Eglise Saint-Martin

L'église d'Esnandes est moins riche et plus sévère que celle de Beaumont. Elle n'a ni contreforts primitifs, ni transept, ni tours d'angles ; mais en revanche on verra qu'elle est proportionnellement plus forte, comme il convenait a sa position isolée et découverte. Elle est construite en bel appareil moyen (de calcaire jurassique) et moins allongée que celle de Beaumont ; elle se rapproche conséquemment davantage de la forme d'un cube.

La partie inférieure de la façade occidentale, purement romane de transition (ogive naissante), est couronnée d'un cordon en corniche sculptée d'animaux et rinceaux très-variés, mais fort endommagés. C'était un zodiaque en bande, disposition fort rare et que M. Lacurie n'a point observée ailleurs (les autres zodiaques romans du département, a Chermignac et a Aunay, encadrent les portails). Je n'ai pas eu le loisir de chercher a reconnaître les figures d'Esnandes ; mais Massiou, Lesson et M. Lacurie disent qu'on y distingue encore deux signes (Sagittaire et Scorpion). Il subsiste aussi quelque chose de la façade au-dessus du cordon, car on y voit les restes d'une grande arcade romane bouchée ; je crois qu'elle correspond au premier étage de la tour, lequel, dans cette hypothèse, aurait été conservé sans remaniement important lorsqu'on a bâti l'église du XIVe siècle.

On voit bien un contrefort qui empâte l'angle Nord-Ouest de la façade ; mais malgré cette position insolite au XIVe , il se lie trop bien aux fortifications du couronnement pour qu'on puisse attribuer sa construction au XVe, et M. Drouyn a déjà observé, dans l'architecture militaire de la Gironde, quelques contreforts empâtants que d'autres caractères le forcent de rapporter a la fin du XIVe siècle.

 

L'addition de ce contrefort a fait disparaître un des quatre faisceaux de hautes colonnettes, sur lesquels reposait le cordon zodiacal, et qui encadraient le portail et les deux arceaux aveugles dont il est flanqué. Ces derniers n'ont jamais été ouverts, car un stylobate a hauteur de siège en a toujours fermé la gueule, et le nu du mur qui forme leur fond est chargé des mêmes ornements sculpturaux que les intervalles des colonnettes. Ces ornements consistent soit en points creux de forme losangique, soit en une riche imbrication alternative de 4-foils concaves. Il est fort difficile de décrire cette dernière décoration, entièrement nouvelle pour nous tous ; et n'ayant pu en prendre qu'un croquis informe et sans ombres, je ne sais plus maintenant me retrouver au milieu des complications qu'un relief énergique permet a son agencement. On pourrait dire que ce sont des paires d'écailles de poisson, pétales ou valves de coquille de forme arrondie et concave, se touchant par leurs sommets et posées en croix, chaque paire passant symétriquement et alternativement soit dessus soit dessous ses voisines.

Les trois arcs sont ogivaux. Le portail est a trois archivoltes en retrait, ornées de palmettes, de rinceaux et d'une série de grandes anilles ou fers de moulin, sculptées en creux et dont les branches sont arrondies au bout. Les archivoltes reposent sur un seul ordre de six colonnettes. Les bases sont ornées de pattes et de tores multiples et plus ou moins écrasés. Les arcs latéraux n'ont que deux voussures en retrait, et reposent sur deux ordres superposés de quatre colonnettes. Dans la niche de droite, une statue d'évêque en habits pontificaux (chasuble pointue, dalmatique, étole et aube), du XIVe , est posée sur un socle soutenu par le stylobate et n'a plus de tête ; c'est sans doute celle de saint Martin, patron de l'église.

Autour de l'édifice s'étend une plate-forme gazonnée qui servait de cimetière et que limitent des murs modernes et des coupures dans les élévations de terrain qui avoisinent l'église. J'imagine que c'est là ce que Lesson et M. de Quatrefages ont regardé comme des fossés ; mais je ne vois pas comment l'eau aurait pu y arriver en quantité suffisante et s'y maintenir.

Le mur Nord de l'église, plusieurs fois réparé, est complètement aveugle, je suis disposé a croire que, comme à Beaumont, il l'a toujours été. Ses deux principales réparations sont datées sur le monument même, de 1740 et de 1828.

