Cathédrale Saint-Julien


Sommaire notice :
  1. Origines
  2. L'église Byzantine
  3. L'église Normande
  4. L'église Gothique
  5. L'église de la Renaissance
  6. L'église Moderne

Origines

De récentes découvertes prouveraient que, dès l'âge de pierre, nos provinces de France furent habitées par des hommes qui savaient sculpter un dessin assez correct, et que, suivant l'attestation d'Aristote, les Égyptiens eurent les premiers des lois écrites, des institutions politiques, et tous les arts d'une civilisation très-avancée. Ce philosophe range parmi les merveilles du monde les temples, les monuments de la Sardaigne, bâtis d'après l'ancien art grec, autrement le cyclopéen ou pélasgique ; et quelques motifs de l'ornementation auraient même été reproduits d'âge en âge jusqu'à nous. Salomon avait eu recours aux architectes de Tyr, pour donner à ses édifices un cachet magistral et très-religieux ; tel aurait été le vrai berceau de l'art en Occident. Les Grecs se seraient formés à l'école des Tyriens ; ils auraient ensuite introduit une méthode nouvelle, où l'on remarque une régularité raffinée, et plus de sensualisme. Sous l'influence chrétienne l'art byzantin, mieux en rapport avec les nouvelles idées religieuses, aurait étendu ses conquêtes vers le Nord, et par une marche en sens inverse, le style ogival serait enfin venu lui disputer un empire des mieux mérités.

De récentes découvertes prouveraient également que les Égyptiens eurent les premiers de merveilleuses statues, un art en quelque sorte plus pur à mesure que l'on remonte vers sa source, et qu'il en fut ainsi plus tard chez les Grecs, les Rhodiens en particulier. Leurs statues, disait Pindare, semblent marcher, tant elles sont vivantes. Les Byzantins, au contraire, voulurent unir seulement une naïveté charmante aux formes hiératiques, à l'invariabilité de la pose, cherchant à faire oublier le sensualisme païen. Un assez grand nombre de centres religieux de l'Occident ont conservé les débris de leurs premiers monuments pélasgiques, de leurs temples tant de fois réparés ; et nos cathédrales généralement, dit-on, se sont élevées sur un antique lieu d'adoration. La France méridionale montre des inscriptions phéniciennes pour attester qu'avant les victoires des Phocéens marseillais, les Tyriens avaient fondé des temples dans la Gaule. Strabon en signale plusieurs sans les décrire ; mais, en parlant de celui des Venasiens de l'Asie-Mineure, il dit que trois mille serfs étaient consacrés à son service, et qu'il possédait les terres très-fertiles. Les revenus étaient de quinze talents au profit du pontife, nommé pour la vie, de même que celui de Comana, dont il était le premier suffragant. Lorsque le pontife de Comana sortait la statue de la déesse patronne du temple, il portait un diadème et marchait immédiatement après le roi.

Tels auraient été les pontifes en Gaule et particulièrement Divitiacus d'Autun, qui longtemps eut la primatie de la Celtique ; César atteste au moins qu'ils constituaient le premier ordre dans l'état, jouissaient du plus grand crédit, et tous n'avaient qu'un seul chef, élu pour la vie. Suétone rapporte que César pilla les temples et les autres monuments religieux de la Gaule, remplis des dons les plus riches, et tout nous persuade que ceux des grandes cités : Narbonne, Marseille, Bezançon, Autun, Bourges et tant d'autres eurent dans leur dépendance de grandes possessions et des serfs nombreux pour cultiver celles-ci. Les épîtres des premiers papes déclarent d'ailleurs qu'en Occident les évêques et les archevêques remplacèrent les flamines et les archi-flamines, mais avec une autorité plus grande. Lorsque Constantin prescrivit de rendre aux communes chrétiennes les édifices religieux qu'elles possédaient avant les persécutions, il prescrivit de fermer les temples des païens, et les trésors de leurs cryptes auraient servi surtout à bâtir Conslantinople. Plus tard, suivant Procope, ces temples furent eux-mêmes consacrés au culte religieux avec leurs biens, et l'on voit qu'en Gaule même ils étaient parfois splendides. Ainsi, saint Grégoire de Tours parle du temple de Mercure (Vasa), détruit en Auvergne vers l'année 263 : « II était d'une construction superbe et très-solide ; des murailles doubles, pierres de grand appareil à l'extérieur, de petit appareil à l'intérieur ; trente pieds d'épaisseur, pavage de marbre, toit en plomb ; statue colossale de Mercure et chef-d'oeuvre d'un artiste grec. »

Aristote avoue que les Égyptiens furent les premiers à tracer les constitutions d'un État, d'une cité. Celle-ci doit posséder, dit-il, son territoire propre, aménagé de manière à répondre aux différents besoins de ses habitants, et la cité chef-lieu doit être fortifiée contre toute invasion des ennemis. Les habitants sont classés par communes ou corporations : agriculteurs, artisans, militaires, propriétaires, flamines ou prêtres et juges. Les collèges des prêtres naturellement doivent être placés auprès des temples ; le forum, où se tiennent les magistrats, doit être soigneusement écarté de celui des marchands, et des lieux où s'exercent les arts mécaniques. Dans les campagnes même de différents côtés on rencontre les temples des dieux, les monuments des héros, et ceux qui gardent les postes militaires, ne peuvent manquer d'y trouver de grandes salles pour leurs festins. D'après César, les habitants de la Sarthe nous apparaîtraient ainsi, réunis en familles, confréries ou collèges, conformément aux moeurs helléniques, que rappelle Aristote. Leur cité possède un territoire assez vaste, assez peuplé pour fournir un contingent de cinq mille guerriers, même après la guerre la plus désastreuse. Déterminé par des bornes naturelles, des limites précises, ce territoire peut produire toutes les choses nécessaires à la vie ; la Sarthe, l'Huisne, le Loir et leurs nombreux affluents y forment un merveilleux réseau d'irrigation.

La cité proprement dite répond parfaitement au goût des ingénieurs anciens, aux exigences dont parle Aristote : un site sain non moins qu'agréable, un promontoire défendu par le cours de la Sarthe et des eaux stagnantes, non loin du confluent de l'Huisne. A l'Orient, un passage commode pour mettre les troupes en campagne et prendre position sur les collines ; vers l'Occident, accès presque impossible pour les ennemis ; à la base du promontoire de sable ou sur le versant, sources d'eau vive assez nombreuses, etc. Les flancs de ce promontoire, suivant l'usage le plus ancien, paraissent avoir été munis d'abord d'un simple mur de soutènement en pierres sèches et non taillées, l'enceinte supérieure, dont le plateau domine d'environ trente mètres la rivière, n'aurait eu que deux issues principales : au Nord Est, la Porte dorée ou du prétoire ; au Sud-Ouest, la Porte dêcumane ou des prisons. Le forum des magistrats occupe la partie la plus haute et la plus reculée dans l'enceinte, tandis que les halles au forum des marchands dominent un plateau non moins remarquable, en dehors de l'autre extrémité des remparts. Dans le langage des Ioniens, l'assemblée du peuple ou même le palais de l'administration central ; portent le nom d'Eglise ; ordinairement, les Grecs et les Latins appellent basilique le prétoire, où le roi faisait rendre la justice, et siégeait entouré de ses conseillers.

Aspet de l'Eglise de Saint Jullien du Mans le 8 janvier 1624 et Achevée le 4 julliet 1637, dessin de Martellange Étienne (1569-1641)

Aspect de l'Eglise de Saint Jullien du Mans le 8 janvier 1624 et Achevée le 4 julliet 1637, dessin de Martellange Étienne (1569-1641)

César parle du sénat des Aulerces ; s'il ne nomme pas le roi du Mans à son époque, il nomme celui de plusieurs autres cités, le duc des Aulerces, le duc d'Angers, le préfet de Reims, etc. Il désigne le premier magistrat sous le titre de prince de la cité ; Strabon ajoute que, chaque année, la multitude choisit au suffrage le prince et le duc de la milice. De très-bonne heure, la basilique du Mans, siège des grandes assemblées, dut offrir des proportions assez vastes, et les arènes elles-mêmes, accompagnement ordinaire des remparts, suffisaient à placer plus de six mille personnes, dit-on. La forme de pareilles basiliques est bien connue ; celle de Constantin à Trêves, par exemple, est réparée pour servir désormais au culte religieux celle du même empereur, à Chartres, se montre sous un revêtement gothique ; beaucoup d'autres restent en partie debout. Par quelle étrange fatalité celle du Mans aurait-elle entièrement disparu, lorsque ses remparts de clôture montrent des portions d'une conservation parfaite et les pierres d'un appareil semblable ? Ces petits cubes de grès-roussart forment non-seulement l'appareil des murs de la cité, mais ils ont été jetés à l'intérieur parmi les restes d'autres constructions, et l'appareil de la nef de l'église ne diffère presque point à nos yeux de celui du rempart voisin, où les rangs de briques et les dessins en damier manquent tout vis-à-vis. L'oppide de Jublains, construit dans le même genre, paraît avoir été saccagé, comme Tours, vers le temps de la Bagaudie (286), et de toute manière, avant cette époque, notre prétoire devait être en rapport avec la porte prétorienne, située auprès. Notre basilique a vingt-cinq mètres de façade ; en poursuivant, à la même distance on rencontre cette porte, dont le seuil est de trois mètres plus bas que celui de l'église. Le premier repose sur une couche naturelle d'argile, qui devint la Place du Château ; le second repose maintenant sur trois mètres de décombres.

Près de la porte antique, si le mur de la cité n'a qu'un rang de briques à la base intérieure et ressemble à celui de l'église, extérieurement il conserve son ornementation byzantine, un enduit très-fin, peint en rouge et qui peut-être aurait reçu des dorures. De ses bandes de briques dorées la porte d'abord et plus tard la grosse tour du Mans auraient gardé le surnom d'Orbandelle, et la basilique, avec un appareil simple, au contraire en dehors, au dedans aurait eu, comme on le voit à Trêves, ses enduits peints en rouge et ses dorures. Cet édifice, selon Vitruve, doit égaler en longueur deux ou trois fois la largeur, à moins que l'espace ne manque ; au Mans, cette largeur de vingt-cinq mètres pouvait être répétée jusqu'à trois fois en longueur, et, même au delà devait être le palais du gouverneur, celui des évêques avant saint Aldrik. Loin de s'appuyer contre les murs de l'ancienne basilique, comme on a pu l'écrire, les remparts de la cité s'en éloignent de plus de vingt mètres à l'entour, et dans cet espace on rencontre quelques substructions d'un édifice dont les débris servirent évidemment à la construction des remparts. La nef principale de la basilique se terminait ordinairement par une abside, réservée au tribunal et séparée par les chancels ; une double rangée de colonnes régnait entre celle nef et celles des bas-côtés, couvertes en appentis avec galeries. Les voûtes étaient de bois ; on les ornait de lambris dorés, et l'évêque Hoël lui-même enluminait encore les lambris de l'église que nous voyons en partie. Au reste, les anciens ne manquaient point de colorer leur architecture à l'intérieur, à l'extérieur, et même les marbres les mieux polis. La basilique de la cité devait avoir sa crypte, ses salles souterraines, où l'on conservait le trésor public, et les lois romaines continuèrent de prescrire l'érection de la grosse tour, nécessaire pour commander aux remparts, garder les provisions de guerre et les dépôts des citoyens. A Beauvais et dans beaucoup d'autres villes, cette tour servit au clocher de la cathédrale jusqu'à nos jours ; celle du Mans, à peine reconnaissable, aurait ses souterrains et descendrait sa base profondément.

