paris 8eme arrondissement

Les limites de cet arrondissement sont. le mur d'enceinte depuis la barrière de Menilmontant jusqu'à la barrière de la Rapée; le quai de la Rapée, la place Mazas, la rue Contrescarpe, la place de la Porte-St-Antoine, la rue St-Antoine No impairs jusqu'à la rue Culture-Ste-Catherine, la rue Culture-Ste-Catherine No pairs, la rue Neuve-Ste-Catherine No pairs, la rue des Francs-Bourgeois No pairs, la rue Vieille-du-Temple No pairs, la rue des Filles-du-Calvaire No pairs, la rue de Menilmontant jusqu'à la barrière de ce nom.

Quartiers du Marais

Ci-devant section des Fédérés.

Les limites de ce quartier sont : le boulevard des Filles-du-Calvaire et le boulevard Beaumarchais No impairs, la place de la Porte-St-Antoine No impairs, la rue St-Antoine No impairs, la rue Culture-Ste-Catherine No pairs, la rue Neuve-Ste-Catherine No pairs, la rue des Francs-Bourgeois No pairs, la rue Vicille-du-Temple et la rue des Filles-du-Calvaire No pairs jusqu'au boulevard. Superficie 420,000 m. carrés, équivalaut à 0,013 de la superficie totale de Paris.

Entre autres localités remarquables de ce quartier on cite:

L'église St-Denis, située rue St-Louis-au-Marais, No 50. C'est un édifice moderne, composé de trois nefs, élevé sur l'emplacement d'une église bâtie en 1684.

La place Royale, qui occupe l'emplacement de l'hôtel Des Tournelles, ainsi nommé à cause des petites tours ou tourelles qui l'environnaient. Cet hôtel fut construit vers 1391, par Pierre d'Orgemont, chancelier de France. Pierre d'Orgemont, son fils, le vendit en 1402 au duc de Berry, frère de Charles V. Plus tard, l'hôtel des Tournelles appartenait au roi Charles VI, et dans les capitulaires de Notre-Dame il est qualifié de maison royale des Tournelles. Le duc de Bedfort, régent pendant la minorité de Henri VI, prétendu roi de France, s'y logea vers 1442, l'agrandit et l'embellit au point que Charles VII et ses successeurs en préférèrent le séjour à celui de l'hôtel de St-Paul, qui était vis-à-vis. Charles VII en fit son séjour le plus ordinaire, et les beaux-arts, appelés par ce galant souverain, accoururent daus cette maison royale pour y orner des cabinets mystérieux, couvrir de sculptures ou de peintures voluptueuses les lambris et les plafonds. Une partie du palais des Tournelles s'appelait l'Hôtel du roi; Louis XI l'habitait lorsqu'il était à Paris. Louis XII y mourut pour avoir voulu prouver à la jeune Marie d'Angleterre, sa troisième femme, qu'on est jeune encore après cinquante ans ; mais jamais l'hôtel des Tournelles ne fut plus richement décoré, plus galamment habité que sous François Ier. Il était aussi riche et aussi vaste que l'hôtel de St-Paul; il renfermait plusieurs corps de bâtiments avec chapelles ; on y comptait douze galeries, deux parcs et sept jardins ; son enceinte s'étendait depuis la rue des Egouts jusqu'à la porte St-Antoine, et renfermait tout le terrain où l'on a bâti depuis les rues des Tournelles, Jean Beausire, des Minimes, du Foin, St-Gilles, St-Pierre, des Douze-Portes, et le commencement de la rue St-Louis jusqu'à la rue St-Anastase.

C'est près le palais des Tournelles, rue St-Antoine, que fut donné en 1559 un célèbre tournoi à l'occasion du mariage d'Elisabeth, fille de Henri II, avec Philippe II, roi d'Espagne, et de sa sœur Marguerite avec le duc de Savoie. Un vaste amphithéâtre, divisé en loges, avait été préparé pour les dames. Les quatre tenants étaient le roi Henri II, les ducs de Ferrare, de Guise et de Nemours. Les lices étaient ouvertes depuis deux jours, et le roi avait eu l'honneur de ces deux journées. Tout paraissait terminé, et déjà mille voix proclamaient Henri vainqueur, lorsque, apercevant Montgommery, il déclara qu'il voulait faire avec lui une dernière course en l'honneur des dames ; Montgommery refusa ; mais, sur les instances du roi, il fut contraint d'obéir. Les deux champions s'élancèrent des deux extrémités de la lice, et revinrent de toute la vitesse de leurs chevaux. Montgommery brisa sa lance dans le plastron, et le tronçon atteignit Henri à l'œil droit avec une telle violence qu'un éclat pénétra dans la tète. Le roi fut emporté mourant et expira le lendemain, après avoir pardonné à Montgommery. Celui-ci se retira en Angleterre. Catherine de Médicis le poursuivit à outrance, et le fit condamner à mort par le parlement, comme assassin du roi ; arrêt qui fut exécuté en effigie sur la place de Grève. Plus lard, Montgommery qui, de retour eu France, avait échappé par miracle au massacre de la St-Barthélemy, fut contraint de se rendre après une résistance désespérée, dans la ville de Domfront. Sur les instances de Catherine de Médicis, il fut condamné à mort, meurtri, disloqué par la torture, traîné dans un tomberean, et exécuté en place de Grève le 26 juin 1574.

C'est à l'entrée de la rue des Tournelles, du côté de la Bastille, où aboutissait alors leparc du palais des Tournelles, qu'eut lieu le 27 avril 1578, à cinq heures du matin, le fameux duel entre Quélus, Maugiron et Livarot, mignons de Henri III, contre d'Entragues, Ribérac et Schomberg: celui-ci et Maugiron n'avaient que dix-huit ans. Ils furent tués sur le lieu même; Ribérac mourut le lendemain; Livarot fut alité plus d'un mois; Quélus, qui avait reçu dix-neuf blessures, languit trente-trois jours, et mourut dans les bras du roi le 29 mai à l'hôtel de Boissy, devenu depuis le couvent des Filles de la Visitation de Ste-Marie, rue St-Antoine. Un duel, plus célébre encore par ses funèbres résultats, eut lieu sur la place Royale le 12 mai 1627. Trois combattants de chaque côté s'y rendirent à deux heures après midi : Montmorency-Bouteville, son écuyer et le comte Deschapelles, d'une part; de l'autre, M. de Beuvron, son écuyer et Bussy d'Amboise. Le combat fut long, vif et acharné : l'habileté était égale, le point d'honneur animait également les deux partis. Après les assauts les plus vigoureux, Bussy, atteint au-dessous de la mamelle droite, tomba sans connaissance aux pieds de Deschapelles, et mourut un quart d'heure après. Beuvron et son écuyer se sauvèrent en Angleterre ; Montmorency et Deschapelles prirent la poste pour se réfugier en Lorraine; ils furent rejoints à Vitry-le-Brûlé, ramenés à Paris, condamnés à mort et exécutés sur la place de Grève.

Quelques écrivains ont assigné la place Royale comme lieu de supplice du grand maître des templiers ; ce fait n'est point exact ; plusieurs chevaliers furent en effet brûlés sur cette place, mais l'exécution du grand maitre eut lieu à la pointe de l'île de la Cité, où est maintenant la place Dauphine.

Après la mort de Henri II, Catherine de Médicis abandonna le palais des Tournelles. En 1565 Charles IX ordonna au parlement de faire démolir ce palais , et de vendre l'emplacement pour y percer plusieurs rues ; mais cet ordre fut exécuté si lentement, que la démolition du palais n'était pas encore entièrement achevée à l'avènement de Henri IV. Ce monarque, ayant résolu d'établir en France une manufacture d'étoffes de soierie, fit venir environ deux cents ouvriers en soie, qu'if logea dans les restes des bâtiments du palais des Tournelles, dont la partie démolie avait été affectée au marché aux chevaux. Les entrepreneurs de cette manufacture, s'étant trouvés trop à l'étroit, remplacèrent en 1605 les bâtiments qui leur avaient été concédés par des constructions au centre desquelles s'élevait un pavillon magnifique, faisant face à une vaste place formée par la destruction du parc et du palais des Tournelles. La situation et l'effet de ce pavillon firent naître l'idée d'entourer la place de constructions semblables. Henri IV fit construire à ses dépens l'un des quatre cotés, qu'il veudit à des particuliers, et donna l'emplacement des trois autres côtés moyennant le payement d'un écu d'or de cens, à la charge d'y construire des bâtiments conformes aux plans que le roi avait fait exécuter. La place publique, entourée par ces bâtiments, reçut le nom de place Royale. Elle a été achevée sous la régence de Marie de Médicis, et forme un carré parfait de 144 m. de face, entouré d'une grille eu fer. Les constructions se composent de trente-cinq pavillons, dont deux, plus considérables que les autres, sont au centre des ailes principales. Henri IV voulut qu'on nommât pavillon Royal celui qui fait face à la rue St-Antoine, et pavillon de la Reine celui qui est en face de la rue des Minimes ; le reste des bâtiments forme de fort beaux hotels.

