port vendres

Port-Vendres, Portus Veneris, arrondissement et à 41 kilomètres à l'est de Céret, canton d'Argelès, est une place de guerre de quatrième classe peuplée de 4405 habitants, siège de vice-consulats étrangers.

« Il existe, sur les confins de notre territoire, un port qui pourrait être mis, à peu de frais, en état d'offrir Un asile sûr aux vaisseaux de premier rang, et à plus forte raison aux frégates à vapeur de première grandeur; c'est Port-Vendres. Placé dans la situation la plus heureuse, près des frontières d'Espagne, à l'extrémité du golfe de Lion, Port-Vendres offrirait, en cas de guerre maritime, une position militaire du plus haut intérêt, et qui serait particulièrement précieuse pour les navires à vapeur. Garantie par le voisinage des hautes terres contre les effets du vent de nord-ouest, qui tourmente si fréquemment le golfe de Lion, la navigation entre Port-Vendres et l'Algérie est toujours possible et comparativement facile. Elle est, en outre, plus courte de vingt lieues qu'en partant de Toulon; aussi ce port est-il ordinairement choisi comme point de départ pour les troupes qui sont dirigées de l'ouest et du midi de la France sur l'Algérie ou sur Oran. Il y a cent soixante dix ans, Vauban avait aperçu et faisait ressortir avec une vive énergie les avantages que cette position présentait pour la France, et son importance s'est singulièrement accrue dans ces derniers temps, par suite de la création de la navigation à vapeur. »

C'est ainsi que s'exprimait, à la tribune de la chambre des députes, en 1845, le rapporteur d'un projet de loi ayant pour but l'application d'une somme de 2,500,000 francs à des travaux de réparation et d'agrandissement pour Port-Vendres. La vérité de ces observations ne souleva aucune objection, et le crédit voté fut autorisé par une loi du 19 juillet de la même année. Nous ne pouvions présenter sous un jour plus complet l'intérêt qui s'attache a l'avenir de Port-Vendres. depuis que la vapeur et la possession de nos vastes colonies d'Afrique ont si considérablement modifié les destinées maritimes de la France. Le passé de Port-Vendres répond peu au rôle que l'avenir semble lui réserver. Les Romains, lorsqu'ils devinrent maîtres du pays des Sardones, élevèrent à Vénus Pyrénéenne un temple sur le promontoire Aphrodision, le cap Creus. Le port, creusé au pied de la montagne, prit aussi le nom de la déesse, et s'appela Port de Vénus, Portus Veneris; on suppose que le fanal, construit depuis, l'a été sur l'emplacement même de l'ancien temple. Aucuns souvenirs historiques n'indiquent que les Romains aient songé à tirer grand parti de la position de Port-Vendres ; la Province Narbonnaise venait seulement s'y approvisionner de poisson, d'huîtres et de coquillages. Les Wisigoths et les rois d'Aragon, jusqu'à Jayme Ier, laissèrent Port-Vendres dans le même oubli. Ce prince est le premier qui paraisse prendre quelque souci de cette précieuse possession, et encore semble-t-il qu'il n'ait eu d'autre but que d'arrêter les progrès de l'ensablement, la rente de cinq mille sous melgoriens qu'il affecta à l'entretien de Port-Vendres et de Collioure étant trop modique pour qu'on lui suppose une autre destination. Cet état de choses dura pendant la domination aragonaise. Sous les rois d'Espagne, les travaux d'entretien durent être plus sérieux, quoique l'histoire ne mentionne aucun fait important dont notre port ait été le théâtre; il est constant que les galères royales venaient s'y abriter. Toutefois, c'est au gouvernement français qu'il appartenait d'apprécier tout ce que la position de Port-Vendres offrait de ressources à la navigation périlleuse du golfe de Lion; Vauban est le premier qui envisagea tout ce qu'il y avait à faire; il ne craignit pas d'avancer que de la possession de ce point par l'Espagne ou par la France dépendait celle du Roussillon : il proposa en conséquence de le fortifier. Mais aucune suite ne fut donnée a ce projet, et, pour donner une idée des tristes résultats qu'avait produits cet abandon, nous citerons les lignes suivantes, écrites en 1778 par Expilly, dans son Dictionnaire géographique , à l'article Port-vendres : « On reconnaît le port à un gros écueil situé sur la gauche en entrant. On voit aussi sur la pointe de droite un fortin au milieu duquel on a élevé un fanal. Le mouillage ordinaire est depuis le fanal jusqu'en dedans des magasins; partout au fond du port, principalement sur la gauche, l'eau manque. Le plus profond est du côté droit. Communément on y trouve encore depuis deux jusqu'à quatre brasses d'eau. Les vents de nord-est y causent quelquefois une grosse mer; mais ceux du nord-ouest et du sud-ouest y sont très-rudes. Il n'y a, d'ailleurs, que cinq ou six maisons le long du bassin, entre une petite chapelle, où autrefois les galères d'Espagne faisaient dire la messe. » Tel était l'état de Port-Vendres lorsque le comte de Mailly reprit l'œuvre de Vauban. Il obtint quinze années d'exemption d'impôts pour ceux qui voudraient bâtir à Port-Vendres; les circonstances n'étaient pas favorables, la misère était grande partout, même en Roussillon ; le maréchal-gouverneur eut aussi la faiblesse de plus sacrifier au somptueux qu'à l'utile. Il fit construire de vastes quais, une place monumentale dominant le bassin du port ; dans le mur de soutènement, il fit creuser à grands frais une fontaine et élever au centre de la place un obélisque à la gloire du roi son maître avec attributs et inscriptions sculptés et dorés. Ce n'était pas là précisément le plus pressé ; aussi ces louables efforts eurent-ils peu d'influence sur les destinées de Port-Vendres.