Enfin, depuis la construction de nos remparts, la basilique ne dut point, à notre avis, avoir un autre emplacement, un autre appareil, un autre plan, une autre forme que la nef, exhaussée ou réparée plusieurs fois ; ce qu'attesteraient d'ailleurs et notre histoire et la tradition. L'an 313, Constantin ordonnait de se conformer aux décrets antérieurs et de rendre, nous le répétons, aux communautés des chrétiens les édifices religieux qu'elles possédaient anciennement. Assurément alors, Agritius était évêque de Trêves, et l'existence de ses trois prédécesseurs est certaine ; si la liste des autres est interrompue pendant l'ère des persécutions, on s'en étonne assez peu : quinze de ces évêques auraient été martyrisés dans le cours de trente années seulement. La plupart des diocèses ne voient la liste de succession recommencer que vers l'an 340, au Mans, 345, après une interruption comme à Trêves ; et sous Constantin même les métropoles seules en quelque sorte auraient eu des évêques régionnaires. D'un autre côté, l'on avoue que nos premières légendes des saints de la Gaule existaient avant Clovis ; nous avons publié celle du Romain Sergius, qui nous atteste que saint Julien évangélisa le Maine, sous les règnes de Domitien (Dèce), Nerva et Trajan, empereur à Cologne, en 98, un siècle pour ainsi dire avant la première persécution dans les Gaules. Sergius ajoute que, voyant le nombre des chrétiens augmenter chaque jour, saint Julien put obtenir, pour sa cathédrale, la basilique, où le Prince de la cité siégeait avec ses consuls ordinairement, et que l'apôtre du Maine y consacra l'autel en l'honneur de Notre-Dame et de saint Pierre. Le jour de la dédicace solennelle, la dot de l'église matrice fut constituée en donations à titre du service divin : en or, argent, riches étoffes, cens seigneuriaux, troupeaux de bétail et propriétés rurales pour servir aux frais du culte. Sergius donne quelques détails précis, que répétèrent une suite d'actes authentiques et la possession de temps immémorial se prouvait encore au dernier siècle. Le code des Romains, enfin, permettait aux magistrats de faire servir ainsi la basilique aux assemblées soit religieuses, soit politiques, et cette double destination aurait préservé de ruine notre cathédrale pendant les persécutions ; c'est ainsi qu'elle aurait été rendue au culte même avant l'année 313. Pour résumer, si l'on nous demande à quel âge remonte la fondation de notre cathédrale, nous répondons : elle remonte à saint Julien comme temple chrétien, et, comme préfecture, palais de justice, basilique de l'administration centrale du Maine, elle doit remonter à la fondation même de la cité, dont les remparts ont été bâtis pour protéger cet édifice. La nef actuelle ne peut manquer d'offrir les restes antiques d'âges et de styles assez différents.

L'Eglise Saintt Julien, Cathédrale de la Ville du Mans, vue du côté du grand portail 1695. dessin de Louis Boudan.

L'Eglise Saintt Julien, Cathédrale de la Ville du Mans, vue du côté du grand portail 1695. dessin de Louis Boudan.

L'église Byzantine

Parmi les substructions antiques du Mans, nous rencontrons des murs en larges briques, liées par une couche de mortier d'une semblable épaisseur ; le sol environnant recèle d'assez nombreuses monnaies des Antonins. Nous rencontrons des murs, où le petit appareil d'ornement, lié par un ciment de briques, revêt un noyau de pierres du pays, de débris des constructions antérieures dans un mortier ordinaire, et c'est ainsi que l'art des Byzantins aurait fait son apparition parmi nous. Les Thermes de Paris, qu'habita Julien, et surtout la basilique de Constantin à Chartres, montreraient le mode de construction en usage dès le VIe siècle ou même auparavant. Aux voussures de décharge des portes et des fenêtres, l'appareil moyen de calcaire alterne parfois avec une égale épaisseur de briques ; tandis qu'au milieu du XIe siècle, le roussart succède aux rangs de briques, et le petit appareil s'efface devant l'appareil moyen, de calcaire. Les Grecs, on l'a dit, sacrifièrent beaucoup à la forme, au sentiment délicat ; les Romains, à la composition du plan, à la raison, au besoin, à là solidité. L'art byzantin sacrifia trop souvent la forme, la solidité pour les ornements rehaussés d'or et de peintures éclatantes, pour le symbolisme. Son imagerie, prise dans les catacombes en grande partie, ne paraît pas changer avant le XIe siècle ; au Mans, alors, nos sculpteurs se seraient montrés moins habiles que leurs devanciers, tandis que les architectes furent au moins plus hardis. Après avoir transformé la basilique du gouverneur en cathédrale, saint Julien fonda la basse-oeuvre des Saints-Apôtres dans le cimetière chrétien ; on vient d'y rencontrer beaucoup de cendre, de sarcophages en calcaire, d'ossements humains. Les substructions de la petite basilique ont montré deux murailles successives ; la première, en larges briques avec mortier d'épaisseur égale ; la dernière, en petit appareil de roussart, sans briques. Elles ont prouvé l'existence d'un plancher avec calorifère ; d'un pavage en ciment élevé plus tard sur les débris de la construction ; car elle fut exhaussée, restaurée par saint Innocens et placée désormais sous l'invocation de saint Victeur.

Procope atteste que les premières églises de Constantinople eurent la forme d'une croix (latine), et lorsqu'il parle de celle des Saints-Apôtres, déclare que le sanctuaire occupe presque le milieu de l'espace entre les bras. Il ajoute que le toit s'y distingue par une plus grande élévation, et recouvre une coupole, percée de fenêtres ; suspendue en l'air, pour ainsi-dire, celle-ci paraît peu solide, quoi qu'elle le soit parfaitement en réalité. L'église de sainte Sophie, conservée mieux qu'on ne le croirait, présentait de même la forme d'une croix latine, et l'on sait avec quel art somptueux l'intérieur fut décoré. Dans la Gaule, de bonne heure, les édifices religieux ne furent pas moins splendides : nous avons parlé du temple de Vasa (BAZA des Grecs, Verbum) ; l'église qui lui succéda pour ainsi-dire à Clermont avait au Ve siècle : 150 pieds de longueur, suivant saint Grégoire de Tours ; 60 de largeur et 50 de hauteur sous un plancher lambrissé. Au devant, portique avec baptistère en rotonde ; sur les côtés, deux ailes d'une élégante construction, afin de donner entièrement la forme d'une croix, ajoute l'historien. On y voyait 42 fenêtres, 70 colonnes et 8 portes ; l'autel était revêtu de placages en marbres variés, sculptés avec un rare élégance. Ce témoin oculaire décrit plusieurs autres basiliques du même temps, et l'on y prodiguait les peintures, les vitraux et toutes les merveilles de l'art byzantin. En voyant ce que furent alors les cathédrales de Bourges, de Tours, Nantes, etc., l'on peut croire que celle du Mans ne tarda point à recevoir une décoration du même goût ! Lorsque saint Martin et ses disciples sortaient de l'abbaye de Ligugé, le paganisme, souvent encore, obtenait la même tolérance que le christianisme, et tout prouverait que, dans notre diocèse, par exemple, le second apostolat daterait de cette époque seulement. De bonne heure les architectes de nos monuments religieux seraient sortis de l'école de Marmoutiers.

Saint Martin nous donna pour évêque son filleul, son disciple favori ; le pressa de restaurer notre basilique romaine conformément au modèles byzantins. Il avait apporté des reliques insignes de saint Gervais et saint Protais ; il en céda quelque partie à notre évêque, et saint Videur en fit une translation solennelle dans l'oeuvre qu'il agrandissait et restaurait au-delà de la nef actuelle. Voyant approcher la fin de sa vie, ce même évêque laissa les travaux inachevés ; son disciple, saint Innocens ne les termina qu'après le règne de Clovis, et dès-lors on distingua, pour ainsi-dire, deux édifices dans le même. D'après le récit des actes contemporains, saint Innocens agrandit la partie orientale, l'abside, à partir de l'arc (triomphal), que l'on remarque au milieu de la croix ; il exhaussa la partie occidentale, la nef avec ses latéraux, que saint Julien consacra jadis, et dans cette première, qui s'étend à l'orient au-delà de l'arcade du crucifix, il plaça le maître-autel, y déposa les reliques de saint Gervais et saint Protais. Du côté septentrional, à la gauche de l'église et de l'arcade, dans un bras ou transept, saint Innocens rétablit soigneusement et réconcilia l'autel de la Sainte-Vierge, fondé, consacré par saint Julien. Du côté méridional, dans un transept fondé, construit par ses propres soins, à la droite Je l'arcade, il rétablit et réconcilia l'autel de saint Pierre. A la vue des miracles nombreux obtenus de saint Gervais et saint Protais, saint Innocens statua que le vocable choisi par saint Julien, celui de Notre-Dame et saint Pierre, ne serait point changé ; que les deux resteraient unis désormais et vénérés au même titre ; que le nom, le culte de la Sainte-Vierge seraient dans cette cathédrale l'objet d'une dévotion spéciale (Analecta, III.). Ainsi, la basilique gallo-romaine était debout au VIe siècle encore, avec agrandissement de l'abside terminale ; avec adjonction d'un transept, qui compléta la forme d'une croix latine. En tête de la nef on rencontrait un arc de triomphe, l'arcade du crucifix et les premiers jubés, si l'on peut dire. L'autel de la Sainte-Vierge placé presque au milieu de l'espace entre les bras fut transféré dans le transept septentrional, près duquel il demeurerait jusqu'à ce jour ; tandis que l'autel de saint Pierre fut transféré dans le transept nouveau. Pour ouvrir les latéraux du choeur actuel, plus tard, on réunit cet autel à celui de la Sainte-Trinité.

Dessin à la plume et encre de Chine, Cathédrale Saint-Julien XIXe siècle.

Dessin à la plume et encre de Chine, Cathédrale Saint-Julien XIXe siècle.

Lorsqu'on examine les plans de l'ancienne basilique du Vatican de Rome, ou même ce qui nous reste de l'église de Saint-Bertrand, à la Couture, il est facile, au reste, d'imaginer ce que devait être notre cathédrale vers le même temps. Lorsque notre histoire locale affirme que l'apôtre du Maine obtint la basilique avec ses accessoires, et pour son palais celui du préfet ou gouverneur, on ne voit pas qu'il en fut autrement dans nos premières cités épiscopales. Saint Bertrand montre que l'oratoire de ce palais était la tour de Saint-Michel, dont on a démoli dernièrement la base ; que sa maison du cloître était occupée déjà par des religieux chargés de la matricule ou fabrique, du soin des pauvres etc. (matricula quam inibi erexi). Cet évêque demande que les celliers de la cave (hôtel Juteau), tout-à-côté, servent continuellement à recueillir les dîmes, les provisions destinées aux pauvres. Il déclare que, l'an 600, le four du Chapitre fut construit en face, sur la place et près de la trésorerie ou maison de l'argentier ; ce qui n'aurait pas été changé jusqu'au dernier siècle. Saint Aldrik, de son côté, déclare qu'il cède le palais de ses prédécesseurs, au chapitre pour le réfectoire et le dortoir ; on verrait en ce lieu maintenant une partie du coeur agrandi. L'évêque Avesgaud ajoute qu'il donna le second palais pour l'infirmerie ou grabatoire, au-devant de la cathédrale ; l'évêque Gervais dit, enfin, qu'il fit présent du troisième, à l'angle des remparts. Saint Julien aurait donc, obtenu des magistrats la partie supérieure de la cité, ce que depuis on aurait appelé la couture, ou clôture de la cathédrale, jusqu'au bord de la Sarthe. Avant la Renaissance les villes fortes réunissaient ainsi les enceintes dans les enceintes, et de toutes parts on rencontrait des clôtures particulières et des portes de rues ; ce qui le plus souvent entraînait un grande responsabilité. La cathédrale avait son fief dominant, une sorte de petit royaume suivant l'expression de Chilpérik ; un sénat pour l'administration du spirituel et du temporel, et nos documents du XIe siècle, en parlant du chapitre, disent : Le doyen de la cité, le trésorier de la cité, simplement ; lorsque précédemment l'évêque avait tout le rang du prince de la cité, sous les Romains.