Sous le ministère du cardinal de Richelieu on éleva au centre de la place la statue équestre en bronze de Louis XIII, posée sur un piédestal en marbre blanc. La révolution, renversa la statue de ce monarque, « qui était, dit Tallemant des Réaux, bon confiturier, bon jardinier, rasait proprement, savait larder une longe de veau, composait en musique, peignait un peu, et faisait assez bien des châssis; » enfin, comme le porte son épitaphe :

Il eut cent vertus de valet, et pas une vertu de maître.

La place Royale changea alors de nom, reçut celui de place des Fédérés, et on y plaça un parc d'artillerie; un décret de la convention nationale du 4 juillet 1793 ajouta à ce nom celui de l'Indivisibilité, nom qu'un arrêté des consuls du 17 ventôse an VII changea en celui de place des Vosges. En 1814 la place Royale a repris sa première dénomination ; la statue de Louis XIII en marbre blanc a remplacé celle élevée par Richelieu. Aux quatre coins intérieurs sont quatre fontaines consistant en un bassin circulaire d'où s'élève un champignon portant deux vasques.

La place Royale a été pendant longtemps le quartier le plus fréquenté de Paris; c'était le centre des plaisirs, le lieu de réunion de toutes les jolies femmes, de tous les gens du bon ton. Aujourd'hui cette pauvre vieille place est comme les femmes que les galants abandonnent quand viennent les rides : elle est solitaire et délaissée. Ils sont passés ces jours où se pressaient dans ses allées, ducs, marquis et comtes pommadés et ambrés, coquets comme leurs jabots de dentelles, aux habits à broderies, se dandinant avec grâce et impudence, le chapeau à plumes sous le bras, et l'épée à la cuisse ; où se carraient joyeux petits abbés damerets en habit court à collet, à perruque blonde, odoriférants comme des cassolettes; où se pavanaient dames bien décolletées, en robes à paniers dont la longue queue de soie balayait la promenade, se cachant sous le masque de velours et agitant sous leurs doigts un élégant miroir. Ils sont passés ces jours où se croisaient gens de qualilé en riches chaises de couleurs tendres et aimoriées, et faquins crottés de Paris. Cela fait peine en se rappelant ce qu'elle a été, de voir cette place telle qu'elle est : ici un marchand de vin a enluminé trois on quatre arcades de sa couleur allégorique; là, une marchande à la toilette étale des draps, de vieilles et sales nappes ; ailleurs un savetier accroche des socques et d'ignobles bottes ; plus loin est un bureau d'écrivain public ; l'hotel Nicolai (No 9) est habité par un marchand de bois; l'hôtel Villedeuil (No 14) est occupé par la mairie; l'hôtel Richelieu (No 21 ) par un mercier, par un marchand de tabac, un avoué et un cabinet littéraire ; l'hôtel de Rohan (No 13) par un marchand de vin en gros; le pavillon du Roi (No 1) par un marchand de meubles et par un marchand de vin ; au No 10 est une filature de coton. A l'exception de l'hôtel de Breteuil (No 4), où habite le comte Portalis, et de l'hôtel Guémenée (No 6), acquis par M. Victor Hugo, tous les grands hôtels de cette place ont été dénaturés, et seront bientôt méconnaissables. Enfin, sar la place où Marie de Médicis donna un si beau tournoi, où Louis XIV donna de si brillants carrousels, errent silencieusement des malades, des vieillards, des infirmes et des bonnes d'enfants : sic transit gloria mundi!

Variétés historique et biographiques

Rue des Tournelles, No 32, habitait Nixon De L'enclos, qui mourut dans cette maison le 17 octobre 1706. A l'époque où Mme de Sévigné écrivait ses lettres charmantes, où Mme Dacier s'illustrait par ses savantes traductions, et Mme Lafayette par ses romans, Ninon soumettait à l'empire de ses charmes les cœurs et les esprits, subjugués à la fois par sa beauté et son amabilité. Son salon de la rue des Tournelles fut le rendez-vous non-seulement des grands hommes de son temps, mais encore des femmes les plus distinguées de la ville et de la cour, qui vinrent y prendre des leçons de l'art de plaire ; on sait que Mme de Maintenon y passa sa première jeunesse. Tant que la cour fut galante, Ninon et Paris ne furent que les émules de Versailles ; mais lorsque, accablé par les revers et dominé par l'influence de Mme de Maintenon, le monarque se fut fait dévot, Ninon redoubla d'esprit et de grâces pour empêcher la capitale de suivre l'exemple de la cour, et elle y réussit. Le salon de cette femme, célébre à plus d'un titre, offre au plafond des bas-reliefs et des corniches assez bien conservés. C'est dans ce salon que Molière lut son Tartufe, en présence de Racine, de Lafontaine, de Lulli, de St Evremont, de Chapelle. etc. ; et la pensée retrace la place qu'occupait chaque personnage admis dans ce séjour des grâces et des plaisirs ; là était le fameux duc d'Enghien, qui plus tard fut le grand Condé ; le bucolique des Iveteaux, la séduisante Marion de Lorme, et son amant le courageux et fidèle Cinq-Mars, etc., etc. On voit encore sur la cheminée, au-dessus du chiffre de Ninon, un groupe sculpté, représentant une femme écrivant sur des tablettes qu'elle appuie sur le Temps, et suspendant son travail pour se regarder dans un miroir que l'Amour lui présente.

Près de la maison qu'habitait Ninon demeurait et est mort en 1708, J.-H. Mansard, homme de génie auquel on doit les plans d'après lesquels ont été exécutés la place des Victoires, la place Vendôme, le dôme des Invalides, etc., etc.

Rue Culture-Ste-Catherine, No 23, au coin de la rue Neuve-Ste-Catherine, est l'hôtel De Carnavalet, construit en 1544 sur les dessins de Pierre Lescot, abbé de Clagny, par J. Bullant, pour Jacques de Ligueris, président au parlement de Paris, et décoré de sculptures par le célèbre Jean Goujon. C'est à son admirable ciseau que l'on doit à l'extérieur de la porte les deux gracieux enfants groupés dans un médaillon, dont l'un tient une palme, l'autre un rameau d'olivier, et qui supportent ensemble l'écusson armorié de l'hôtel. De chaque côté du médaillon, et dans l'arc du cintre, de magnifiques trophées, des casques, des épées, des cuirasses, achèvent l'ornement du fronton. Sur la clef de la voûte, une admirable figure ailée, dont les pieds reposent sur un masque, soutient d'une main la draperie de sa robe, de l'autre une corne d'abondance. Des deux côtés de la porte, deux bas-reliefs remarquables représentent des lions foulant aux pieds des armures. A l'intérieur, au cintre opposé de la voûte et dans la clef, une Renommée toute aérienne, tenant une trompette à la main, effleure de son pied un globe terrestre ; au-dessous d'elle, à droite et à gauche, deux figures ailées, d'une forme légère, à la robe flottante et diaphane, élégantes et sveltes, s'inclinent gracieusement et présentent des palmes triomphales. Au fond de la cour, Jean Goujon a sculpté les figures colossales des quatre Saisons, si admirables de relief et de vigueur. En 1578, l'hôtel de Ligneris devint la propriété du baron de Carnavalet, dont il a conservé le nom, et dans la famille duquel il resta pendant plus d'un siècle. C'est lui qui fit exécuter à l'extérieur de l'hôtel, sous la conduite d'Androuet du Cerceau, les deux figures qui décorent les trumeaux du premier étage touchant aux pavillons ; à droite la Force, à gauche la Vigilance, et à l'intérieur, sur la façade de l'aile gauche, et dans le style des quatre Saisons, les quatre Eléments. Fr. Mansard construisit pour M. d'Agaurry l'aile droite de l'hôtel, qu'il fit décorer des figures assez médiocres représentant Vénus, Diane, Hébé et Junon.