Les ouvertures du flanc Sud se bornent à deux, très-profondement ébrasées, car le mur de ce côté n’a guère moins de huit pieds d’épaisseur (Hassiou). Aussi ces ouvertures manquent totalement de grâce ; elles sont sans aucun ornement et fort élevées au-dessus du sol. La première en partant de l’0uest est une grande fenêtre ogivale, placée entre la moitié et les deux tiers de la longueur de la nef. Un peu plus loin, et destiné à jeter du jour sur les trois autels du chevet, s’ouvre l’oculus que je crois postérieur à la construction de l'édifice, cart il n’est point surmonté d’un moucharaby. Ou doit, selon moi, l’avoir percé lorsque les chances de guerre eurent disparu.

Quatre belles gargouilles, en forme de bêtes féroces , décorent le mur méridional d'où elles chassent les eaux de tout le couronnement militaire de l'édifice, car il n’en existe ni au Nord ni au chevet. Celui-ci est droit et percé de trois grandes fenêtres ogivales, larges, courtes, placées très-haut, profondément ébrasées comme au mur du Sud, et celle du milieu est plus élevée que les autres.

 

Massiou dit que les murs du Nord et de l’Est sont modernes. Lesson et M. l’abbé Lacurie disent que le choeur est du XVe. siècle et que l’abside romane a été supprimée au XVIe. Il m’est impossible, je l’ai déjà dit, de me ranger à cet avis :

  • 1 Parce que les églises-forteresses du XIIIe et du XIVe siècle ont le chevet droit (Beaumont, St-Avit-Sénieur et Molières en Périgord) ;
  • 2 Parce que les fenêtres du chevet d’Esnandes sont placées comme à Beaumont et à Molières ;
  • 3 Parce que les moucharabys et les latrines d’Esnandes sont placés comme ceux de St-Avit-Sénieur et de Beaumont, et évidemment contemporains de l’ensemble du système de défense.

La tour, dont je décrirai les parties inférieures en parlant des fortifications, est placée au-dessus du portail, et sa partie supérieure, percée de quatre fenêtres ogivales, est moderne, postérieure même aux guerres de religion, car les moulures de ces fenêtres sont identiquement répétées sur un cartouche sculpté dans la face méridionale et portant cette inscription : André Regeauld, fabriqueur, 1633.

Il peut paraître singulier de voir faire de l'ogive, et de l'ogive qui rappelle assez bien le XVe siècle, cinq ans seulement avant la naissance de Louis XIV ; mais ce fait n’est pas sans exemple en Saintonge. A Saujon en effet (sur la Seudre, entre Boyau et Rochefort), l'église fut détruite pendant les guerres de religion, puis entièrement réédifiée au XVIIIe siècle, dans les dernières années du règne de ce même prince. Or, le Congrès archéologique de 1844 a vu ses fenêtres : elles sont toutes ogivales (forme du XVIe, a biseau en gorge très-élargie).

La tour d’Esnandes se termine par une attique sans ornements et par une toiture basse à quatre égouts. On y a replacé, au Midi, deux belles gargouilles (panthères accroupies) provenant de sa construction du XIVe siècle.

Intérieur

Nef séparée des bas-côtés par quatre gros piliers de chaque côté, formant six travées, y compris celle du sanctuaire. Celui-ci, peu profond, a son autel plaqué contre le mur du chevet : il en est de même des autels des bas-côtés.

Gros piliers sans chapiteaux ; ils sont relevés de colonnettes saillantes dont chacune est ornée d’une baguette plate.

Fenêtres du Nord complètement murées et marquées seulement par leurs moulures, en ogives, à amortissement formé de triangles curvilignes et à moulures cylindriques ; combinaison de caractères qui indique bien la seconde moitié du XIVe siècle.

Voûtes ogivales a nervures maigres avec filet tranchant, ce qui exclut toute attribution au XVe siècle avancé. Clefs de voûte pendantes, mais peu volumineuses et très-peu ornées.

Quelques tableaux, leurs cadres et les boiseries sont de la fin du XVIe et du XVIIe siècles.

Source : Bulletin monumental 1857.

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 20143
  • item : Eglise Saint-Martin
  • Localisation :
    • Poitou-Charentes
    • Charente-Maritime
    • Esnandes
  • Code INSEE commune : 17153
  • Code postal de la commune : 17137
  • Ordre dans la liste : 1
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : église
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction : 3 différentes époques marquent l'histoire du lieu.
    • 12e siècle
    • 13e siècle
    • 15e siècle
  • Date de protection : 1840 : classé MH
  • Date de versement : 1993/10/27

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : Eglise fortifiée ; 18 04 1914 (J.O.)
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Détails : Eglise : classement par liste de 1840
  • Référence Mérimée : PA00104683

photo : gerardgg

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