Il faisait rendre la justice par un consul ou comte, pris parmi ses vassaux ; faisait battre monnaie au nom de la cathédrale seule d'abord ; au nom de la cathédrale et du comte-propriétaire, ensuite. L'apôtre du Maine aurait obtenu l'enceinte du château de la Vieille-Rome, l'acropole antique, et, si nous ne nous abusons, on y rencontrerait jusqu'à ce jour les traces du plan usité chez les anciens, quelques substructions même : des pierres de grand appareil en calcaire dur (de Bernay) ; des pierres de petit appareil, en roussart ; un mortier ordinaire, des briques plus épaisses qu'au rempart, un noyau de pierres du pays ; des matériaux qui servirent évidemment plus tard dans la construction de nos murs gallo-romains. L'an 800, Charlemagne vint au Mans ; il fut touché de voir le triste état de notre basilique, restaurée au VIe siècle, et lui fit rendre une partie de ses biens ; l'évêque carlovingien ne tarda pas à la réparer : la fit couvrir en plomb ; la décora non-seulement au dedans, mais au dehors. L'an 832, saint Aldrick, suivant le récit de ses disciples (Miscellanea, III), ne trouva nullement la cathédrale en ruines, l'ancienne basilique tombant de vétusté ; mais, il établissait son chapitre en collège régulier, et trouvait trop peu spacieuse encore l'abside agrandie déjà par saint Innocens. « Il jeta donc les fondements d'une abside nouvelle ; la fit décorer parfaitement », et l'on se persuade qu'elle eût dès-lors un pourtour avec galeries supérieures (deambulatoria sursum in circuitu) ; cinq chapelles absidales, conformément au plan que l'on remarque à la Couture. Les disciples de cet évêque fournissent d'ailleurs des dates précises, des détails assez complets, sans dire que la nef antique fut agrandie ou reconstruite ; ils déclareraient, au contraire, que saint Aldrik se contenta de consacrer une, partie de l'ancien édifice, parce que le jour de la dédicace n'était plus connu, pour en célébrer l'anniversaire. Il fit mettre au-dessus du maître-autel un ciborium d'or et d'argent (plaqués ?) avec girandoles également d'or et d'argent ; ajouta des autels assez nombreux, et peut-être sur le plan que l'on remarquait à Saint-Gai, par exemple. Il fit mettre dans les clochers douze cloches, d'un poids assez considérable, si l'on en juge d'après les expressions de l'historien. Il avait commencé le paradis, le portique sans doute, où l'on représenta le ciel, le dernier jugement ; lorsqu'en 840 les travaux furent interrompus pendant les guerres entre les fils de Louis-le-Pieux, ou même détruits en partie.

Peu d'années après les Saxo-Bretons, les premiers Normands, s'avancèrent des rives de la Loire, et notre cathédrale eut à souffrir du pillage et de l'incendie ; le pape Nicolas pressa l'évêque Robert de réparer les désastres, et de consacrer de nouveau son église (866). Elle eut à souffrir beaucoup encore pendant deux siècles, que dura la guerre contre les Normands ; enfin Guillaume-le-Conquérant parvint à s'emparer du Maine ; il y fit élever de solides forteresses, et notre architecture se modifia notablement dès cette époque. On vit ainsi le petit appareil de roussart faire place à notre maçonnerie commune, ou trop rarement à l'appareil moyen ; nos sculpteurs se montrèrent trop souvent inférieurs même à leurs devanciers, et l'art byzantin devenait plus que jamais barbare. Les constructeurs au moins se montrèrent plus hardis ; les incendies étaient fréquents, ils crurent devoir remplacer les planchers de bois par des voûtes, dans les bas côtés d'abord ; ce qui nécessita des murs plus épais, des contreforts plus solides, et ne produisit que ce que nous voyons encore. L'évêque Vulgrin était, dit-on, un bon architecte, sorti des écoles de Marmoutiers et de Vendôme ; après avoir transformé la façade et les bas-côtés, il aurait tenté de voûter la grande nef ; mais, ni les fondations ni les matériaux n'étaient assez solides, et pendant une nuit les travaux s'écroulèrent avec un épouvantable fracas. Néanmoins, l'arc de triomphe, l'arcade du crucifix fut ébranlée tellement peu qu'il ne tomba rien du toit. L'évêque Arnault se vit obligé plus tard de reprendre ces travaux par les fondations, et d'employer une pierre plus solide ; la grande nef aurait eu dès-lors deux rangs de colonnes. unies par les arcades en plein-ceintre, que nous voyons ; des fenêtres de moyenne grandeur, au-dessus, et la hauteur marquée par une maçonnerie maillée, à la façade. Hoël, ensuite, acheva les ailes et les tours terminales ; décora l'intérieur, en partie avec peintures aux couleurs variées et d'une harmonie agréable, en partie avec badigeon de chaux (calce dealbavit). Le V. Hildebert, enfin, réussit à voûter la principale nef, à l'aide d'une transformation nouvelle.

Cet évêque illustre était né près de Vendôme ; il en fit venir le moine Jean, architecte ou maître-maçon (caementarius) qu'il retint très-longtemps malgré les instances de Geoffroi, son abbé. Jean de Vendôme aurait fait preuve d'un talent incontestable dans les constructions qui nous restent, et celles qui nous manquent montreraient, à notre avis, le même modèle dans l'église Saint-Nicolas de Blois. La grande préoccupation des architectes, alors, était d'élever les larges voûtes ; Le V. Hildebert aurait alterné les colonnes de notre nef avec des piliers très-solides, et repris en sous-oeuvre, au moyen d'arcades ogivales, les arcades en plein-cintre ; afin de régulariser le nouveau plan. Des arcatures de premier étage furent placées au-devant des fenêtres de moyenne grandeur ; d'autres fenêtres, géminées, se placèrent au-dessus, et le sommet de la façade fut encore exhaussé. Deux énormes et disgracieux contreforts donnèrent à la base une solidité suffisante ; on eut recours aux arcs-boutants, et depuis plus de sept siècles notre grande voûte conserverait une hardiesse, une solidité dignes de remarque. Le V. Hildebert fut la lumière de son époque ; s'il cultiva les sciences avec un grand succès, on voit qu'il fut loin de négliger les arts, et sous son inspiration le maître de l'oeuvre aurait fait faire un grand pas à l'architecture et à la sculpture dans notre pays. Les bases de ses colonnades sont d'un bon goût ; ses chapiteaux montrent une ampleur, une variété merveilleuses. Il prodigue les festons, les dents de scie aux bordures ; mêle heureusement l'arc ogival et le plein-cintre, et marie la gravité de l'art romain aux riches conceptions du byzantin nouveau. Le V. Hildebert prouve dans ses ouvrages qu'il s'appliquait à la théologie mystique, à l'étude du symbolisme religieux, et dans les sermons de la Dédicace, en face de ce qu'il venait de construire, cet évêque donne les explications reçues jusqu'alors. Les deux murs de l'église représentent les Juifs et les Gentils, appelés à composer la société chrétienne ; les fondements représentent les Apôtres, et les colonnes figurent les pasteurs. Les cloches rappelleraient l'office des prédicateurs ; l'une des portes de notre nef aurait été particulièrement celle du baptême, de la foi, qui donne l'entrée dans l'église spirituelle, et les autres, près de la Pénitencerie, celles de la pénitence. A la première, on verrait sur un chapiteau le baptême de Notre-Seigneur, et sous le portique seraient figurés les Livres Saints, qui conduisent à la foi ; près des autres, des chapiteaux montreraient Daniel au milieu des lions ; des oiseaux, qui chassent un hibou ; l'homme qui soutient un trop lourd fardeau. Quoiqu'il en soit, notre architecture religieuse aux XIIe siècle devint symbolique plus que jamais, et les formes ou les décorations ne cessèrent de s'inspirer des modèles byzantins. Il y eut même un retour assez prononcé vers l'art grec, et plusieurs motifs sous notre portique furent empruntés, comme à Chartres, aux meilleurs modèles chez les anciens.

 

L'église Normande

étiquettes chromolithographiques éditées par différents producteurs de fil, collectionnées par des particuliers et regroupées par thèmes.A l'angle occidental de notre ancienne nef, se dresse une haute pierre du grès blanc, mamelonné, peu rare auprès du Mans et sans doute autrefois sur le plateau de la cité. Telle fut, dit-on, la borne d'où l'on serait parti lorsqu'on arpenta la banlieue ; nos celtomanes, jusqu'à ce jour, prétendent y reconnaître un peulvan druidique. Au loin, volontiers on en ferait quelque chose de curieux, et très-souvent le voyageur s'arrête pour interroger notre sphinx beaucoup trop muet. Le vulgaire répète que personne n'a vu Rouen, s'il n'a remarqué le beau berger du Gros-Horloge ; de même, personne n'a vu notre ville, s'il n'a touché du doigt notre Mans, comme on l'appelle. Serait-ce une fin de fief du Chapitre, correspondant à la pierre de Tucé, sur la limite opposée ; la glèbe où le tenancier avait à comparaître, au jour des assises ? Les armoiries du Chapitre sont arborées sous l'écusson de France, un peu plus loin. Serait-ce, comme à Rouen, le pilier de pierre, le pilori de la Pénitencerie, tribunal placé vis-à-vis et qui ne manquait, avant la Réforme, ni de prisons, ni de pilori ? Serait-ce la pierre du Conseil, où dès les temps les plus anciens le Sénat dut se rassembler ? La primitive cathédrale du Velay garderait même à l'intérieur un peulvan de ce genre. Enfin, serait-ce une pierre de Vénus, comme à Paphos ? Au sommet, le Christianisme se serait contenté d'élever une croix, dont il ne resterait qu'un peu de fer. La place voisine se nommait, il y a moins de deux siècles, la place au lait, et l'on y trouvait la pierre au lait, près du portique de la cathédrale, de même qu'auprès de Saint-Jacques, à Paris, dès le XIIIe siècle. Nos documents de cette époque assurent que telles furent plusieurs pierres pour étal ; mais nos chevaliers des druides en ont voulu faire des dolmens. Quoi qu'il en soit, le peulvan prétendu marquerait l'emplacement d'une tour d'angle, démolie depuis trois cents ans pour élargir le passage, et nous savons qu'auparavant on se plaignait de ce qu'on avait bâti quelques boutiques tout à côté.

Cette tourelle antique, dont une partie resterait à l'intérieur de la nef, aurait été toute semblable à celle, de l'angle septentrional, et que la Renaissance a couronnée d'une pyramide. Tel fut peut-être un des clochers que signalent les disciples de saint Aldrik. L'escalier serait moins ancien, et les portes extérieures auraient été murées désormais. La façade des basiliques, dit-on, n'eut longtemps presque aucune décoration au dehors ; si l'on commençait le paradis de notre cathédrale avant l'année 840, cette décoration n'aurait encore consisté qu'en moulages de terre cuite. Celle de la façade que nous voyons serait postérieure à l'année 1060, et nous paraît évidemment rajustée sur un noyau de maçonnerie beaucoup plus ancien. Le niveau du pavage étant relevé de plusieurs mètres, la façade entière dut changer d'aspect ; le sommet fut exhaussé, suivant le goût de cette époque, avec appareil moyen de calcaire et de roussart alternés en damier. La fenêtre principale ne pouvait manquer de s'agrandir, et sa forme actuelle, son encadrement, son état de conservation sont assez dignes de remarque. On en peut dire autant des voussures de la porte, mais celle-ci n'est point encadrée de même ; l'appareil est de calcaire seulement, et les moulures des chapiteaux ou des bases aux deux pilastres sont par trop marquées au cachet du XIe siècle. Nos statuaires alors montrèrent une inhabileté surprenante : au-dessus de la porte on voit un médaillon avec bordure perlée, le buste d'un évêque bénissant, et la colombe de l'Esprit-Saint indiquent assez l'image de saint Julien. Plus loin, on aperçoit d'ailleurs le sagittaire qui décoche ses traits sur le dragon, de l'autre côté ; plus bas, on a rajusté deux lions, symboles de la vigilance des gardiens du temple et de la juridiction supérieure.