L'hôtel Carnavalet a été habité pendant sept ans par Mme de Sévigné. Le salon de cette femme célèbre et celui de Mme de Grignon sont encore intacts. On montre aussi le balcon du haut duquel la mère faisait, au jour du départ, un dernier signe d'adieu à sa fille ; le cabinet où fut tracée d'un style inimitable cette correspondance qui devait rester le modèle et le chef-d'œuvre du genre épistolaire. On a conservé la table de marbre sur laquelle la mère et la fille déjeunaient au jardin, dans l'intimité, sans étiquette, sous les sycomores, dont deux seulement ont survécu.

Après la révolution, l'hôtel Carnavalet reçut pendant quelques années les bureaux de la direction de la librairie. Plus tard, l'école des ponts et chaussées y fut établie sous la direction de M. de Prony ; il est aujourd'hui occupé par un institution de jeunes gens, dont le chef a publié en 1838 une notice intéressante sur cet hôtel.

Au même coin de rue où a été bâti l'hôtel Carnavalet, logeait du temps de Charles VI la belle Juive, dont son frère, le duc d'Orléans, était si épris, et à la porte de laquelle fut assassiné en 1392 le connétable de Clisson, par Pierre de Craon ; meurtre fameux, si curieusement conté par nos anciens historiens. A deux pas de là, deux siècles plus tard, existait une autre maison du même genre, celle de la belle Romaine, courtisane la plus renommée du temps de Henri II, et maitresse du duc de Guise, archevêque, cardinal, l'homme le plus vicieux et le plus hardi de son temps, qui faillit être assassiné par des rufiens en sortant au point du jour de chez cette fille de joie.

Aux No 25 et 27 était le couvent des Annonciades célestes ou filles bleues fondé en 1622, et suprimé en 1790. Le maître-autel de l'église était décoré d'une magnifique Annonciation, peinte par le Poussin.

C'est dans la rue des Coutures-St-Gervais qu'était l'hôtel du comte de Melun, qui acquit en 1728 une odieuse célébrité par le rapt de mesdemoiselles Camargo, célébres danseuses de l'Opéra, dont l'ainée avait été recherchée avec passion par les plus grands seigneurs de l'époque. Le comte de Melun, n'ayant pu la déterminer à répondre à sa passion, s'introduisit chez elle dans la nuit du 10 ou du 11 mai 1728, l'enleva ainsi que sa sœur, et les retint par force dans son hôtel jusqu'à ce qu'elles aient répondu à ses infâmes désirs ; l'ainée n'avait que dix huit ans, et la plus jeune seize ans.

Rue St-Claude, No 30, habita longtemps le célèbre Cigliostro. Son appartement est resté décoré comme il l'avait fait jusqu'en 1810. C'est à cette époque seulement que le mobilier fut vendu à domicile par le ministère d'un commissaire-priseur. Tous les effets de l'optique et de l'acoustique y étaient ménagés avec un art merveilleux, et c'était à l'aide de ce double artifice qu'il faisait apparaître les ombres de certains personnages, qu'il faisait ses évocations, qu'il portait dans l'esprit des spectateurs la terreur ou la joie. Tous les prestiges de l'art étaient mis enjeu, et de nombreux compères le secondaient à merveille. Cagliostro était un homme d'esprit, qui a fait pendant longtemps un ample usage de la crédulité des sots. Le cardinal de Rohan était le plus crédule de ses adeptes.

C'est aussi dans la rue St-Claude que demeurait la comtesse de la Motte, si scandaleusement célèbre par l'affaire du collier.

Rue deThorigny, No 11, et rue des Coutures-St-Gervais, No 1, est l'hotel de Juigné qui disputait jadis à l'hôtel Lambert l'admiration des Parisiens et des étrangers, et qui était sans contredit l'un des plus beaux hotels de Paris. Cet hotel a été bâti par le riche traitant Aubert, dont le sel avait fait la fortune, ce qui avait fait donner à son hotel le nom d'hôtel salé. Plus tard, il fut acquis par Lecamus, secrétaire du roi, mort en 1688 à l'âge de quatre-vingts ans, qui avait donné son nom à cet hôtel ; il était venu à Paris avec vingt livres, et partagea neuf millions à ses enfants après s'être gardé quarante mille livres de rente. L'hôtel Lecamus passa ensuite à la maison de Juigné dont il a conservé le nom ; il a été pillé à l'époque de la révolution, et toutes les peintures ont été effacées. On y entre par une grande cour dont les bâtiments sont ornés de pilastres corinthiens ; l'escalier est d'une rare magnificence. Le maréchal de Villeroy a longtemps demeuré dans cet hôtel, qui était occupé naguère par l'école des arts et manufactures.

La rue Barbette doit son nom à une belle maison de plaisance qui appartenait au commencement du XIIe siècle à la famille Barbette, célèbre sous le règne de Philippe le Bel. Cette maison de plaisance se trouvait au milieu d'un vaste emplacement nommé depuis la Courlille-Barbette, situé entre la rue Culture-Ste-Catherine et la rue du Temple, et tenant d'un côté à la porte Barbette, près des Blancs-Manteaux, et de l'autre à des égouts nommés les égouts de la Courlille-Barbette. L'hôtel Barbette qui avait appartenu en 1298 à Etienne Barbette, voyer de Paris, maître de la monnaie et prévôt des marchands, fut ruiné par le peuple dans une émeute en 1306. Sur son emplacement Charles VI fit construire une maison de plaisance qui porta le nom d'hôtel Notre-Dame et de petit Séjour de la reine. Ce fut dans cet hôtel que la reine Isabeau de Bavière accoucha en 1407, et ce fut dans une maison voisine que se tinrent cachés pendant dix jours les meurtriers qui assassinèrent le duc d'Orléans le 23 novembre 1407, au moment où il sortait de chez la reine.

Diane de Poiliers, duchesse de Valentinois, demeurait à l'hôtel Barbette. Les duchesses d'Aumale et de Bouillon, ses filles, le vendirent à différents particuliers, qui le firent démolir; c'est sur son emplacement qu'ont été percées les rues des Trois-Pavillons, du Parc-Royal et la rue Barbette, où est une succursale de la maison d'éducation des filles de la Légion d'honneur. Dans l'espace qui sépare la rue Barbette de la rue des Francs-Bourgeois, rue Vieille-du-Temple, ou remarquait en 1789 un reste de porte de l'ancien hôtel Barbette. Une des jolies tourelles du vieux bâtiment subsiste encore aujourd'hui au coin de la rue des Francs-Bourgeois.

C'est en face de l'hôtel Barbette qu'était la maison de Jean Ferrou. époux de La Relle Ferronière, maîtresse de François Ier Jean Ferron, dont la maison était encore debout il y a quelques années, avant qu'on eût élargi la rue Barbette, animé contre sa femme et contre le roi d'une horrible vengeance, s'infecta volontairement d'une maladie honteuse qui causait alors une mort presque inévitable ; le venin de cette maladie coula bientôt dans les veines de sa jeune et belle compagne, et atteignit ainsi le roi, qui, malgré tous les soins, tous les efforts, en mourut en 1547. On voyait autrefois le tombeau de la Ferronière dans le couvent de St-Maur.

Rue des Minimes, No 6, était le Couvent Des Minimes, dont une partie est aujourd'hui occupée par une caserne d'infanterie. Dès l'an 1493, les minimes avaient à Chaillot une maison qu'ils tenaient de la libéralité d'Anne de Bretagne. En 1611, Marie de Médicis fit bâtir pour ces religieux un monastère et une église sur une partie des jardins du palais des Tournelles et de l'ancien hôtel de Vitri. L'église fut richement décorée en marbre précieux et en beaux tableaux. On y remarquait les mausolées, les statues, les cénotaphes et les épitaphes de la famille Colbert; de Charles de Viéville, de la duchesse d'Angouléme, fille naturelle de Henri II et d'une Piémontaise ; de Charles de Valois, duc d'Angouléme, fils naturel de Charles IX et de Marie Tonchet; de Jean de Lannoy, savant docteur en théologie; du président le Jay: d'Abel de Ste-Marthe, bibliothécaire du roi.

