ai recueillis jusqu'ici, permettent de fixer le niveau de la statuette à l'aurignacien tout à fait supérieur, plutôt qu'à un niveau magdalénien ancien, comme je l'avais pensé en 1911.

D'autre part, les caractères de ces statuettes et le pagne que seule jusqu'ici, nous montre la statuette de Lespugue, permettent de penser que les populations de notre pays avaient à l'époque aurignacienne des rapports plus ou moins étroits avec l'Afrique. On sait que la découverte à Grimaldi de squelettes du type négroïde avait déjà fait envisager cette hypothèse, que corrobore la similitude des outillages à l'époque aurignacienne, sur ces deux continents. Si la découverte de la « Vénus de Lespugue » ne permet pas de résoudre encore tous les problèmes complexes que soulèvent ces représentations humaines paléolithiques, elle apporte cependant un élément de plus à notre connaissanee des débuts de la sculpture humaine et c'est à ce titre qu'il me paraît intéressant d'en entretenir la Société préhistorique française.

Source :

  • Titre : Bulletin de la Société préhistorique de France
  • Auteur : Société préhistorique française
  • Éditeur : Société préhistorique de France (Paris)
  • Date d'édition : 1904-1963

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 46924
  • item : Ensemble des grottes et abris préhistoriques de la vallée de la Save
  • Localisation :
    • Midi-Pyrénées
    • Haute-garonne
    • Lespugue
  • Lieu dit : Bois-de-Saint-Martin
  • Code INSEE commune : 31295
  • Code postal de la commune : 31350
  • Ordre dans la liste : 1
  • Nom commun de la construction : 3 dénomiations sont utilisées pour définir cette construction :
    • grotte
    • abri sous roche
    • abri
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction : 3 différentes époques marquent l'histoire du lieu.
    • paléolithique
    • paléolithique supérieur
    • préhistoire
  • Date de protection : 1972/12/28 : classé MH
  • Date de versement : 1993/08/30

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : Site archéologique : 31 295 1 à 5 AP
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Détails : Ensemble des grottes et abris préhistoriques de la vallée de la Save (cad. A 49) : classement par arrêté du 28 décembre 1972
  • Référence Mérimée : PA00094369

photo : mamynaute32

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