L'ornementation proprement dite : fleurons, têtes de diamant, entrelacs, billettes, frètes, zigzags, etc., prouve au moins un assez bon goût, et les petites portes de notre nef méritent une attention particulière. On y distingue mieux une partie de la construction antique, les bases du romain dégénéré, les restaurations et les ornements du XIe siècle. Les fenêtres, de moyenne grandeur, répondraient à celles que l'évêque Hoël décora de vitraux, en 1093 ; les deux gros contre-forts, d'un effet disgracieux, furent ajoutés, et le sommet de la façade fut exhaussé de nouveau lorsqu'on voûta la grande nef, vers l'année 1120 ; au commencement du XVIe siècle, on fit quelques réparations, et devant la grande fenêtre on mit une galerie, que l'on a supprimée sous nos yeux ; enfin, le parvis actuel est moderne. Après la conquête de Guillaume-le-Bâtard, de grandes restaurations furent entreprises dans nos édifices religieux et sur les mêmes plans ; ce qui manque ici comme objet de comparaison peut se retrouver là. Les bas-côtés, à la Couture, ont eu leurs arcatures de rez-de-chaussée ajoutées évidemment à l'intérieur d'une muraille beaucoup plus ancienne ; ils ont eu leurs fenêtres dans un style bien caractérisé. Les arcatures, au Pré, sont de plusieurs styles différents, mais les arcades et les ouvertures de premier étage sont conservées. A la cathédrale, les murs de la nef appartiennent à la construction primitive extérieurement, tandis que les arcatures et l'ornementation des bas-côtés sont postérieures à l'an 1060 ; les arcades et les ouvertures de premier étage, cachées par les arcatures nouvelles, sont postérieures à l'an 1070. Les sculpteurs, nous le répétons, se montrèrent inférieurs à leurs devanciers, et respectèrent une partie de leur travail : au choeur de la Couture, leurs lions, leurs moulures, en général, diffèrent beaucoup de ce que l'oeuvre primitive laisse à l'entour. Dans les bas-côtés de la Cathédrale, les lions et les moulures, en général, n'annoncent pas une restauration meilleure ; s'ils ont prodigué leurs lions difformes, on en devait être peu surpris, au reste, sous la domination des Plantagenets. Après avoir repris les travaux de Vulgrin, l'évêque Arnauld fit élever un nouveau toit sur le chancel, et qui surpassait de beaucoup les autres ; la coupole ou tour centrale n'existe plus, mais celle de la Couture demeure comme un modèle remarquable.

Il posa de solides fondations pour les ailes ou croisées, avec tours terminales : ce que nous en connaissons n'offrirait qu'une muraille très-ordinaire.

L'évêque Hoël acheva promptement ensuite les ailes, les tours terminales, le pourtour du choeur, les toits et le pavage du chancel ; orna les fenêtres de vitraux d'un prix exorbitant, les colonnes et les lambris de peintures variées et d'une agréable harmonie ; il fit blanchir à la chaux les parois tout autour ; veilla soigneusement à ce que rien ne choquât la vue, et la translation des saintes reliques eut lieu le 16 des calendes de novembre 1093 (Analecta, III). A l'extérieur du transept méridional, on retrouverait quelques restes des travaux de cet évêque, et l'emploi du roussart n'aurait point encore cessé. La tour terminale du transept opposé laisserait au moins des substructions ; on s'en était servi pour bâtir le château tout à côté. Guillaume d'Angleterre exigeait qu'on la démolit ; le V. Hildebert, dans ses lettres, lui répond avec raison : « Alors, chargez-vous du travail, et faites venir vos sculpteurs plus habiles que les nôtres. » Cette tour aurait enfermé la chapelle de Saint-Sauveur, placée sur le portique, qui jusqu'à la fin décora l'entrée de l'évêché. L'une des portes latérales ouvrait dans l'église, l'autre dans la vieille salle du chapitre, et depuis le V. Hildebert, on voit l'official publier là ses sentences. Anciennement peut-être on y rencontrait le baptistère, que l'on dédiait à saint Jean, et que l'on séparait ainsi de la cathédrale. Afin de terminer le transept actuel, l'évêque Adam démolit une partie de ce portique (Livre rouge, 1424), et désormais les fonts baptismaux se trouvèrent rapprochés du chancel de l'église ; on se proposait en même temps de rétablir la Sainte-Chapelle, et le Cérémonial nous apprend qu'aux jours de fête, le célébrant y montait pour encenser les saintes reliques. L'édifice de Saint-Sauveur était de fondation antique, dit l'évêque Gervais, qui le fit restaurer vers l'an 1044 ; on y distingue, au reste, ses travaux, où le roussart et le calcaire sont alternés, où les tailloirs de ses arcatures se marient à peine avec les anciens, etc.

Les enduits peints prouveraient que la maçonnerie du XIe siècle ne manquait point d'un pareil revêtement à l'intérieur ; les deux grandes demi-colonnes avec des chapiteaux, sculptés mieux qu'au portique même, indiqueraient une construction assez grandiose. Telle aurait été la chapelle du milieu, dont nos documents parlent au moyen-âge ; un dernier souvenir de celle que saint Aldrik dédiait à Saint-Sauveur, à tous les saints, dans le milieu de son cloître ; un dernier souvenir, enfin, de la tour élevée par l'évêque Hoël : l'autre, à l'extrémité méridionale, aurait disparu. Les Actes du V. Hildebert déclarent qu'il construisit une grosse tour ; celle que nous voyons montre deux étages seulement, marqués à son cachet. La porte actuelle nous fait admirer encore sa solide structure, ses colonnettes sur le dos des lions, ses chapiteaux avec oiseaux chimériques, ses festons, ses violettes. Le bas-relief, particulièrement, où Samson briserait les mâchoires d'un lion léopardé, prouverait qu'en peu d'années la sculpture et l'architecture entière avaient fait un merveilleux progrès. L'encadrement de la fenêtre du premier étage ne mérite pas moins l'attention, et les maîtres de l'art disent à bon droit que le style du XIIe siècle convient le mieux à nos églises ; il est d'une exécution plus facile, plus solide, moins dispendieuse, et se prête au plus ou moins de décorations. Les substructions du choeur, terminé par l'évêque Hoël, doivent être cachées maintenant sous le pavage du choeur nouveau, considérablement agrandi ; le V. Hildebert ajouta des portes, et son historien, peut-être, désignerait ainsi l'arc triomphal ou jubé. Dès le temps de Vulgrin, la confession de saint Julien était surmontée de hautes pyramides, et notre historien ajoute que, l'an 1120, l'archevêque de Rouen consacra l'autel dans la confession de saint Julien, notre évêque, celui de Notre-Dame et de tous les saints, dans la crypte supérieure et plus digne. De nos jours, on retrouverait à peine, en tête de la nef, les restes de l'arcade du Crucifix, de l'arc de triomphe très-ancien, et depuis un siècle les portes du choeur n'ont plus supporté le jubé. La confession et la crypte pouvaient rappeler en partie ce qui se voit à la Couture. Les Actes du V. Hildebert nous apprennent, enfin, qu'au commencement du XIIe siècle cet illustre évêque reçut de riches présents pour continuer l'oeuvre de sa cathédrale et pourvoir au mobilier.

Il était né près de Vendôme, nous le répétons, et c'est de là qu'il fit venir le moine Jean, maître-maçon (coementarius), chargé de la conduite des travaux. L'oeuvre ou fabrique avait alors son administration, sa maison particulière, entre Saint-Michel et la rue Erreaud. Geoffroi de Vendôme se plaignit au pape de ce que Jean fût retenu de trop longues années au Mans, et le V. Hildebert écrivit pour justifier celui-ci. L'habile architecte alterna les colonnes de la nef avec des piliers très-solides ; reprit en arc ogival les arcades en plein cintre, à l'exception de l'arcade du Crucifix, qui sortait de la régularité du plan nouveau. Les ouvertures du premier étage furent masquées par des arcatures très belles, et surmontées de fenêtres géminées ; la grande voûte, étayée d'énormes contreforts à la façade de l'église, d'arcs-boutants sur les côtés, dut paraître une merveille de hardiesse et de solidité. Dans cette dernière période de l'art byzantin, la délicatesse des Grecs venait se joindre à l'ampleur des Romains et à la hardiesse du style ogival ; sous notre portique, quelques motifs paraissent empruntés aux meilleurs modèles de décoration, et le temple antique lui-même pourrait envier surtout la variété de nos chapiteaux. Les voyages en Palestine étaient fréquents à cette époque ; le V. Hildebert aurait-il voulu rappeler par sa porte dorée quelque souvenir de la porte dorée attribuée aux soins de Salomon, quelques souvenirs de son voyage jusqu'en Sicile ? S'il cultiva les sciences et les lettres avec succès, assurément il ne négligea point les arts, et surpassa beaucoup les travaux de ses prédécesseurs. Il explique assez longuement les idées symboliques, admises de son temps, sur la vigilance des lions, par exemple ; sur les quatre animaux de la vision d'Ézéchiel, etc. Son tableau du paradis ou portique est à nos yeux une création bien digne d'être restaurée ou reproduite dans nos églises. Cette porte, dit-il, doit rappeler la Foi, le Baptême, qui donnent entrée à la Jérusalem céleste. Dieu le Père a pour symbole une main sur une croix grecque dans un cercle, image de l'éternité ; Dieu le Fils, un Agnus Dei, qu'entourent les premières scènes de sa vie sur la terre.

L'Esprit-Saint figure particulièrement la majesté divine, en docteur sur un trône qu'environnent les symboles des quatre Évangélistes. A ses pieds, le linteau montre les douze Apôtres, assis également en juges et docteurs, au milieu des églises qu'ils ont fondées ; le trumeau devait porter l'image de la Vierge-Mère. Aux pieds droits, se dressent saint Pierre et saint Paul, les portiers célestes. La cour de l''Esprit de Dieu se complète par les grandes statues qui figurent les livres de l'ancienne Loi, et forment le vestibule du temple chrétien. Enoch est en face de Moïse, dont les tables ont été brisées presque entièrement ; Josué symbolise le livre des Rois ; Isaïe, celui des Prophètes. Judith est une noble veuve, en face de la reine Esther ; David ne tient plus sa harpe, mais Salomon laisse lire son nom d'une double manière. Ces statues, dit-on, sont beaucoup trop raides, et les draperies trop collantes. Chez les Orientaux, les Assyriens, les Perses et autres, les tuniques furent-elles moins serrées, ou même au Pandrosium d'Athènes ? Les Actes du V. Hildebert attestent que cet illustre évêque s'appliqua beaucoup aux travaux de sa cathédrale, et le plan de son portique nous paraît d'une conception très-savante ; mais on peut avouer que ses statuaires faiblirent trop souvent ou même laissèrent des ébauches. A la naissance des voûtes de la nef, près de l'entrée, une statuette figurerait le Créateur ; en face, Abraham, retenu par l'ange, veut immoler son fils. Moïse tient les tables de la Loi ; David joue de la viole. Cette imagerie est par trop naïve ; à la naissance des voûtes du portique, celle des Vertus cardinales ne le serait pas moins. Vulgrin, Arnauld, Hoël n'auraient placé sous les corniches que des modifions assez grossièrement sculptés ; le V. Hildebert ajouta de meilleures têtes, et prouva que de son temps on sculptait beaucoup mieux les lions. Son portique, enfin, fut surmonté d'une tour carrée, qui sous Louis XIII était debout encore, et sous nos yeux s'est abaissée beaucoup trop ; le couronnement actuel, les vanteaux de la porte et quelque semblant de restauration ne seront pas pris au sérieux plus longtemps, nous l'espérons. Au résumé, notre basilique, réparée au VIe siècle, plus largement au IXe, changea de style, sinon de forme, sous la domination des Anglo-Normands, et depuis l'an 1120 la nef demeure dans le même état. Les bas-côtés nous paraissent être l'oeuvre de l'évêque Arnauld ; les travaux de l'évêque Hoël auraient été meilleurs : ceux du V. Hildebert sont à nos yeux vraiment remarquables. Plus tard les laïques, dit-on, déchargèrent complètement le clergé du soin de nos églises matérielles ; nos Actes donnent au contraire l'évêque comme le premier, le véritable architecte de sa cathédrale.