Rue St-Antoine, impasse Guémeuée, demeurait la célébre Marion de Lorme. C'était, dit Tallemant des Réaux, une belle personne, d'une grande mine, qui chantait bien, jouait bien du théorbe, et faisait tout de bonne grâce ; si elle eut voulu se marier, elle eût eu vingt-cinq mille éfus en mariage ; mais elle ne le voulut pas ; elle était magnifique, dépensière et naturellement lascive. Elle avouait qu'elle avait eu inclination pour sept ou huit hommes et non davantage : des Barreaux, qui fut le premier, Rouville, Miosseul, à qui elle écrivit par une fantaisie qui lui prit de coucher avec lui, Arnand, Cinq-Mars, de Châtillou et de Brissac. Elle mourut au mois de juin 1650 à l'âge de trente-neuf ans, dans tout l'éclat de sa beauté, d'une forte dose d'antimoine qu'elle avait prise pour se faire avorter et qui la tua. Soret, dans sa Muse historique, du 30 juin 1650, fait mention de sa mort en ces termes :

La pauvre Marion de Lorme, De si rare et plaisante forme, A laissé ravir au tombeau son corps si charmant et si beau.

On la vit morte durant vingt-quatre heures, sur son lit, avec une couronne de pucelle. Enfin le curé de St-Gervais dit que cela était ridicule. Ainsi se trouve détruit l'absurde roman qui prolonge l'existence de Marion de Lorme jusqu'à l'âge de cent trente-quatre ans, et la fait mourir à Paris sur la paroisse St-Paul en 1741.

Rue St-Antoine, au coin de la rue de l'Egout, est le marché Ste-Catherine, qui occupe l'emplacement où était le monastère des chanoines de Ste-catherixe Du Val-des-ecoliers, fondé en 1301, et considéré plus tard comme le collège de tout l'ordre du Val-des-Ecoliers. C'est devant l'église de ce monastère où l'on voyait les tombeaux du chancelier d'Orgemont, du chancelier Réné de Biragues, et celui de J. Ligneris, que furent exposés, en 1358, les corps d'Etienne Marcel, prévôt des marchands, et de cinquante-quatre de ses complices, tués près de la première porte de la Bastille.

Impasse Guémenée, No4 et 8, était la communauté des filles de la Croix, fondée en 1640, supprimée en 1790, et occupée aujourd'hui par un établissement industriel.

L'impasse des Hospitalières doit son nom à un couvent de religieuses fondé eu 1624 pour le soulagement des pauvres filles et femmes malades, qui fut supprimé en 1792 et converti en filature de coton, établie en faveur des indigents.

Rue Neuve-Menilmontant, et boulevard des Filles-du-calvaire était le couvent de ce nom, fondé en 1635 et supprimé en 1790.

Vers la fin du siècle dernier, un nommé Guyard, neveu du célèbre Fonrcroy, ami des arts et des artistes, fit bâtir sur une partie des débris des bâtiments de ce couvent un théâtre à qui l'on donna le nom de Boudoir des Muses. La salle fut pourvue de décorations, d'accessoires, et servit d'abord à donner des représentations bourgeoises. Plus tard, des comédiens furent engagés, on y joua la haute comédie, l'opéra, le vaudeville, et le Boudoir des Muses devint le théâtre de la rue Vieille-du-Temple. Ce théâtre fut supprimé en 1807, et démoli quelque temps après.

Rue St-Louis au Marais, No 48 et 50, était l'hôtel De Turenne, vendu en 1694 par le cardinal de Bouillon. Il est occupé aujourd'hui par une congrégation de dames franciscaines, qui y ont fait bâtir une église livrée au culte en 1835, sons le vocable de St-Denis du St-Sacrement.

Tout l'emplacement qui se trouve à l'extrémité de la rue St-Louis et qui avoisine le Temple était au commencement du XVIIe siècle un vaste marécage, que Henri IV eut le projet de convertir en 1608 en une grande et magnifique place, qui devait porter le nom de place de France, et à laquelle devaient aboutir plusieurs rues portant les noms des principales provinces du royaume. La mort prématurée du roi vint renverser ce beau projet. Cependant, en 1626, quelques-unes des rues qui avaient déjà reçu heur alignement furent assez promptement bordées de maisons et reçurent les noms qu'elles portent encore aujourd'hui. Telles sont les rues de Bourgogne, d'Orléans, de Berry, de Touraine, de Limoges, d'Angoumois, de la Marche, de Beaujolais, de Beance, etc.

Au No 9 était l'hotel De Joyeuse.

La rue des Trois-Pavillons portait autrefois le nom de Diane de Poitiers. Après la mort de Henri II, Diane de Poitiers ayant été exilée à Anet, son nom fut effacé de cette rue à laquelle on donna celui des Trois Pavillons, qu'elle dut à une maison située à l'angle de cette rue et de celle des Francs-Bourgeois, et qui se faisait remarquer par trois pavillons.

Impasse de la Poissonnerie On voit une jolie fontaine, qui se compose d'une façadedont le milieu, en avant-corps, est orné de pilastres par devant, en retour, supportant un fronton triangulaire, derrière lequel s'éléve une petite coupole qui se termine par un bout de pyramide. Le mur qui sert de fond à cet avant-corps ne dépasse point la hauteur du fronton, et chaque côté est percé d'une porte. Des dauphins, des rosaces et des congélations décorent les différentes parties de cette jolie fontaine.

Quartier Popincourt

Ci-devant section Popincourt.

Les limites de ce quartier sont : le mur d'enceinte de la barrière de Menilmontant à la barrière deFontarabie, la rue Charonne No impairs, la rue Louis-Philippe et la rue d'Aval No impairs, le boulevard Beaumarchais et le boulevard des Filles-du-Calvaire No impairs, la rue de Menilmontant jusqu'à la barrière de ce nom. Superficie 1,890,000 m. carrés, équivalant à 0,057 de la superficie totale de Paris.

On remarque dans ce quartier:

L'église St-Ambroise, située rue de Popincourt, au coin de la rue St-Ambroise. C'est un édifice assez vaste et solidement construit, dont le portail pyramidal produit un effet agréable. Elle servait autrefois de chapelle aux religieuses de l'Annonciade du St-Esprit, qui vinrent s'établir rue de Popincourt en 1636, et dont le couvent fut bâti sur l'emplacement d'une maison de plaisance que possédait eu ce lieu, vers 1403, Jean de Popincourt, premier président du parlement de Paris sous Charles VI. Sous Charles IX, cette maison fut affectée à un temple de calvinistes que le connétable de Montmorency pilla et brûla le 31 décembre 1561. Les annonciades furent sécularisées en 1782, et leur couvent converti en une grande caserne qu'occupaieut les gardes françaises au commencement de la révolution. La chapelle de ce couvent, vendue comme bien national en l'an II, a été rachetée en 1811 par la ville de Paris, restaurée et considérablement agrandie en 1818.

La prison de la Roquette, située rue de la Roquette, No 112. Cette prison a été construite pour remplacer la prison de Bicêtre, qui n'est plus occupée que par des vieillards et des fous. Elle a été achevée en 1836, et a coûté environ un million trois cent mille francs. Cette prison a été bâtie avec un luxe de précautions qui n'a rien d'affecté et qui rendent les évasions, sinon impossibles par les moyens ordinaires, tout au moins extrèmement difficiles. Trois grilles de fer et quatre portes eu chêne séparent la rue de la Roquette du grand préau de la prison. Ce préau est vaste ; des bancs de pierre l'entourent de trois côtés ; au milieu, sur une légère éminence est une fontaine à réservoir, et, tout auprès un bel arbre en fer pour le réverbère. Des bâtiments à trois étages encadrent le préau au nord, à l'est et à l'ouest ; au sud est la chapelle de la prison. Le bâtiment du nord est occupé par l'administration ; ceux de l'est et de l'ouest par les ateliers et les cellules des détenus. Au rez-de-chaussée du premier sont les tailleurs, les cordonniers et les chaussonniers ou natteurs ; au rez-de-chaussée du second sont les ébénistes, les semeleurs et les serruriers. Les cachots occupent le rezde-chaussée, daus le quartier de l'infirmerie.

