photo : meauxjm
M. Charles Bazin, membre de la Société des Antiquaires de Picardie, écrit:
« Dans les caves qui ont survécu à l'ancien château du Mesnil-Saint-Firmin (Oise), démoli au milieu du siècle dernier, j'ai rencontré, inscrits sur les murailles, plusieurs noms et dates historiques dont j'ai pris l'estampage. Le nom du comte d'Estourmel, seigneur du lieu au seizième siècle, s'y trouve en deux endroits; une fois sans date, une autre fois avec la date 1530, écrite mi-partie en chiffres arabes et romains, ce qui la rend intéressante.
Une autre date historique (1536) se lit au bas d'un buste grossièrement tracé, quoique avec une certaine assurance. La date rappelle l'époque à laquelle Jean d'Estourmel fit venir de toutes ses terres, et en particulier de celle du Mesnil-Saint-Firmin, ses récoltes de grains pour ravitailler la ville de Péronne, assiégée par le comte de Nassau.
Un quatrième estampage présente les armes des Estourmel, la croix crételée. Elles sont escortées d'un nom qui m'est inconnu, de la date 1556, et d'une sentence qui n'indique pas dans son auteur un grand détachement des biens de ce monde (par or et par argent tout se fait). A cette époque (1556), Jean d'Estourmel remplissait la charge de trésorier général des provinces de Picardie et de Champagne, charge qui lui avait été concédée par François Ier, en récompense de sa vigoureuse résistance au siége de Péronne. Peut-être la sentence dont je viens de parler fait-elle allusion à cet emploi.
J'ajoute une dernière inscription que je n'ai pu lire. Si l'on a pleine confiance dans la date 1237 qui la précède, il faut reconnaître qu'elle présente un grand intérêt, en ce qu'elle est écrite en chiffres arabes. On sait, en effet, qu'il est fort rare de rencontrer les chiffres arabes à une époque aussi reculée. L'inscription est de nature à faire connaître, par la forme de ses caractères, si la date 1237 est véridique ou non. Dans un autre endroit des caves, cette même inscription se reproduit sous une forme un peu différente, et cette fois sans date. J'ai rapproché ces deux estampages, pour qu'il fût plus facile de les comparer entre eux. Il serait intéressant de savoir si ces signatures se rapportent, comme celles du seizième siècle, à la famille d'Estourmel, parce qu'il serait glorieux pour la commune du Mesnil-SaintFirmin d'avoir appartenu, déjà au treizième siècle, à une famille connue alors depuis longtemps par sa bravoure.
En effet, dès l'année 1099, un de ses membres atteignait le premier la crête des murs de Jérusalem. Il y gagnait ses armoiries, la croix crételée; sa devise, Vaillant sur la crête, et le surnom de Créton, que cette famille porta indifféremment avec celui d'Estourmel jusqu'au seizième siècle, époque à laquelle le dernier prévalut.
Pour en revenir à la date 1237, je dirai que les caves, par elles-mêmes, ne me paraissent pas devoir l'invalider ni la confirmer. Ces caves forment deux étages superposés et identiquement semblables. Elles s'étendent en longs couloirs, régulièrement construits et en moyen appareil, mais dépourvus de caractères architectoniques : sans arceaux aux voûtes, sans sculptures sur les murailles. »
Source : Bulletin archéologique, Volume 2 par France. Comité historique des arts et monuments en 1842.
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