La révolution survint; Port-Vendres fut livré, en 1793, aux Espagnols; il fallut un siège pour le leur reprendre. Voici comment l'amiral Grivel, témoin oculaire, rend compte de cet exploit de l'armée républicaine: « Le 28 floréal an II (17 mai 1794), la brèche faite au fort Saint-Elme étant très-avancée, l'ennemi tenta une sortie sur les onze heures du soir, et fut repoussé avec perte. Dugommier, qui manquait de grosse artillerie, réussit à pratiquer dans la montagne un chemin de deux lieues et demie, le long duquel ses soldats traînèrent à bras des canons de 24 et des mortiers de 12 pouces. Le 4 prairial, les Espagnols demandèrent à capituler; mais on ne s'entendit point sur les conditions, et le 7, ayant évacué le fort Saint-Elme, ainsi que tous les forts de Port-Vendres, ils se retirèrent dans Collioure, où ils furent étroitement bloqués par Dugommier. Le général Navarro n'hésita plus alors à capituler; la garnison, composée de sept mille hommes, livra aux républicains son artillerie et ses munitions, et s'engagea à ne plus servir contre la France pendant toute la duré de la guerre. » L'empire eut peu le loisir de s'occuper de nos ports. Pendant les quinze années de la restauration, on semble s'être préoccupé surtout de la réparation de l'obélisque élevé à la gloire de Louis XVI, et quelque peu dégradé pendant la révolution ; peut-être était-ce un moyen d'attirer les regards du gouvernement sur d'autres besoins plus urgents. Ce n'est qu'après la conquête d'Alger que l'attention publique se porte sérieusement sur Port-Vendres ; les mémoires, les enquêtes, les expériences faites, les réclamations des hommes les plus compétents aboutissent enfin au résultat que nous avons mentionné au commencement de cet article, à la loi du 19 juillet 1845; espérons qu'on ne s'arrêtera pas là.

En attendant les destinées plus glorieuses que l'avenir lui réserve sans doute, Port-Vendres alimente son commerce et entretient l'activité de ses matelots par une exportation plus considérable de jour en jour de vins, eaux-de-vie et céréales.

Le voyageur ne doit pas quitter la ville sans visiter le phare du cap Biar, et sans poisser, à travers les sites les plus pittoresques, au milieu d'une succession de points de vue plus grandioses et plus gracieux les uns que les autres, jusqu'au bourg de Banyuls-sur-mer, peuplé de 2,349 habitants, et célèbre par la défense qu'opposèrent aux Espagnols, en 1793, les habitants de cette héroïque commune.

Source : La France illustrée par Victor-Adolphe Malte-Brun 1865.

Place de l'Obélisque

Le comte de Mailly veut faire de Port-Vendres une ville nouvelle, il fait appel à Charles de Wailly, architecte du roi. Seul sera réalisé l'ensemble architectural dit place de l'Obélisque. En entrant dans la rade, le voyageur embrassait l'étagement de ces constructions en terrasses.