La prison des jeunes détenus, située rue de la Roquette, No 111. Cette prison ressemble à un château fort, avec ses quatre tours aux angles et sa chapelle au milieu. Sa construction date de 1837 ; elle a coûté plus de deux millions à la ville de Paris.

Variétés historique et biographiques

Rue de Charonne, No 95, était le couvent des religieuses de Notre-Dame De Bon-secours fondé en 1648 et supprimé en 1790. Avant la révolution, ce monastère était l'asile de quantité de jolies femmes séparées de leurs maris, et le centre de la galanterie. Sous l'empire, le célèbre manufacturier Richard Lenoir établit dans les bâtiments de ce couvent une immense filature de coton et des ateliers de tissage qui firent la prospérité du quartier St-Antoine jusqu'à l'époque de la rentrée des Bourbons. La baisse, subite qui eut lieu sur les cotons à cette époque occasionna à Richard Lenoir une perte de plusieurs millions.

Rue de Popincourt, il y avait, vers 1770, un théâtre particulier fréquenté par la meilleure compagnie de Paris, en femmes comme en hommes, et dont tous les sociétaires étaient des jeunes gens appartenant à la haute noblesse et très-riches. Cette réunion était une véritable assemblée de famille. Les comtes de Sabran, de Gouffier, de Lomesuil, etc., etc., la jeune marquise de Folville et sa sœur, etc., etc., y développaient des talents qui, véritablement, auraient été applaudis au Théâtre-Français. C'est sur ce théâtre qu'Albony, qui devint ensuite célébre sous le nom de Dazincourt, débuta dans le Crispin des Folies amoureuses, role dans lequel il mérita les applandissements qui lui ont depuis été prodigués avec justice.

Rue Charonne, à l'hotel Mortagne, habitait le célébre Vaucanson. Le roi, à qui il avait légué les pièces de mécaniques de son invention qui composaient son cabinet, fit l'acquisition de l'hotel de Mortagne, où tous ces objets étaient rassemblés, pour en faire un conservatoire public des arts et métiers, dont l'hotel Mortagne est aujourd'hui une dépendance.

Rue de la Roquette habitait Réaumur, dans un hôtel bâti sur les dessins d'Ulin.

Rue des Amandiers-Pop incourt, No 12, habitait et est mort Parmentier en 1813.

Quartier du faubourg St-Antoine

Ci-devant section de Montreuil.

Les limites de ce quartier sont : la rue d'Aval, et la rue Louis-Philippe nTM pairs, la rue de Charonne No pairs, le mur d'enceinte depuis la barrière de Fontarabie jusqu'à la barrière du Troue, la rue du Faubourg St-Antoine No impairs, la place de la Bastille No impairs, le boulevard Beaumarchais No pairs jusqu'à la rue d'Aval. Superficie 1,040,000 m. carrés équivalant à 0,032 de la superficie totale de Paris.

On remarque dans ce quartier:

L'église Ste-Marguerite, située rue St-Bernard-St-Antoine, No 28 et 30. C'était en 1625 est une petite chapelle, qui devint succursale en 1634, et paroissiale eu 1712. L'église se trouvant insuffisante par l'accroissement de la population du faubourg St-Antoine, on construisit en 1765 une chapelle contigue, élevée sur les dessins de Louis. Deux arcades forment l'entrée, et présentent entre elles le portrait en médaillon du célébre mécanicien Vancanson, mort en 1782.

Le principal ornement de cette église est la belle Descente de croix sculptée, sur les dessins de Girardon, par le Lorrain et Nourisson, ses éléves. Ce morceau capital, placé derrière le maitre-autel, était autrefois dans l'église de St-Landry. Au pied de la croix, la sainte Vierge coutemple, dans la douleur, le corps de Jésus descendu de cette croix. Deux auges sont auprès de la tête du Christ ; deux autres, dans les airs, viennent considérer le Sauveur ; un cinquième ange est au pied de la croix.

L'intérieur de l'église est décoré de peintures à fresque, exécutées par Brunetti ; elles représentent des ordonnances de colonnes, des bas-reliefs et des inscriptions relatives au caractère sépulcral de cette chapelle. L'autel est en forme de tombeau antique ; derrière est un grand tableau, représentant le Purgatoire, peint par Briard : tout dans cette chapelle porte un caractère sombre et lugubre.

C'est dans la fosse commune du cimetière Ste-Marguerite, que fut enterré le fils de Louis XVI, mort le 8 juin 1795, à l'âge de dix ans et deux mois. Le roi Louis XVIII, son oncle, fit en vain rechercher en 1815 les restes de ce rejeton royal, à la mémoire duquel un monument expiatoire fut voté en 1816 par les deux chambres, sur la demande de M. de Châteaubriand.

La place de la porte St-Antoine ou de la Bastille. Cette place a été formée sur une partie de l'emplacement qu'occupaient les fossés de la Bastille et la porte St-Antoine. Elle servit aux exécutions du 21 prairial an II au 25 du même mois, époque où l'instrument de supplice fut transféré à la barrière du Trône, dite alors barrière renversée; quatre-vingt-dix-sept victimes y furent exécutées dans l'espace de cinq jours.

Le 10 juillet 1791, les restes mortels de Voltaire, transférés de l'abbaye de Sellières à Romilly, furent déposés à leur arrivée à Paris sur la place de la Bastille, au milieu d'un bosquet factice de myrtes, de roses et de lauriers. Le cercueil fut placé à l'endroit même qu'avait occupé la tour où fut la prison de Voltaire. Avec des pierres provenant de la démolition de cette forteresse, on avait formé un rocher sur le sommet et autour duquel on voyait diverses figures allégoriques et cette inscription:

Reçois en ce lieu ou t'enchaîna Le Despotisme, VOLTAIRE, Les hommages que te rend la patrie

Le lendemain, 11 juillet, le corps de Voltaire fut enlevé à deux heures après midi, et transféré avec solennité au Panthéon, en suivant les boulevards. Arrivé en face de l'Opéra, qui occupait alors le théâtre de la Porte-St-Martin, le cortège s'arrêta devant cet édifice, dont la façade était décorée de festons, de guirlandes de feuillage, et de draperies retroussées par des guirlandes de fleurs. Sur un autel antique était le buste de Voltaire, au-dessous duquel ou lisait : Temple de la Gloire, et les titres des deux opéras Pandore et Samson, dont, il était l'auteur. Des acteurs en habits de caractère, vinrent déposer sur le buste des couronnes et chantèrent un hymne à sa gloire. Le même hommage fut rendu aux mânes de cet immortel écrivain par les acteurs de l'Odéon.

La Porte St-Antoine, construite sous Henri II afin de renfermer la forteresse de la Bastille dans Paris, avait été décorée de sculptures par Jean Goujon ; restaurée et agrandie en 1670, elle fut démolie en 1771 pour faciliter la circulation du quartier alors comme aujourd'hui l'un des plus populeux de Paris.

La colonne de Juillet s'éléve au centre de la place de la Bastille, sur l'emplacement où l'on eut le projet sous l'empire de construire la fontaine de l'Eléphant. Ce monument funéraire a été élevé par ordonnance royale du 6 juillet 1831, eu l'honneur des victimes des trois journées. La colonne a depuis sa base jusqu'au sommet 52 m. 33 c. de hauteur ; elle est toute en bronze, ainsi que l'escalier intérieur, formé de deux cent cinq marches. Le piédestal, dont le fond est couvert d'un rang de cannelures, est décoré sur ses quatre faces d'une manière différente : sur la face principale se détache en ronde bosse un lion placé sur un zodiaque, qui représente la force populaire et le signe astronomique de juillet ; au-dessus, sur une large table, on lit cette inscripiton gravée en creux et dorée:

A LA GLOIRE DES CITOYENS FRANÇAIS QUI S'ARMERENTt ET COMBATTIRENT POUR LA DÉPENSE DES LIBERTÉS PUBLIQUES, DANS LES MÉMORABLES JOURNÉES DES 27, 28 ET 29 JUILLET 1830.