L'Evesché du Mans : Dédié à Monseigneur Louis de Lavergne-Montenard de Tressan, évêque du Mans par Hubert Jaillot 1706.

L'Evesché du Mans : Dédié à Monseigneur Louis de Lavergne-Montenard de Tressan, évêque du Mans par Hubert Jaillot 1706.

L'église Gothique

L'enceinte de notre cité gallo-romaine se terminait en parallélogramme avec angles droits au Sud-Ouest, et suivait l'orientation de la rivière, qui baignait ses pieds pour ainsi-dire. La muraille du Nord-Est, au contraire, se conforma plutôt à l'orientation de la basilique et ne s'éloigna de celle-ci que de 25 mètres environ. La nef antique mesure autant de largeur, et le double en longueur, suivant l'usage ; mais avant le VIe siècle, on rencontrait un transept avec abside au chevet de l'édifice, dont la longueur totale pouvait alors tripler la première largeur. Les transepts n'eurent pas, sans doute, une grande profondeur avant l'évêque Arnauld, si l'on en juge par les épaisses substructions à la première travée actuelle ; leur longueur totale égala depuis celle de la nef, et donna la forme d'une croix régulière. Si nous ne nous faisons illusion, les ailes s'alignaient avec l'édifice de Saint-Sauveur et l'antique salle, appuyée sur le rempart de manière à présenter un corps en retour d'angle, près du chevet de la basilique, et terminé par la grosse tour de commandement. Si la grosse tour fut l'accompagnement obligé de cette basilique, au chancel trouvait-on la crypte et le puits du trésor public ? Pour nous il est certain que la partie réservée au prétoire était plus élevée que la nef, et du haut de son siège plus d'une fois on vit le juge interroger l'accusé retenu dans une telle crypte, à ses pieds. Un de nos plus anciens documents parle du puits auprès du maître-autel de notre cathédrale, avant le XIe siècle, et celui de Chartres est assez connu. Notre crypte aurait été la confession, où saint Julien déposa de nombreuses reliques, qu'il avait apportées de Rome ; où saint Victeur déposa celles de saint Gervais et saint Protais. La crypte de Saint-Gervais, à Rouen, nous montre ce qu'étaient de telles confessions au Ve siècle ; celle où saint Innocens plaça le tombeau de saint Victeur et prépara le sien, vient de disparaître ; celle de saint Bertran, à la Couture, n'a presque pas changé. Le niveau du pavage de la cathédrale ayant été relevé de plusieurs mètres, depuis l'année 1060 on aurait eu la crypte supérieure, dont parlent les actes du V. Hildebert.

Ceux de l'évêque Arnauld prouvent, nous l'avons dit, qu'au dessus de la confession de saint Julien on voyait alors de deux côtés d'énormes pyramides, et que le toit du chancel s'élevait beaucoup au-dessus des autres ; en examinant ce qui reste depuis le même temps, à la Couture, nos actes désigneraient ainsi la tour centrale, en forme de dôme sur quatre gros piliers. Dès le VIe siècle on rencontrait l'Arcade du Crucifix en tête de la nef actuelle ; mais depuis quelques années surtout, à peine si nous en pouvons distinguer les derniers vestiges : des bases ou des chapiteaux très-anciens, la hauteur du sanctuaire marquée par celle des bases, la place des degrés et celle des deux autels latéraux. Guillaume de Passavant aurait élevé les piliers actuels du chancel, afin de continuer le plan de restauration de la nef ; à l'une des bases, il aurait fait même écrire la date : 1145. On voit alors le Légat du Saint-Siège partager à deux desservants la chapellenie du Crucifix, et jusqu'à nos jours la paroisse du Crucifix eut ainsi deux desservants. Si l'évêque Guillaume surmonta ses quatre piliers d'une coupole nouvelle, il aurait imité peut-être celle de la même époque, à Saint-Laumer de Blois ; mais, au XVIe siècle, les piliers furent exhaussés pour atteindre les voûtes du choeur, et la tour centrale dès lors dut être supprimée. On se contenta désormais d'un petit toit en coupole extérieure, et que l'on aurait trop défiguré sous nos yeux ; au chancel, jadis on aurait surmonté la confession antique d'une crypte plus digne ; celle-ci, du sanctuaire et du maître-autel ; l'autel, d'un ciborium ; le ciborium, d'une coupole intérieure et celle-ci, d'une petite coupole extérieure. Quoiqu'il en soit, Guillaume mourut très-âgé, l'an 1186, et lorsqu'en 1216 Maurice du Mans voulut commencer un nouveau choeur, cet évêque aurait eu les plans de Maurice de Paris.

Le Maine alors faisait partie du domaine de France, où s'élevaient déjà de merveilleuses églises dans un style très-différent même du dernier byzantin. A Paris, on put continuer les plans de Maurice, achever en partie la plus belle des façades ; au Mans, le choeur fut terminé l'an 1155 et les fenêtres eurent des vitraux, que l'on admirera peut-être de longs siècles encore. En 1304, on commençait la croisée méridionale ; en 1440, on achevait la croisée septentrionale. Avant 1515, le cardinal de Luxembourg voulut, dit-on, entreprendre sur le même plan la nef, après avoir fait d'assez grandes réparations au dehors ; mais, on s'effraya justement, et la Réforme avec ses démolisseurs, et les philosophes de la table rase, et les athées sanguinaires ne préparèrent ensuite qu'une ruine totale. On ne peut de nos jours que restaurer plus ou moins imparfaitement ce qui nous reste, en laissant à nos neveux la tâche regrettable de transformer notre nef, et de copier la façade de Paris. L'an 1217, Philippe-Auguste écrivait à la reine Bérengère, douairière du Mans : Les chanoines se proposent d'étendre la chapelle du chevet sur les fossés de ville ; qu'ils le fassent, si cela vous plaît et ne vous cause aucun préjudice ; qu'ils occupent, comme anciennement, les fossés le long du cloître (du Doyenné). Saint Louis renouvela plus tard cette même autorisation, et les fossés près de la cathédrale étaient si profonds que la chapelle descendrait sa base à plus de 15 mètres. Le grès blanc devint en faveur alors, et nous voyons l'évêque permettre aux cisterciens de l'Epau de prendre du calcaire dans ses carrières de Bernay. L'étage était excellent ; mais les assises, dit-on maintenant, étaient trop basses. On réussit néanmoins à construire un admirable système de contre-forts, d'arcs-boutants et de voûtes très solides, dans une hauteur de plus de 35 mètres. Pourquoi des ouvriers d'une telle habileté négligèrent-ils l'emploi de nos marbres, même en placages, et qui pouvaient donner de meilleures assises ? L'art byzantin ne cessa point d'aimer les mosaïques de marbres variés, et jusqu'à la fin le style ogival, se plaisait au moins à les imiter en peintures ; nos architectes modernes avoueront-ils que le marbre dans nos églises est préférable de beaucoup à la pierre ? Nous l'ignorons.

Plan des anciennes enceintes de la ville du Mans dressé par MM Landel et Hucher 1852.

Plan des anciennes enceintes de la ville du Mans dressé par MM Landel et Hucher 1852.

Si Maurice du Mans eut sous les yeux les plans de Maurice de Paris, on pourrait dire qu'il les perfectionna ; les chapelles ailleurs ne sont point aussi belles ; l'ensemble peut être plus grandiose, mais il est moins gracieux ; les détails sont exécutés moins artistement etc. Le commencement du XIIe siècle nous avait donné de majestueuses colonnes, avec chapiteaux du meilleur goût, griffes d'un bon effet à la base ; le commencement du XIIIe siècle nous a laissé des bases en octogone, bien préférables ; des colonnes tout autrement élancées et gracieuses ; des tailloirs arrondis ou contournés à pans. Pour abréger, un art infini ; mais la flore se rapproche parfois de la nature, et le chapiteau s'amoindrit ; on prévoit que trop tôt après il deviendra presque insignifiant ; on prévoit que trop tôt après la colonnette s'amaigrira d'une manière inquiétante. Les critiques de saint Bernard semblent avoir eu de l'écho sous nos voûtes aériennes ; l'école laïque, d'après le langage moderne, a pu nous donner des dentelles de pierre, mais le génie chrétien ne grave presque plus son histoire, son symbolisme, sa science et tous ses amours. Cette belle pierre néanmoins ne devait point rester entièrement nue ; dans la chapelle du chevet quelques peintures remontent à sa fondation, pour ainsi dire, et les vitraux placés l'an 1154 ne sont qu'une peinture du même goût. Aux voûtes de cette chapelle, l'imagerie remonte à la fin du XVIe siècle, et nous demandons si l'on a pu faire rien de mieux jusqu'à nos jours ; mais que dire du grossier barbouillage moderne ? L'art byzantin ne reproduisait de toutes parts que ses types hiératiques, fixés dans les mosaïques de Constantinople, de Ravenne et de Rome ; il représentait le plus généralement, en dernier lieu, les sujets qui restent sous notre portique ; mais, que dire de notre imagerie au XIIIe siècle ? Les évêques eurent soin de rappeler souvent que Moïse reçut l'ordre d'employer à l'oeuvre du Tabernacle les métaux les plus précieux, les artistes les plus habiles, et qu'aucune dépense ne devait être ménagée pour la décoration des églises. En France sous les Mérovingiens, ils agissaient en conséquence, d'après le récit de saint Grégoire de Tours, et n'oubliaient, dit cet historien, ni les peintures murales, ni les vitraux peints. Au milieu du XIe siècle, nos évêques confèrent gratuitement des prébendes de leur cathédrale à quelque orfèvre habile, à quelque peintre savant au verrier intelligent, aux artistes chargés de diriger leur oeuvre.

