Château avec ses défenses, escarpes et contrescarpes

Collioure, appelée autrefois Caucoliberis ou Cauco-Illeberis, nom qui rappelle son origine ibérique, est dominée par le château (c'est ainsi qu'on désigne ordinairement la citadelle) situé au nord de la ville, sur un rocher escarpé, sans cesse battu par la mer, qui complète sa défense de ce côté. Cette ville est fort ancienne. C'est là que débarquèrent, en 537, les ambassadeurs envoyés à Ruscino par le Sénat romain pour engager le chef des Sardones à refuser le passage à Annibal. Plus tard, ruinée par les Normands, elle fut relevée par le comte Griffon, vers la fin du X^e siècle. Le maréchal de Brézé la prit en 1672. En 1793, les Espagnols, commandés par Ricardos, s'en emparèrent ; mais elle fut reprise l'année suivante par Dugommier en même temps que Port-Vendres.

La ville, le château et le port de Collioure, offrent assez l'aspect d'un petit port d'Italie. Collioure est une ville très-ancienne; elle est située au pied de hautes montagnes, à six lieues et demie de Perpignan.

Longtemps avant la domination des Romains dans les Gaules, sa destinée était associée à celle d'Illiberis ; il fallait un port à la ville celtique, pour commercer avec le rivage celtibérien, dont Strabon nous vante la civilisation avancée. Telle fut l'origine de Collioure. Cette origine probable n'est point contredite par les actes latins du moyen âge, qui mentionnent fréquemment Caucoliberis; plus tard, les historiens catalans, adoptant les transformations imposées par le peuple, ont écrit : Coplliure, Colliure et Coullioure ; en français, depuis Louis XIV, on prononce Collioure.

Le port de Collioure fut fréquenté par les flottes des Scipions, de Caton, de César et d'Auguste. Les Goths, lorsque la civilisation romane les eut subjugués, et après eux les Maures, cherchèrent à rendre profitable pour le commerce la possession de Collioure. Ce port fournit des galères à l'armée catalane, pour aller prendre Constantinople et fonder un royaume en Morée; aux rois d'Aragon, pour conquérir Majorque, et envahir la Sardaigne et la Sicile ; à don Pèdre III, pour repousser Philippe le Hardi ; souvent à Charles-Quint, pour dominer en Italie ; et à Philippe II, concurremment avec les ports d'Espagne, pour faire ses formidables expéditions.

L'antipape Pierre de Luna, Benoît XIII, se réfugia dans le château de Collioure, avec ses cardinaux avant d'aller chercher un dernier asile sur le rocher de Peniscola. Les galères de Collioure, qui faisaient partie des galères catalanes, avaient remonté le Niger, et visité toute la côte occidentale d'Afrique et les rivages de la mer Noire, avant le XIII^e siècle.

On trouve dans les anciens martyrologes que saint Vincent souffrit le martyre à Caucoliberis, en Septimanie, vers le commencement du IV^e siècle.

Lors de la révolte du duc Paul contre le roi Wamba, en 673, ce rebelle s'empara, entre autres places, de Collioure ; mais l'un des corps de l'armée royale s'avança ensuite, et, ayant soumis en passant le fort d'Olturas, entra dans Collioure, où deux des chefs des révoltés furent pris avec leurs femmes. Le château de Collioure est mentionné dans le contrat de mariage de Pierre, infant d'Aragon, avec Constance de Sicile, acte de l'année 1262. L'église paroissiale appartenait autrefois à l'ordre de Malte. Dans le faubourg était un couvent de dominicains. Les belles montagnes qui dominent ce petit port, son château, le Miradou, l'Étoile et le fort Saint-Elme, en font une ville très-pittoresque.

Vauban fortifia Collioure avec soin, et par un mémoire spécial appela l'attention de Louis XIV sur l'anse voisine de Port-Vendres, l'ancien Portus Veneris des Romains.

Source : Les Pyrénées par Isidore Justin Séverin Taylor 1843.