Sur la surface postérieure figurent les armes de la ville de Paris, et sur une table paralléle à la précédente, cette inscription:

LOI DU 13 DÉCEMBRE 1830. Art. 15. Ce monument sera consacré à la mémoire des événements de Juillet.

LOI DU 9 MARS 1833. Art. 2. Ce monument sera érigé sur la place de la Bastille.

Les deux faces latérales, qui sont semblables, portent encadrées dons des guirlandes les dates des 27, 28, 29 juillet, sous lesquelles sout placées des couronnes de laurier et des palmes triomphales.

Les moulures du piédestal sout partout couvertes de riches ornements ciselés. Aux quatre angles sont placés des coqs gaulois.

Le fût de la colonne, partie uni, partie orné, est terminé par des cannelures eu haut et en bas ; des bracelets ornés séparent en trois parties l'espace intermédiaire ; ces bracelets, au nombre de quatre, sont ornés de têtes de lion, dont la gueule ouverte donne du jour et de l'air à l'intérieur ; entre les têtes sont des boncliers, portant en chiffres saillants et dorés les dates 27, 28, 29 juillet 1830 : le reste du bracelet est couvert d'un rinceau d'ornements ; chacune des trois parties unies, de 5 m. de hauteur, représentant une des journées, est divisée en six colonnes, comprenant vingt-huit noms : ce qui fait cent soixante-huit entre chaque bracelet et cinq cent quatre pour la totalité.

Le chapiteau, la plus grande pièce de fonte qui ait encore été coulée, pèse dix mille cinq cents kilogrammes à lui seul, et ses dimensions sont vraiment colossales, car il a, par le haut, 5 m. de face; sa hauteur est de 2 m. 70 c.; ses ornements consistent, par le bas, dans un rang de petites feuilles, surmonté d'une corbeille autour de laquelle s'élèvent quatre grandes feuilles formant les angles de la pièce ; de la corbeille sortent des caulicoles qui vont caresser et supporter le tailloir, ainsi que des palmettes qui s'élèvent à droite et à gauche d'une tête de lion double de nature qui forme la rosace du chapiteau ; par-dessus le tout, les pieds appuyés sur les feuilles du bas, et la tête sous la gueule du lion, quatre enfants, de 1 m. 50 c. de hauteur, soutiennent, sur leurs bras, des guirlandes de fruits et de fleurs. Le chapiteau est couronné d'une balustrade à jour. Sur le milieu s'élève une lanterne, surmontée d'une statue dorée représentant le Génie de la Liberté, ayant brisé les fers du despotisme, et portant par le monde le flambeau de la civilisation : sur sa tête brille une étoile.

La colonne de Juillet est élevée sur deux soubassements en marbre blanc; le premier est circulaire, et sur sa corniche unie se détachent vingt-quatre têtes de lion, dont la gueule ouverte sert à l'écoulement des eaux du ciel ; le deuxième, qui est carré et porté sur un socle en granit poli, est orné de moulures et de cadres au milieu desquels sont des médaillons de bronze représentant les attributs de la Justice, de la Charte, de la Force et de la Liberté : ceux des angles représentent des croix de Juillet. Autour de ces soubassements s'élève une grille en fonte de fer , ayant l'apparence d'une balustrade séparée en vingt-quatre parties par des pilastres et surmontée d'un rinceau représentant des fers de lance.

La porte qui conduit à la colonne donne aussi accès à une galerie circulaire dallée en marbre blanc parsemé d'étoiles et de croix noires ; cette galerie est éclairée par des grilles placées sur le premier soubassement et par des fenêtres garnies de vitraux colorés au travers desquels on aperçoit la grande voûte ogive du canal St-Martin.

Ce passage sert en quelque sorte de vestibule à deux caveaux funèbres, dans lesquels on arrive par quatre portes cintrées ; autour de ces portes en bronze découpé à jour, s'ajustent des pilastres et des corniches sculptées et surmontées chacune de trois couronnes de branches de chêne et de cyprès. Dans chaque caveau on a construit un vaste sarcophage de 14 m. de long sur 2 m. de large et 1 m. de profondeur, dans lequel sont déposés vingt-cinq cercueils contenant chacun les restes de douze des combattants.

Variétés historiques et biographiques

Le faubourg St-Antoine était autrefois un des endroits privilégiés de Paris, où les ouvriers et artisans pouvaient travailler pour leur compte, sans avoir été reçus maîtres dans les communautés des arts qu'ils exerçaient. Les autres lieux privilégiés étaient le cloître et le parvis Notre-Dame, la cour St-Benoit, l'enclos, St-Denis de la Châtre, celui de St-Germain des Prés, celui de St-Jean de Latrau, la rue de Lourcine, l'enclos St-Martin des Champs, la cour de la Trinité, la cour du Temple, les galeries du Louvre, l'hôtel des Gobelins, les maisons des peintres et sculpteurs de l'académie, les palais et hôtels des princes du sang, et les collèges de l'université.

Rue du Faubourg St-Antoine était une vaste maison occupée en 1788 par Réveillon, propriétaire d'une grande fabrique royale de papiers peints où travaillaient trois à quatre cents ouvriers. Lors des premières fermentations révolutionnaires, des ouvertures furent, dit-on, faites à ce fabricant pour l'engager à soulever le faubourg à l'aide de ses ouvriers. Ces offres ayant été rejetées, on jura de s'en venger et on tint parole. Le 28 avril 1789, sa maison fut envahie et livrée à un pillage général; les glaces, les meubles furent brisés, le linge, l'argenterie volés, les caves enfoncées, et lorsqu'on ne trouva plus rien à détruire ou à emporter, on mit le feu à la maison, qui fut en grande partie consumés par les flammes.

La rue du Faubourg St-Antoine figure avec gloire dans les fastes de la révolution de juillet. Le 28, la colonne de troupes composée d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie, après avoir balayé par la mitraille et la mousqueterie les boulevards, prit position sur la place St-Antoine. A midi les fusillades et les feux de peloton dirigés sur la rue du Faubourg St-Antoine commencent et se succèdent sans interruption ; le canon tonne de minute en minute ; les hommes tombent de part et d'autre. Les habitants non armés se retirent jusqu'au carrefour de Reuilly. Là les troupes reçoivent un renfort d'un bataillon et de deux pièces de canon venant de Vincennes. La fusillade fut vive un peu en avant de la rue de Charonne. Trois officiers supérieurs furent tués vis-à-vis la maison portant les No 78,80 et 82. Les artilleurs, exaspérés par la perte de ces officiers, firent de suite feu sur cette maison avec une batterie de douze et deux obusiers de vingt-quatre. Le premier coup de canon rasa au niveau des toits une grande mansarde : le second enleva le faîte d'une autre mansarde, et un troisième traversa un mur qui soutenait un gros corps de cheminées. Les obus enfoncèrent les toits, les plafonds, et causèrent dans les appartements, par leur explosion, un ravage épouvantable. Les maisons qui forment le coin où se trouve la fontaine sont restées criblées de balles, et il y eut beaucoup de victimes. La colonne n'alla pas plus loin. Elle ne tarda pas à revenir sur la place de la Bastille, d'où elle prit la route de la place de Grève par la rue St-Antoine. La fusillade et la canonnade recommencèrent vers les cinq heures clans la rue du Faubourg St-Antoine, et se prolongèrent pendant trois quarts d'heure ; beaucoup de citoyens furent tués ou blessés dans cette rue. A six heures, la colonne de troupe revint sur la place de la Bastille, d'où elle se porta sur les quais. Quelques compagnies du 50e et les lanciers furent envoyés pour défendre le pont d'Austerlitz contre les habitants du faubourg St-Marceau qui arrivaient ; l'infanterie et les lanciers cédèrent le passage ; les citoyens du faubourg St-Marceau firent leur jonction avec ceux du faubourg St-Antoine. Peu après, toutes les troupes sous les ordres du général St-Chamant passèrent le pont d'Austerlitz, suivirent les boulevards extérieurs et se rendirent aux Invalides et à l'Ecole militaire.