Notre basilique aurait eu de très-bonne heure son maître-verrier, chanoine, et c'est ainsi que paraît Guillaume, en 1096, à l'époque ou l'évêque Hoël fit décorer de vitraux le chancel et les croisées, partout. Plus tard, il lègue au V. Hildebert, aux chanoines, la maison achetée de ses propres deniers, sous la condition qu'elle sera vendue, et que les églises, les pauvres partageront ce fruit de son travail. S'il reste à peine dans les croisées nouvelles un dernier morceau des vitraux de Guillaume, on en trouve d'assez considérables dans la chapelle du chevet, maintenant, et l'on demande qu'ils aillent éclairer de nouveau la nef (Calques des vitraux peints de la cathédrale du Mans). Les sujets de cette imagerie nous rappellent ceux des catacombes, et l'exécution, l'harmonie des couleurs nous diraient assez que la même main peignait le parchemin des manuscrits, les parois des murs d'église et les verrières des temples. Les actes de l'évêque Hoël attestent que ses verrières étaient d'un prix exorbitant, et l'on y remarquerait souvent, en effet, une grande application dans le dessin, une exécution bien soignée. Notre établissement canonial paraît avoir continué pendant plusieurs siècles, et le V. Hildebert aurait décoré de vitraux la nef, non seulement ; mais il enlumina de cette manière, décemment et partout la maison du chapitre (maison des soeurs aujourd'hui). Son successeur prodigua le même genre d'ornementation pour les grandes salles de l'évêché, celle particulièrement de la Psalette actuelle, près de Saint-Sauveur ; au milieu du XVe siècle, la grande rosace de l'église annoncerait encore une ère florissante, et le missel du cardinal de Luxembourg prouverait que notre école de peinture subsistait au XVIe. Nos actes font un éloge, évidemment exagéré, des vitraux de Guillaume, successeur du V. Hildebert ; néanmoins on avoue que nos vitraux du XIIIe siècle ne furent plus aussi soignés qu'auparavant. En échange, les draperies byzantines devinrent plus amples ; les poses, plus naturelles, et parfois on atteignit l'idéal du beau dans le style sacré. Nous n'osons parler de quelques statues antiques au sommet extérieur de l'édifice ; la Vierge-Mère, au chevet, ressemblerait beaucoup à la statue de la reine Bérengère, qui favorisa cette construction et reproduirait la majesté sévère, que l'on aimait alors. Enfin, si notre architecture fut admirable jusqu'au milieu du XIIIe siècle, nous ne pouvons dire que la statuaire et la peinture le furent au même point.

En 1304, Robert de Clinchamp fit commencer, d'après le plan nouveau, la croisée méridionale, fondée par saint Innocens, agrandie par Arnauld et terminée par l'évêque Hoël. Il y comprit presque entiérement la tour terminale, et se contenta d'exhausser les travaux de Guillaume de Passavant. A l'Ouest ses fenêtres font remarquer leurs prodigieuses dimensions, leurs meneaux féeriques, leurs arcatures avec galeries ajourées ; mais, sa flore laisse beaucoup trop à désirer, et son architecture est loin d'atteindre la perfection du siècle précédent. On continua sur un modèle du même goût le chancel et la croisée septentrionale, que l'on espérait, sans doute, étendre autant que l'autre ; mais, en 1424, l'évêque Adam fit commencer le mur terminal, qu'il ne put même achever avant sa mort. On voit extérieurement la porte de l'évêché ; tout près, à l'intérieur, une belle petite porte pour monter aux galeries et, nous le supposons, à la chapelle de Saint-Sauveur. Au-dessus, on admire les arcatures et galeries, les meneaux avec fleurs de lys ; Charles VI aidait de ses deniers, et ces travaux étaient appelés alors : l'oeuvre du roi. L'on admire tout particulièrement la grande rosace et ses vitraux ; si l'architecture de cette époque fut défectueuse, c'était au moins par une délicatesse exagérée. La pierre y devient trop légère évidemment, et la flore, trop insignifiante. Après avoir ainsi terminé, vers l'année 1440, la seconde partie du plan de l'évêque Maurice, il restait au dehors des travaux assez considérables. La tour actuelle fut élevée sur les bases anciennes ; plusieurs niches y conservent les statues des patrons de l'église : la Sainte-Vierge, saint Etienne, saint Gervaiset saint Protais. Cette tour était couronnée d'une pyramide, surmontée de la statue de saint Aldrik ; à la place nos architectes modernes n'ont su mettre qu'un ridicule clocheton de fonte, au lieu d'une flèche altière de bois, couvert de plomb, La sacristie, au fond de l'une des chapelles du XIIIe siècle, laisse admirer sa voûte, soutenue par une colonnette au milieu ; tout-à-côté, l'évêque Adam fit bâtir la nouvelle salle du Chapitre. On vient d'en faire disparaître les traces, les bases de colonnettes trop légères ; mais, dans l'église on voit encore les deux portes sculptées et peintes. Au fronton de la porte principale figure saint Julien, faisait jaillir une fontaine ; le feuillage de la corniche est de bon goût. Enfin, l'an 1506, on commençait une grande restauration à l'extérieur de la cathédrale.

Somme toute, les différents styles de cet édifice ne reproduisent au fond que ce qui se voyait ailleurs, à la même époque : l'art romain offre une construction commune, bien raisonnée, sous les stucs et la peinture ; mais, au Mans, de bonne heure il se montre avec le cachet byzantin, le petit appareil d'ornement et des remparts pareils à ceux de Constantinople. Dans la seconde moitié du XIe siècle, apparaissent notre maçonnerie commune et le style roman de Normandie, qui réclame encore les stucs et la peinture. Au XIIe, le roman-fleuri joint aux traditions byzantines un art nouveau, plein d'une élégante sévérité ; le XIIIe siècle se jette dans une voie étrange, merveilleuse à plus d'un titre, et réussit une oeuvre d'Encelade presque interminable. Le XIVe ne veut pas rester en chemin ; s'il ne peut monter plus haut le dôme de Guillaume et dont il ne resterait que deux arcs-boutants à l'intérieur, il le supprimera, mais en échange donnera des fenêtres gigantesques, de plus belles galeries. Le XVe termine l'oeuvre actuelle, en étalant une excessive délicatesse, une rosace féerique, et le XVIe doit se contenter de ses réparations, de ses pinacles etc. Suivant le langage d'un poète, enfin, notre cathédrale est un livre de pierre qui reflète en quelque sorte toute notre histoire locale, et que nous ne pouvons trop étudier. Nous en appelons aux premiers maîtres dans l'art religieux, et nous demandons si l'on montrait, avant le milieu du XIIIe siècle, plus de science et de goût d'étude et de soin, de volonté, d'expérience acquise, qu'au choeur de notre basilique. Notre église gothique, sans contredit et nous devons plus que jamais le répéter, est dans le monde une rare merveille, qui mérite mieux notre admiration, nos soins de conservation.

L'église de la Renaissance

Plus ou moins d'accord avec le langage sacré, nos poètes modernes disent que l'homme est le temple de Dieu sur la terre, et que l'église est la figure du Fils de l'homme, une Passion de pierre. « La nef, étendant ses deux bras, c'est l'Homme sur la croix ; la crypte souterraine, c'est l'Homme au tombeau ; la tour, la flèche est encore lui, mais debout et montant au ciel. Dans le choeur incliné par rapport à la nef, vous voyez sa tête penchée dans l'agonie, vous reconnaissez son sang dans la pourpre ardente des vitraux. Touchons ces pierres avec précaution, marchons légèrement sur ces dalles ; tout cela saigne et souffre encore. Un grand mystère se passe ici. Vous, qui croyez que ces pierres sont des pierres, qui n'y sentez pas circuler la sève et la vie ; chrétiens ou non, révérez, baisez le signe qu'elles portent : ce signe de la passion, c'est celui de la liberté morale ! On sait que l'église chrétienne n'est primitivement que la basilique du tribunal romain ; elle s'empare du prétoire même où Rome l'a condamnée. La cité divine envahit la cité juridique ; le tribunal s'élargit, s'arrondit et forme le choeur. L'église se creuse des cryptes qui lui rappellent son berceau ; mais lorsque l'ère fatale de l'an mille a passé, ... l'église secoue son étroit vêtement ; élance cette crypte au ciel, et la flèche flamboyante échappe comme le profond soupir d'une poitrine oppressée depuis mille ans L'esprit a pénétré d'une vie puissante et harmonieuse toutes les parties de ce grand corps ; il a suscité d'un grain de sénevé la végétation du prodigieux arbre ; il fut l'artisan de son enveloppe de pierre : il y grava tous ses souvenirs, toutes ses espérances, tous ses regrets, toutes ses amours. » (Hist. Fr.) Dans le temple chrétien, la doctrine catholique se montre en entier aux yeux du corps, comme aux yeux de l'esprit : le Christ est représenté par la croix. Quatre nefs convergent au centre commun de jonction..., et l'église s'ouvre, comme la Jérusalem céleste, aux quatre vents de la terre, pour recevoir les fidèles venus des quatre coins du monde. Au point de rencontre s'élève la coupole ou dôme, ornée pour apporter la lumière d'autant d'ouvertures qu'il y a d'Apôtres ; les Apôtres sont assis en maîtres au dessus des prophètes, debout en bas.

La coupole ou demi-sphère couronne le sommet, comme un autre ciel ; elle indique à tous les regards, au dedans, au dehors, le sanctuaire et l'autel ... Au centre, habite Celui dont il est dit : qu'il est centre partout, et circonférence nulle part. Le sanctuaire resta presque toujours au milieu de l'espace entre les bras ; au coeur de l'église, suivant l'évêque Guillaume de Mende, et le coeur n'est pas dans la tête, ajoutait de Cordemoi. Les premières églises eurent pour type le dôme oriental, le Cénacle où les Apôtres reçurent l'Esprit-Saint ; Amiens et Saint-Ouen de Rouen, par exemple, prouveraient que souvent le style gothique lui-même se garda de rompre entièrement avec les traditions antiques, et presque partout la tour centrale devait avoir sa flèche supérieure aux autres. Si les Grecs et les Latins réservèrent au presbytère l'abside basilicale, le style gothique au moins enveloppa le choeur et le sanctuaire d'une clôture assez élevée ; au devant on rencontrait l'arc de triomphe, le pupitre des anciens. Quand les cérémonies devenaient paroissiales, on ouvrait les grandes portes de ce jubé ; l'on chantait les leçons, les épîtres, les évangiles du haut de la tribune et sur l'aigle de métal ; on montait à la plate-forme par un double escalier en spirale, à l'entrée du choeur (Dict. d'archit). La Belgique fut surtout un pays à jubés ; celui de notre cathédrale, au XVIe siècle, était l'oeuvre du cardinal de Luxembourg, dont les armes ne sont pas effacées encore, à la base ; au sommet, elles étaient portées par des anges. Dans les substructions, près du pilier, le Cardinal fit préparer un modeste caveau pour sa sépulture, et lorsque dernièrement on découvrait son visage, sans peine nous avons reconnu les traits qui frappent dans son missel. Sa taille était prodigieuse ; sa statue, en terre, moulée et peinte artistement se voyait en 1562 encore, sur une colonne plus près des fonts. Les restes de quelques peintures murales et les traces des deux escaliers du jubé ne tarderont pas à disparaître entièrement ; mais, un large plan, une assez ample description nous restent. Après le pillage des factieux réformistes (3 avril 1562), le Chapitre adresse au Parlement ses Plaintes et doléances ; précise les détails et la valeur des objets.

« Bouju, Vignoles, leurs femmes et complices ont brisé, démoli le devant du choeur appelé le pupitre et jubé ; lequel était construit entre les deux piliers supérieurs de la croisée de l'église. Au-devant des piliers, aux deux extrémités du pupitre, étaient deux autels. Ce pupitre était magnifique, composé de deux étages de tabernacles, les uns au dessus des autres ; la base était enrichie d'ornements relevés et concavés. Le premier étage était porté par deux culs de lampe de gros relief, avec pans enrichis de feuillage, fort découpé, concavé en moulures. Sur les culs de lampe étaient assis (posées) plusieurs guimberges portant images et petits tabernacles en grand nombre, s'entre-touchant et ne laissant que la place des figures des prophètes. Ces figures étaient dans les niches, et le tout rempli, enrichi d'ouvrage ; il y avait sur les tabernacles un autre revers en saillie, enrichi de moulures avec plusieurs frises, sculptées finement : de sorte que l'on voyait à peine le nu, le champ de l'oeuvre. Sur les revers il y avait d'autres culs de lampe suspendus et surmontés d'autres guimberges très riches ; entre les guimgerbs, places et grandes niches étaient les images des douze Apôtres. Au milieu, grand tabernacle avec une figure de la Résurrection de N. S. J. C. ; au-dessous de cette figure, il y avait un portail en pierre de taille très-riche ; au milieu du pupitre, pour entrer dans le choeur de l'église. Dans le haut, de chaque côté, se voyaient des anges, portant les armes du cardinal de Luxembourg, et forment accoudoir sur le pupitre, une grande moulure saillante était enrichie d'une frise de feuillage de vigne en grand relief. Il y avait au sommet, vers le milieu, la forme d'une montagne, avec ossements et tète de mort, surmontés d'une grande croix de bois où pendait un crucifix. » Nous ne pouvons continuer les détails ; il suffit de les résumer : on évaluait à 20000 livres tournois la maçonnerie du jubé, sculptée artistement et dans un goût tout moderne. Au milieu de la façade s'ouvrait un portail, qui répondait à celui du choeur ; entre les deux murs, une voûte en pierre de taille régnait dans la longueur, et les escaliers étaient en pierre de taille également.

