jardin du cloître

Le Cloître, qui s'élève immédiatement au-dessus de la salle des Chevaliers. Le style architectonique de ce cloître n'est point encore le gothique en fleurs ou flamboyant, qui ne prit guère que vers la fin du quatorzième siècle, c'est-à-dire près de deux cents ans plus tard. Mais le gothique du quinzième siècle est plus maigre sans être beaucoup plus svelte et plus léger, et surtout sans être plus gracieux que celui des douzième et treizième.

Le cloître se compose d'une galerie quadrangulaire fermée par une triple rangée de colonnettes, isolées ou en faisceaux, et couronnées de voûtes ogiviques formées par des nervures d'une délicatesse exquise. Ces colonnettes sont, les unes en stuc fait avec des coquillages broyés, les autres en granit, en granitelle, en marbregranitelle, ou en tuf. Elles sont ornées de chapiteaux en trèfle, achante, chardon, chêne et lierre dont les combinaisons sont prodigieusement variées; puis les entre-ogives portent, une rosace dans le même style et d'une variété non moins merveilleuse. L'aire, ou la cour de ce cloître, qui repose presque tout entier, sur les voûtes souples et massives de la salle des Chevaliers, est à deux cents pieds au dessus du niveau de la grève. Elle sert maintenant à recevoir les eaux pluviales pour l'approvisionnement du château. Sur les galeries on a ménagé de petites cellules, où l'on renferme aujourd'hui ceux des détenus qu'on veut isoler.

On a replâtré, il y a peu d'années, ces logettes avec bien peu de goût et une inconcevable mesquinerie; mais les galeries sont bien conservées, surtout du côté du chapitre, c est à-dire au couchant. Je trouve sur le cloître le passage suivant dans le manuscrit de Dom Huynes:

« Je puis dire, sans hésiter, que ces cloistres qui sont soutenus et élevés sur la voûte de la deuxième salle, sont des plus agréables et aussi bien, quoyque petis, qu'il s'en puisse trouver en France. Dont le milieu est. en plomb pour conserver les voûtes sur lequel est un petit jardin de fleurs. »

Le cloître est d'un effet sublime , le soir à la clarté de la lune : vous croyez à chaque instant voir apparaître entre les colonnes un des moines enterrés dans les caveaux, et le ballet mystérieux de Robert-le-Diable serait plus saisissant et plus admirable encore au milieu de ces délicieuses galeries gothiques dont le vent de mer vient, sur la cime du rocher, ébranler les arceaux, et semble agiter les chapiteaux et les rosaces comme des feuilles , les nervures comme des branches, les colonnettes comme des troncs d'arbres.

Source : Histoire pittoresque du Mont-Saint-Michel Par Maximilien Raoul 1834