Rue de Montreuil était l'hôtel Titon Du Tillet, connu aussi sous le nom de Folie-Titon, où Titon du Tillet avait réuni une riche collection de tableaux des plus grands maîtres. Il y avait dans cet hôtel un théâtre dont on parla beaucoup dans son temps, et sur lequel on donna en 1762 une représentation d'Annette et Lubin.

Rue St-Bernard, No 26, était le couvent des Filles Ste-marguerite ou de Notre-dame Des Vertus, fondé dans cette rue en 1685 et supprimé en 1790.

Rue de Charonne, No 86, est l'entrée de la communauté des Filles De La Croix, fondée en 1641, supprimée en 1790 et rétablie en 1817. L'église renfermait le tombeau de Cirano de Bergerac, et de l'ingénieur militaire de Pagnan.

Au No 88 était la communauté de la Madeleine Du Tractel, établie en ce lieu en 1654, et supprimée en 1790.

Le boulevard Beaumarchais doit son nom au célèbre Beaumarchais, qui demeurait dans une maison d'une architecture alors sans modèle, si ce n'est en Italie, qu'il avait fait bâtir sur cette partie du boulevard qui se termine à la place de la Porte-St-Autoine. Cette maison, dont dépendait un vaste et beau jardin, a conservé jusqu'à ces derniers temps le nom de maison de Beaumarchais, qu'elle a transmis ensuite au boulevard ; elle a été démolie en 1818 pour faciliter l'ouverture du canal St-Martin. Sur le terrain restant, on construisit un grenier à sel qui a été démoli en 1841. Le pavillon du jardin n'a été entièrement démoli qu'en 1826. L'épaisse et solide construction des murs de clôture et de l'hôtel de celui qui disait si plaisamment : « Qui sait si le monde durera encore six semaines ? » promettait une durée séculaire; on a peine aujourd'hui à en reconnaître l'emplacement. Du côté du boulevard était la porte d'entrée, qui a longtemps porté cette insription:

Ce petit jardin fut planté L'an premier de la liberté.

Une large voûte souterraine, assez éclairée, conduisait de cette porte au milieu du jardin, et de là dans une cour à l'italienne, au centre de laquelle planait, sur un massif d'arbustes, une statue du Gladiateur combattant. Une statue de Voltaire, copiée sur celle du péristyle du Théâtre Français, décorait l'entrée des appartements ; la salle de concert était ronde et richement ornée. On descendait dans la salle à manger par un perron dont chaque marche était décorée d'arbustes fleuris. Le jardin était distribué avec tant d'art, que l'on ne s'apercevait point de sou peu d'étendue ; ou y trouvait sans confusion des grottes, des bosquets, des rocailles, un bassin de forme bizarre. Au milieu s'élevait une grande salle en forme de parallélogramme allongé, percée à ses extrémités de deux portes surmontées de deux bas-reliefs représentant, l'un Ganymède et l'autre Hébé. L'entrée du côté de la maison portait cette inscription:

Erexi templum à Bacchus Amicisque gourmmidibus.

A l'angle du jardin, du coté de la rue Amelot et de la rue qui porte aujourd'hui le nom de rue Louis-Philippe, était un pavillon de forme ronde, sur la porte d'entrée duquel on lisait:

A VOLTAIRE.Il ôte aux nations le bandeau de l'erreur.

L'intérieur était orné de vues de Ferney et des environs, peintes à fresque sur les murailles ; un balcon circulaire entourait ce pavillon, dont le faite était surmonté d'un petit globe sur lequel tournait une plume dorée. Beaumarchais, dont la vie active embrasse toute la fin du XVIIIe siècle, et dont les ouvrages représentent l'esprit de cette époque, mourut subitement, le 19 mai 1799, dans sa maison du boulevard, que sa veuve et sa fille ont habitée jusqu'à l'époque de sa destruction ; il fut de la première commune provisoire de Paris, où il ne siégea que quelques jours. Convaincu que l'esprit humain est né pour avancer, et que chacun ici-bas doit chercher à lui faire faire une part du chemin, il le poussa hardiment en avant, sans s'inquiéter de ce qu'en penseraient ceux qui marchent en arrière, ceux qui marchent de côté, et enfin ceux qui ne marchent pas du tout.

Quartier des quinze vingts

Ci-devant section du Quinze-Vingts.

Les limites de ce quartier sont : la place de la Bastille, la rue du Faubourg St-Antoine No pairs, le mur d'enceinte de la barrière du Trône à la barrière de la Rapée, le quai de la Rapée, la place Mazas, la rue Contrescarpe, qui forme la limite du quartier, mais qui est comprise dans le premier arrondissement. Superficie 2,760,000 m. carrés, équivalant à 0,081 de la superficie totale de Paris.

Les établissements les plus remarquables de ce quartier sont.

L'hôpital St-Antoine, situe rue du Faubourg St-Antoine , No 206 et 208. Il occupe une partie de l'emplacement qu'occupait l'abbaye St-Antoine, communauté fondée en 1198 pour des filles repenties, érigée en abbaye en 1204 et richement dotée par Louis VIII à l'occasion de la naissance de son fils (saint Louis). L'abbesse de ce monastère prenait le titre de dame du faubourg St-Antoine, et jouissait de tous les privilèges attachés à cette seigneurie.

L'abbaye St-Antoine était un lieu privilégié. L'enclos était entouré d'un fossé dans lequel Louis XI conclut, en 1463, une trêve avec les princes qui s'étaient armés contre lui pendant la guerre dite du bien public. Le roi prétendit que la trêve avait été violée, et, pour perpétuer le souvenir de cette félonie, fit élever à l'angle de la rue de Reuilly une croix en pierre, qui a depuis longtemps disparu, où on lisait cette inscription.

L'an M. Cccc. Lxv fut tenu ici le lanoit des trahisons et fut par une treves qui furent donnees, maudit soi il qui en fut cause !

Derrière l'abbaye St-Antoine furent brûlés cinquante-quatre templiers le 12 mai 1310. L'église de cette abbaye était richement décorée ; on y voyait plusieurs tombeaux, entre autres ceux de Jeanne et de Bonne de France, filles de Charles V. L'abbaye St-Antoine fut supprimée en 1790, et les bâtiments ont été, par un décret de la convention nationale du 17 juin 1795, convertis en un hôpital assimilé à celui de l'Hotel-Dieu.

L'hospice des Quinze-Vingts, situé rue de Charenton, No 38. Cet hospice, fondé, à ce que l'on présume, par saint Louis, pour trois cents aveugles, rue St-Honoré, au coin de la rue St-Nicaise, fut transféré en 1779 rue de Charenton, dans l'hotel anciennement occupé par les mousquetaires noirs, vaste bâtiment construit aux frais de la ville de Paris de 1699 à 1701. Quelque temps après cette époque, des modifications furent introduites dans le régime de cet établissement, et l'on fixa le nombre des pauvres aveugles à huit cents. Sous la république, l'hospice des Quinze-Vingts fut réorganisé sur de nouvelles bases, et reçut le nom de Maison des aveugles.

Un document curieux relatif à cet établissement est consigné dans le tome II des registres de la commune de Paris , p. 13,345, où on lit ce qui suit : « Séance du sextidi 26 brumaire, l'an II de la république française une et indivisible. L'administration des Quinze-Vingts apporte tous les objets de charlatanisme des prêtres, entre autres la fameuse chemise de saint Louis, qui se trouve n'ètre qu'une chemise de femme. Le conseil arrête que cette chemise sera brûlée sur-le-champ, et quant aux autres objets d'or et d'argent, le conseil arrête qu'ils seront envoyés à la monnaie. Mention civique est faite de la conduite de l'administration des Quinze-Vingts, et insertion aux affiches de la commune. "

L'hospice des Quinze-Vingts est aujourd'hui régi sous l'autorité du ministre du commerce et des travaux publics. Les aveugles admis dans l'établissement reçoivent en argent 375 fr. par an, en pain 68 fr. 50 c., en habillement 31 fr., soit 474 fr. 50 c. Les maris et femmes voyants des aveugles reçoivent annuellement 109 fr. 50 c, chaque enfant 15 c. par jour, ou 54 fr. 75 c. par an. Indépendamment des secours accordés aux membres de l'hospice, sept cents pensions ont été successivement créées en faveur d'aveugles externes des départements, savoir : cent pensions de 200 fr., deux cent cinquante de 150 fr. et trois cent cinquante de 100 fr.