Les statuettes du pupitre et jubé consistaient en 12 images des Apôtres, la Résurrection de N. S., 12 prophètes, 50 statuettes en balustre, entre les Apôtres et les prophètes : le tout en tuffeau de Saumur. Le calvaire, où se montraient une foule de Juifs, 13 évêques et deux anges. « Il y avait au pupitre 30 chandeliers de cuivre, coudés ; de gros mufles de lion, d'où sortait une branche coudée ; au bout, fleurs de lys pour goupiller les chandeliers. D'un gros mufle sortait un grand chandelier à trois branches, pour porter 3 cierges. Grand aigle de cuivre, étendant ses ailes pour y lire l'Évangile, et posé sur un grand soubassement de cuivre. Portail du choeur, à l'entrée du pupitre, également en cuivre de façon moderne. » Ce jubé ne manquait point d'un accompagnement magnifique aux deux extrémités : d'un côté, l'autel des miracles de saint Julien ; de l'autre, celui de N. D. de pitié. Au sommet du premier, grand pavillon de pierre de taille, avec figure de la Trinité, deux anges munis d'encensoirs, etc. ; sous le pavillon de l'autel opposé, figure du jugement : N. S. J. C, la sainte Vierge, saint Jean, 2 anges avec trompettes. Ces pavillons, appuyés sur le pilier, semblaient tenus par la main de l'ange, qui les surmontait ; plus bas, on voyait tout un échafaudage de statuettes dans leurs niches, de grands tabernacles, de frises, de sculptures, etc. Plus loin, dans les croisées, d'autres autels merveilleux continuaient la décoration ; terminée au midi, par le buffet des orgues, que les démolisseurs épargnèrent ; tandis que vers le nord on rencontrait la statue du cardinal, sur une colonne, les fonts baptismaux, en cuivre, portés sur trois gros lions de cuivre également. L'un d'eux soutenait les armes de ce cardinal ; une colonne entre les lions s'élevait à leur hauteur, et sur la colonne était une étoile. On rencontrait le pilier de pierre de la petite horloge : sept planètes y figuraient les jours de la semaine, et chacun des Apôtres venait a son tour frapper son heure. Nous avons vu vendre au poids du fer les restes de cette horloge curieuse, détruite depuis un siècle, sous prétexte qu'elle amusait le peuple.

Le choeur comptait 48 stalles de chaque côté : stalles hautes et stalles basses, très-belles, avec revers haut de douze pieds ; le tout estimé 2500 livres. Derrière et dans le pourtour du choeur, étaient rangés des meubles, des appartements même, où logeaient et couchaient le sonneur et deux sergents de l'église. Le choeur était traversé d'une cloison en forme d'accoudoir, haute de 4 pieds ; avec panneaux d'antiques, piédestal, 12 chandeliers, 6 pilastres hauts de plus de 7 pieds, balustres et demi-balustres portant des arcs de cuivre. Au-dessus des pilastres, architrave, frise, corniche, épis, chandeliers. Au dedans du choeur, grand ange de cuivre également, les ailes étendues pour soutenir les livres de chant : en ses mains un chandelier ; grand griffon de cuivre, les ailes étendues de même pour porter les livres, avec chandeliers ; lutrin moyen, fait en manière de poterie, relevé de feuillage, etc. La cloison de cuivre à l'entrée du grand autel était non moins en forme d'accoudoir ; entre les moulures, treillis losangé ; 4 gros piliers aux quatre coins, colonnes, chapiteaux surmontés d'anges qui portaient les instruments de la Passion ; 6 petites colonnes non moins riches en imagerie, en moulures, surmontées de populots, d'anges qui portaient des instruments de musique. Les colonnes étaient reliées par une ceinture d'arceaux, enrichie de beaux grands fleurons et de chérubins ; l'entrée du sanctuaire fermait à deux portes, avec treillis. Derrière cette clôture, 4 colonnes de plus de 6 pieds, surmontées de deux hommes d'armes, d'une carrie avec couronnement d'une vingtaine de chandeliers ; entre les chandeliers, des masques et petits dauphins entrelacés. Des deux côtés de la porte du grand autel, grands chandeliers, posés sur piédestal, etc. ; la grande courtine qui servait sur cet autel valait 4 écus ; le crucifix de la grille en cuivre, avec croix en argent, argent doré, 2860 livres ; ornements de la châsse de saint Julien, 15000 écus d'or ; 50000 écus de pierreries. Nous renonçons à décrire l'autel de cette châsse, au fond de l'abside.

Le choeur était rempli de tant de décorations, d'autels, de mausolées splendides, au dedans, au dehors, que l'on serait tenté de demander où se plaçaient les assistants ; la chaire épiscopale avec cloisons en pierre de Bernay fut estimée 1500 livres, sans parler d'une riche menuiserie ; les cuivres du choeur, 36000 livres. Dans la paroisse du Crucifix ou la nef, on retrouvait le même genre de décoration, des autels splendides, des mausolées, des grilles en balustrades, etc. L'on y voyait de grands tableaux peints à l'huile. Le maître-autel, en pierre de taille, aurait valu 150 livres ; celui de la paroisse du Crucifix, en pierre magnifique, 1200 livres ; nous ne parlons point des chapelles absidales, de Notre-Dame sous terre, ni des ornements du revestiaire ou sacristie. Si les bâtisseurs du XIIIe siècle déployèrent un art infini dans leur architecture gigantesque, on peut dire que notre cardinal géant déploya de même un art infini dans les ornements de l'intérieur, marqués à son cachet presque généralement. Les grandes tapisseries de saint Julien étaient très-belles ; celles de saint Gervais, au dossier des stalles, sont un chef-d'oeuvre à nos yeux, et nous croyons que ces travaux furent exécutés au Mans. Les dessins nous rappellent ceux des manuscrits du cardinal, et son style ne manque point d'une grande originalité ; ceux du buffet des orgues répondraient parfaitement à la description des Plaintes du Chapitre, et montrent que le XVIe siècle s'éloignait du précédent non moins que le XIII avait répudié l'héritage du grec-byzantin. Dieu, pour écrire, souvent efface ; notre esprit à chaque siècle veut effacer également, et même sous saint Louis dans notre cathédrale, on démolit beaucoup. Il est certain qu'à cette époque nous avions un jubé ; souvent on vit le diacre, après la lecture de l'évangile, y fulminer les sentences de l'excommunication. Après le pillage de 1562, le jubé fut rétabli ; depuis un siècle seulement il a disparu, sans espoir de retour ; les autels se relevèrent non moins nombreux, au XVIIe siècle, mais le style de la Renaissance était tout autre déjà. Celui du Cardinal se distingue par ses pilastres avec moulures, variant de forme, pour encadrer des guimberges ou rosaces d'une flore passablement gothique ; par ses niches à coquille, ses pendentifs, ses culs de lampe, ses grands tabernacles, surmontés parfois de tabernacles, d'édicules superposés ; par ses fines sculptures, ses frises, ses dauphins, ses masques, ses épis et toute une composition assez étrange. Ce grec-gothique est loin de valoir à nos yeux le grec-byzantin, le roman fleuri ; mais, on peut dire qu'il convenait au luxe de la décoration intérieure.

En résumé, notre église de la Renaissance offrait un bon état de réparations, au dehors ; au dedans, une décoration de la plus grande richesse en style classique et d'un goût tout nouveau. Dès l'année 1562, la dévastation fut presque complète ; mais Lecorvaisier atteste que les balustrades du choeur furent rendues ; qu'il les voyait à leur ancienne place, et nous savons qu'elles disparurent en 1769 seulement. Cet historien prétend trop souvent qu'il ne fait que suivre les manuscrits, et trop souvent depuis on s'est contenté de reproduire son récit ; pour nous, il est certain que cet auteur fut loin d'être un interprète fidèle : sa description des orgues, par exemple, nous paraît assez étrange. Il ajoute que le cardinal de Luxembourg fit fondre la grosse cloche de la cathédrale ; on l'a conservée intacte jusqu'en 1811, mais depuis quelques années nous avons peine à reconnaître son ancienne voix. Il ajoute que le cardinal « fit forger la belle horloge, placée près de la porte septentrionale, et dont la fabrique est aussi merveilleuse que l'invention en est admirable ; » elle fut, dit-on, le modèle des horloges de Lyon et de Strasbourg, et nous avons vu ce qu'elle est devenue sous le toit inhospitalier du collège communal. On assure que la grande tapisserie de saint Julien existe encore, et nous en connaissons quelques parties ; celle de saint Gervais est réparée avec un grand succès, et nous sommes persuadé que les spoliateurs ont laissé depuis 1562 des fils non moins égarés, non moins coupables. A l'exemple du cardinal, tous se montrèrent généreux : « les noms de Marguerite de Lorraine, de Marie de Luxembourg ne doivent être prononcés qu'avec respect et reconnaissance, car on ne pourrait compter tous les bienfaits qu'elles répandirent, sur notre territoire, durant plus de cinquante années. » A l'exemple de la cathédrale, la plupart de nos églises se transformèrent sous une parure nouvelle, et de toutes parts la Renaissance prodigua des chefs-d'oeuvre véritables.

photos de France par Hubert Vaffier, donateur en 1891.

photos de France par Hubert Vaffier, donateur en 1891.

L'église Moderne

Au midi de nos remparts, si vous fouillez profondément, vous trouvez en quelque sorte un livre de terre, dont les feuillets nettement séparés parlent assez encore. Si vous interrogez nos murailles gallo-romaines, elles vous montrent la cité municipale modelée sur Constantinople, la capitale au VIe siècle. Quelques portions paraissent sortir du moule uniforme, et peut-être même vous distinguerez dans la mosaïque extérieure une petite croix blanche sur un fond rouge. L'enceinte aurait 280 m. environ de largeur sur une longueur triple, en allant de la Porte-du-Nord à la Vieille-Porte de la rue Dorée ; la clôture du palais de notre Vieille-Rome aurait occupé le tiers de cette longueur, jusqu'à la Pierre-de-Tucé. La basilique du palais primitif a 25 m. de largeur sur une longueur double, et le chevet, la partie réservée au gouverneur ou prince, aurait plongé dans le château de celui-ci. La forme générale de l'édifice n'a cessé de rappeler celle que les Grecs et les Romains avaient conservée ; les murs extérieurs offrent encore le cachet le plus ancien. Ceux de saint Aldrick, à Saint-Pavace, par exemple, sont différents à nos yeux ; ceux du règne de Guillaume-le-Bâtard montrent, comme au Pré, notre maçonnerie vulgaire, entée sur un appareil de beaucoup antérieur. Après les ravages des Normands, l'évêque Arnauld restaura la façade de notre basilique, et son style, trop souvent incorrect, parfois n'a pas manqué d'ampleur. Les bas-côtés une partie de la grande nef appartiennent non moins à la seconde moitié du XIe siècle.

