photo : pierre bastien
Toulouges possède une église romane avec un portail à quatre colonnes , dont les chapiteaux représentent des monstres dévorant des hommes; les archivoltes sont rubanées et fleuronnées ; dans ce village se tint, en 1065, un important concile provincial, réuni pour établir les bases des trêves de Dieu rendues indispensables par les luttes perpétuelles des seigneurs du pays. (source : Bulletin monumental)
Ce village est bâti dans une contrée fertile et bien cultivée, sillonnée de ruisseaux d'irrigation qui rendent son sol très-fécond en menus grains et en prairies artificielles.
M. Fraisse aîné, connu par son zèle éclairé, a fait ouvrir, dans une de ses propriétés dépendantes de cette commune, un puits artésien, le premier qu'on ait tenté dans le département des Pyrénées-Orientales ; sa profondeur est de 41 mètres et donne 14 mètres cubes d'eau par vingt-quatre heures ; l'eau s'élève à un mètre au-dessus du sol. Il est remarquable que cette eau soit à la température constante de 17 degrés centigrades. La société royale et centrale d'agriculture a accordé à M. Fraisse le prix fondé pour la méthode artésienne appliquée aux besoins de l'agriculture.
En 1041 il se tint un concile ou assemblée générale de la province du Roussillon, dans les prairies de Toulouges, pour réprimer le désordre et la confusion qui régnaient alors également dans l'Église et dans l'État, dit dom Vaissette. Le mal venait principalement de la tyrannie des seigneurs qui vexaient impunément le clergé et le peuple, et qui s'étant arrogé le droit de venger leurs querelles par les armes, se faisaient une guerre implacable, en sorte qu'on ne trouvait nulle part ni sûreté ni asile ; le commerce était généralement interrompu et et l'on ne parlait dans tout le royaume que de meurtres, d'incendies, de rapines et de pillages.
Cette assemblée, composée de comtes et de vicomtes du pays, auxquels s'étaient joints les évêques et les abbés, était présidée par Gausfred, archevêque de Narbonne ; on y remarquait, entre autres seigneurs, Gausfred II, comte de Roussillon, Pons Ier, comte d'Ampurias ; Guillaume, comte de Besalu ; Raimond, comte de Cerdagne, etc.
Ce concile fut appelé de la Trêve de Dieu, et les règlements qu'on y fit devaient être observés par tous les chrétiens, pour interdire, sinon pour toujours, du moins pour certains temps et pendant certains jours de la semaine les guerres particulières et tout acte d'hostilité, sous peine d'excommunication. Un de ces règlements défendait d'attaquer son ennemi dans le Roussillon, depuis l'heure de none du samedi jusqu'à celle de prime du lundi. On y défendit de commettre aucune violence dans les églises où on n'avait pas élevé de château, dans les cimetières et autres lieux sacrés et a trente pas à la ronde, à peine d'être puni comme sacrilège ; d'attaquer les clercs qui marchaient sans armes, les religieux, les religieuses et les veuves ; de saisir les poulains au-dessous de six mois, les vaches, les ânes, etc. ; de brûler les maisons des paysans et des clercs qui portaient les armes. On ordonna que celui qui, dans les quinze jours, ne réparerait pas le dommage qu'il aurait causé en contrevenant aux règlements de l'assemblée, serait condamné à une double en faveur de l'évêque ou du comte qui ferait exécuter les décrets.
Source : Panorama pittoresque de la France par Firmin-Didot frères 1839.