L'hospice des Orphelins, situé rue du Faubourg St-Antoine, No 124 et 126. Il occupe l'ancien hôpital des Enfants-Trouvés, construit en 1669, dont l'établissement a été transféré, en 1800, rue d'Enfer, daus les bâtiments de l'institution de l'Oratoire, construits de 1650 à 1657. On ne reçoit dans cet établissement que des orphelins de deux à douze ans ; en 1842 il y est entré neuf cent soixante-trois enfants des deux sexes.

Le marché Beauveau, situé place de ce nom. Il a été établi eu 1777 sur une partie de l'enclos de l'abbaye St-Antoine, et concédé à la ville de Paris en 1811.

Variétés hostoriques et biographiques

Les rois de la première race avaient, rue de Reuilly, un palais où Dagobert Ier épousa Gomatrude, et où il la répudia pour épouser Nanthilde. Plus tard, ce palais fut remplacé par le gothique château de Reuilly, dont les ruines ont été longtemps affectées à une cour des miracles, rendez-vous des faux estropiés, des faux aveugles et d'une multitnde de mendiants. Sur l'emplacement de ce repaire (rue de Reuilly, No 24), Rivière Dufreny fonda, sous la protection de Colbert, une manufacture de glaces, dont les bâtiments sont aujourd'hui occupés par une caserne d'infanterie.

Au No 99 est la congrégation des Dames De Ste-Clotilde, maison d'éducation pour les jeunes filles du quartier.

Petite rue de Reuilly, No 12, était le couvent des filles de la Trinité, dites Mathurines, établi en ce lieu en 1613 et supprimé en 1790.

Rue Moreau, No 10, était le couvent des Filess Anglaises, établi dans cette rue, au coin de la rue de Charenton, en 1670, et supprimé en 1790.

Rue de la Planchette était l'hôtel Rambouillet, jolie maison de plaisance environnée de magnifiques jardins, créée en 1676 par le financier Rambouillet, d'une famille tout à fait distincte de la maison d'Angennes de Rambouillet. Du temps de Sauval, on appelait ce lieu le jardin de Reilly ou la Folie-Rambouillet. « Dans ce jardin , dit-il, se trouvent des allées de toutes figures et en quantité. Les unes forment des pattes d'oie, les autres des étoiles; quelques-unes sont bordées de palissades, d'autres d'arbres ; la principale, qui est d'une longueur extraordinaire, conduit à une terrasse élevée sur le bord de la Seine ; toutes ensemble forment un réduit si agréable, qu'on y vient en foule pour se divertir. Dans des jardins séparés se cultivent en toutes saisons un nombre infini de fruits si beaux et si excellents, que les plus grands seigneurs sont obligés de faire la cour au jardinier quand ils font de magnifiques festins ; et même le roi lui en envoie demander ». On voit encore, rue de Charenton, une porte d'entrée et les restes des pavillons qui marquaient les quatre angles de ce beau jardin, dont des marais bien cultivés ont pris la place. C'est à l'hôtel Rambouillet que se rendaient autrefois les ambassadeurs des puissances étrangères non catholiques le jour de leur entrée solennelle.

Rue de Picpus, No 37, était le couvent des pénitents réformés du tiers ordre de St-François, vulgairement appelé Picpus, fondé en 1601; l'église , dont Louis XIII posa la première pierre en 1611, renfermait les tombeaux du cardinal du Perron, du maréchal de Choiseul, du duc de Mortemart et de plusieurs autres grands personnages. Les bâtiments de ce monastère ont été vendus en 1790, et forment aujourd'hui une propriété particulière.

Aux No 15, 17 et 19, était la communauté des chauninesses de Notre-dame De La Victoire De Lépante, établie à Picpus en 1647, supprimée en 1790, et transformée en une filature de colon. Le cimetière de cette maison fut affecté pendant la terreur à la sépulture des victimes immolées sur l'échafaud révolutionnaire lorsqu'il fonctionnait sur la place de la Bastille et à la barrière du Trône. Sous l'empire, ce cimetière a été concédé aux parents de ces victimes, qui seuls ont Je droit d'y être inhumés : Mme de Lafayette, fille du duc d'Aven, y a été enterrée, et le général Lafayette y repose à côté de son épouse. Tous les ans on célèbre dans la chapelle de ce cimetière un service funèbre, où sont invités tous les parents connus des personnages qui out péri sur la place de la Bastille et à la barrière du Trône.

Au No 23 est la maison mère des dames de la congrégation de La Mère De Dieu, noviciat unique de cette congrégation et pensionnat de jeunes personnes.

Au No 15 est la congrégation des Dames Du Sacré-cœur de Jésus et de Marie.

Au No 8 est la Maison Hospitalière D'enghien, hospice fondé en 1819 par la duchesse de Bourbon (50 lits).

Au No 9 est la Congrégation Du Sauré-cœur de Jésus et de Marie, fondée en 1805. Elle tient au séminaire théologique, et envoie des missionnaires eu Belgique, dans l'Océanie, au Chili, etc.

Rue du Faubourg St-Antoine, No 232, demeurait, en 1791, le fameux brasseur Santerre. D'abord lieutenant dans la garde nationale parisienne, il devint, quelques années plus tard, commandant de cette même garde nationale, ce qui ne l'empêcha pas de continuer son état de brasseur. Il fut chargé pendant un moment du commandement de l'armée révolutionnaire, qu'on ne tarda pas à lui retirer pour le confier au général Ronsin, auteur dramatique et comédien au théâtre de l'Ambigu-Comique. C'est à tort qu'on a dit que Santerre commandait les troupes qui assistaient à l'exécution de Louis XVI ; elles étaient sous les ordres du comte d'Espagnac, qui ordonna le roulement au moment où Louis XVI entreprenait de parler au peuple. Santerre est mort vers 1809, dans le Faubourg St-Antoine. Son fils avait transféré son établissement rue Notre-Dame-des-Champs, No 7, ancien hôtel de Montmorency.

Métro station Europe

Accès à la station du métro, dessiné en 1900 par l'architecte Hector Guimard pour la Compagnie générale du Métropolitain de Paris. La station est située sur la ligne 3 du métro, inaugurée en 1904. L'arrêté de protection porte sur l'ensemble des réalisations subsistantes de Guimard pour le métro.

Petit Palais

Le petit palais, est construit pour l’Exposition Universelle de 1900, tout comme le Grand Palais situé juste en face. Par la suite il deviens un musée en 1902. Le Petit Palais est implanté sur l’avenue Winston Churchill qui forme une jonction entre les Champs-Élysées et la très célèbre esplanade des Invalides.

Eglise Saint-Philippe-du-Roule

L'église St-Philippe du Roule, située rue du Faubourg du Roule, N° 8 et 10. Cette église a été bâtie sur l'emplacement d'une chapelle qui dépendait autrefois de la maladrerie du Roule, et qui fut érigée en paroisse le 1er mai 1699, sous l'invocation de saint Jacques et de saint Philippe.

Hôpital Beaujon (ancien)

L'hôpital Beaujon, situé rue du Faubourg du Roule, N° 54. Il a été fondé en 1784 par le receveur général des finances de ce nom, pour vingt-quatre orphelins de la paroisse St-Philippe du Roule : douze garçons et douze filles, et six places étaient destinées aux enfants qui annonçaient d'heureuses dispositions pour le dessin.

Place de la Concorde

En 1747, Louis XV ayant accordé au prévôt et aux échevins de Paris l'autorisation de lui élever une statue équestre, on s'occupa de choisir un emplacement. Plus de soixante projets furent proposés ; enfin le roi désigna le vaste terrain, alors inculte et abandonné, qui fut depuis la place Louis XV.

Parc Monceau

Le jardin de Monceau, dit aussi de Monceaux, dont l'entrée se trouve au n° 4 de la rue de Chartres-du-Roule. Ce délicieux jardin a été créé en 1778 par le duc d'Orléans, père du roi Louis-Philippe Ier, alors duc de Chartres, sur l'emplacement d'un quartier qui portait le nom de Petite-Pologne.