Contemporaine des croisades, oeuvre du V. Hildebert, disciple de Cluny, cette nef, avec son portique surtout, réclame les enluminures que Saint-Germain-des-Prés n'attend plus. Le choeur, commencé par Maurice du Mans, achevé par le B. Geoffroi de Loudon, est on ne peut plus digne des règnes de Philippe-Auguste et de saint Louis. Le récit de la dédicace nous apprend que tous, hommes, femmes, enfants, dames vêtues de soie, vignerons, etc., voulurent aider dans l'oeuvre sainte, et prendre part à cette croisade d'un nouveau genre. Les vitraux des corporations restent d'ailleurs. Le XVIe siècle a laissé la tour et l'un des transepts ; en 1401, 1418, 1420 et plus tard, « on travaillait à la sculpture de la croisée du nord, par ordre du roi ; l'archidiacre de Sablé posa la première pierre ; » la muraille du nord-est était à peine terminée l'an 1440. En 1507, on travaillait aux réparations extérieures de la nef, et l'on faisait faire un autel d'argent. Le buffet des orgues est un précieux reste des décorations intérieures, dues en grande partie aux largesses du cardinal de Luxembourg, avant l'année 1519. En 1536, sept mille livres de plomb furent employées à couvrir l'église. En 1562, tout fut saccagé. Le cardinal de Rambouillet « employa dès-lors tous ses soins à réparer Ies dommages, à relever les autels, et l'on y voyait au milieu du dernier siècle encore ses armoiries, en témoignage de ses pieuses libéralités. » (Histoire des évêques du Mans).

Vers l'année 1576, on rétablissait les deux rangs de stalles, que nous avons vues avec leur couleur naturelle ; leurs griffons, dans les escaliers ; leurs panneaux gothiques, dans les extrémités ; leur dossier vraiment remarquable, etc. Claude, frère et successeur du cardinal de Rambouillet, ne manqua point de suivre ses nobles traces : en 1593, le chapitre se propose de rétablir la clôture du choeur ; peu d'années après, Dieuxivois fabrique en cuivre l'enceinte du maître-autel. Le chapitre avait recouvré les plans du pupitre, élevé par le cardinal de Luxembourg ; l'an 1610, il estimait à plus de 17000 livres la restauration que l'architecte Hoyau, dit-on, entreprit, et qui dura trois ans. Un dessin de la bibliothèque du Mans montre les deux latéraux et ces mots : Épitaphe sous le jubé du côté de la nef, à droite en entrant dans le choeur de la cathédrale ; épitaphe sous le jubé du côté de la nef, à gauche en entrant dans le choeur ; et l'on voit qu'au milieu du dernier siècle les mausolées du cardinal et de sa famille restaient sur leurs tombes. Ces latéraux, servant de mausolées jusqu'en 1769, viennent d'être transférés dans l'église de l'hospice, et les tombes désormais n'ont plus rien qui les désigne. Thiers, curé de Champrond dans le Maine, avait donné tout un traité sur les jubés ; il avait en vain tonné contre les ambonoclastes, qui roulaient les églises imparfaites et estropiées, et méprisaient les plus anciennes pratiques de l'Église, les règles données par les saints pères et le concile de Trente : pendant un siècle on démolit les jubés, et l'évêque de Grimaldi n'épargna point celui de sa cathédrale.

Il transféra l'une des portes triomphales au-devant de la chapelle dédiée à saint Antoine, et qui lui servit d'entrée dans son palais ; il transféra l'autre au-devant du revestiaire. Ces portes, avec les latéraux, suffisent à montrer que notre jubé du XVIIe siècle fut une oeuvre magistrale, une restauration véritable, un digne souvenir des bienfaits que la famille de Luxembourg répandit dans notre diocèse pendant un demi-siècle. Avant 1633, le sculpteur La Barre avait fourni les statues : un grand Christ, une Notre-Dame-de-Pitié sur l'arc du pupitre, etc. Les calvinistes avaient dévasté le beau sépulcre dans la chapelle de saint-Pierre ; La Barre rétablit celui que maintenant nous trouvons à sa place. « Plus de trente autels étaient disséminés dans l'intérieur de la cathédrale et même autour du choeur, perpétuant le souvenir de fondations pieuses ; le trésor et le revestiaire réparaient leurs pertes, mais ils devaient se ressentir de la privation des millions de valeur dont ils avaient été spoliés dans le siècle précédent. Un nombreux personnel se rendait au choeur pour y célébrer les fêtes solennelles : nous sommes au temps de l'évêque Charles de Beaumanoir. Lui-même, ses grands-vicaires, les fonctionnaires de son officialité, de ses commissions administratives, y prenaient place quelquefois. On compte 42 chanoines, les curés, vicaires, habitués des 16 paroisses du Mans ; 93 chapelains, titulaires d'autant de chapellenies ; 9 vicaires du choeur, 62 choristes, 12 clercs, 9 enfants de la psalette, etc. »

Dans l'acte de fondation de la Sainte-Cécile (1633), le chanoine Bernardin Le Rouge indiquerait suffisamment que le premier choeur des artistes occupait la tribune du pupitre suivant l'usage connu. « Les artistes du second choeur, dit-il, sont élevés sur une galerie en forme de petit jubé, construite exprès sur la muraille de clôture du choeur, au côté gauche en entrant par la nef sous l'arcade, soutenue par le deuxième et le troisième pilier. » (La Sainte Cécile, au Mans.) L'historique de cette fête des musiciens prouverait que très longtemps notre école de chant eut une importance véritable, une réputation méritée, et que deux jubés, pour ainsi dire, pouvaient à peine contenir le grand nombre des artistes. Dans notre revestiaire, une pompeuse inscription loue beaucoup l'évêque de Grimaldi sur son zèle à décorer la cathédrale ; on se persuade maintenant, au contraire, qu'il facilita singulièrement l'oeuvre des derniers démolisseurs. Les tribunes, si nécessaires à tous égards, disparurent avec une grande partie des autels ; les portes triomphales furent remplacées par une haute grille de fer, et qui vient de disparaître à son tour. Demain, peut-être, ce qui reste de grilles semblables auprès du sanctuaire, cédera la place de même ; les sièges des stalles iront retrouver les débris du dossier ; les stucs et les marbres iront décorer quelque maison profane, et l'école laïque se réjouira d'avoir fait table rase dans notre choeur, si bien fortifié naguère. Plus tard, elle nous dotera, sans doute, de mesquineries à l'antique, comme à Paris.

Dans son traité sur les autels, Thiers atteste que depuis deux siècles, généralement en France, le maître-autel n'est plus à l'entrée du choeur ; mais vers le chevet, où souvent on trouvait le petit autel de la sainte réserve. Avant l'année 1562, le maître-autel de notre cathédrale était en pierre de taille, que l'on revêtait des parements les plus précieux. La statue de la Sainte-Vierge était d'argent doré ; la couronne, enrichie de pierres fines. Les statues de saint Gervais et saint Protais n'avaient en argent doré que le visage. Quatre lampes d'argent étaient suspendues entre les grands autels. Notre inventaire, très-détaillé, ne parle nullement de statues des Saints-Apôtres, en argent, et nous ne savons que penser du récit de nos historiens modernes, depuis Lecorvaisier, le reliquaire des douze Apôtres est estimé 10 livres seulement. La châsse de saint Julien reposait sur un parement de bois ; couvert d'argent doré, du poids de 100 marcs au moins ; au devant, petite châsse de saint Julien avec statuettes des saints : Pavace, Julien, Thuribe et Domnole ; façon et dorure, plus de 6000 livres. Des deux côtés de la grande châsse, deux chandeliers à trois branches et deux petits chandeliers, coudés ; devant l'autel, moulure de cuivre avec couronnement de feuillage, portant quatre lampes. Devant la porte du même autel, lampes et six longues chaînes ; sous l'autel, voûte en pierre de taille, accostée de deux autres plus petites : le tout servant de reliquaire entre les quatre colonnes du chevet, unies par un mur. Ailleurs, c'est ainsi que l'on déposait la sainte réserve sous l'autel du chevet, le Jeudi-Saint, et que les fidèles s'y rendaient pour baiser le crucifix. Notre dernier autel de saint Julien était de marbre. il vient de disparaître avec le retable, où l'on voyait le Sauveur portant sa croix, et les colonnes sont dégagées, et l'on cherche même la statue de notre apôtre à cette place d'honneur. Anastase montre avec quel soin les papes autrefois entouraient de précieuses courtines le maître-autel, d'or ou d'argent ; au temps de saint Aldrick, notre ciborium était de la plus grande richesse ; avant 1562, la carrie n'était que de bois, et les courtines, de médiocre valeur.

A cette époque, la chaire du prédicateur aurait été très-simple, et l'inventaire désignerait même le tapis bleu que l'on y remarque sur la tapisserie de saint Julien ; mais on sait que souvent le jubé servait de chaire tout autrement convenable. Notre chaire moderne en appelle une autre, mieux placée. Thiers suppose que la chaire épiscopale dut presque toujours être au fond de l'abside, et nous savons qu'avant 1562, celle de notre cathédrale était en pierre de taille avec cloisons en pierre de Bernay, estimée 150 livres. Lorsque maintenant l'école laïque. entreprend une nouvelle Restauration de notre choeur, nous décorons, ici que nos évêques, jusqu'à la fin du dernier siècle, ont été ; généralement distingués par leurs vertus, leur science, leur naissance, leur fortune, leur zèle à décorer la cathédrale ; qu'ils en ont été les premiers, les véritables architectes, et n'ont cessé d'y maintenir les anciennes règles que Thiers a développées. Depuis l'évêque Maurice, le maître-autel a pu quitter la place fixée par l'apôtre du Maine, et s'avancer trop près du chevet ; mais la Renaissance elle-même, à Saint-Pierre de Rome, par exemple, a su mieux respecter les plus vieilles traditions. La chaire de saint Pierre est une chaise curule, et reste au chevet, même sans forme absidale ; le maître-autel est on ne peut mieux placé sous le dôme, au milieu de la croix ; il a son ciborium de style moderne, et le choeur vient parfois former une couronne à l'entour. Nous sommes persuadé qu'à tous égards une pareille disposition conviendrait dans notre cathédrale, et qu'en revenant à la liturgie romaine, il est temps de revenir aux règles presque toujours suivies.

La tribune des orgues au fond d'un transept nous semble appeler une élégante tribune au fond de l'autre, et des deux côtés du maître-autel les sons et les voix se répondraient beaucoup mieux ; on ne ferait d'ailleurs que fixer une disposition qui de nos jours, souvent, fut jugée nécessaire. Thiers donne des traités sur les autels et les jubés ; il parle également des porches, et les registres du secrétariat de notre chapitre suffisent à prouver que jusqu'à la fin les règles de la discipline furent maintenues. En 1554, par exemple, ordre de chasser du portail de l'église les marchands qui vendaient, et de les chasser avec un fouet de cordes. Enfin, si notre église avait au XVIe siècle une très-riche parure dans le goût de la Renaissance, au XVIIe et même jusqu'en 1769, elle eut une décoration complète encore, dans un goût plus moderne. D'aveugles spoliateurs ont continué depuis l'oeuvre des Calvinistes ; au milieu de nos tristes énervements, on a tenté des restaurations très-mesquines. On fait table rase maintenant, et l'on prépare la place au siècle à venir.

Source : Notre-Dame du Mans par Auguste Voisin.

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 119817
  • item : Cathédrale Saint-Julien
  • Localisation :
    • Pays de la Loire
    • Sarthe
    • Le Mans
  • Code INSEE commune : 72181
  • Code postal de la commune : 72000
  • Ordre dans la liste : 6
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : cathédrale
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction :
    • Nous n'avons aucune informlation sur les périodes de constructions de cet édifice.
  • Date de protection : 1862 : classé MH
  • Date de versement : 1993/11/22

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : 18 04 1914 (J.O.)
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de l'état 1992
  • Détails : Cathédrale Saint-Julien : classement par liste de 1862
  • Référence Mérimée : PA00109800

photo : AIZAIR

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