Château de Flamanville

Le château de Flamanville, l'un des monuments d'architecture les plus remarquables de notre contrée, a la grande tournure propre aux constructions du temps de Louis XIV, époque à laquelle il a été bâti.

Ce beau château fut érigé sur l'emplacement d'un antique manoir qui tombait en ruines ou qui ne convenait plus à son opulent possesseur. On ne connaît d'ailleurs ni l'origine ni la forme de la maison primitive des anciens seigneurs de Flamanville, qu'a remplacée la demeure princière d'aujourd'hui. En quel siècle et par qui fut-elle élevée ? on l'ignore absolument. Était-ce un château-fort ? c'est très probable, puisque tous les manoirs seigneuriaux étaient des forteresses sous la féodalité.

Mais avant de parler du château, du parc et de ses dépendances, exposons l'historique du domaine de Flamanville, sa fondation ayant nécessairement précédé l'érection du manoir.

historique du domaine

Le domaine de Flamanville, dont l'origine est inconnue, appartenait aux anciens souverains de Normandie. Il fut l'une des nombreuses propriétés territoriales que le duc Richard II donna, en l'an 1008, à sa femme Judith de Bretagne, pour lui servir de douaire. Il porte le nom de Flamenovilla dans la charte de cette donation matrimoniale.

Flamanville, Flamenovilla, est vraisemblablement un nom d'origine normande. Comme celle de tant d'autres localités de notre province, cette dénomination remonterait au partage de la Neustrie entre les chefs de ses conquérants, sous Rollon. Le mot villa fut joint au nom de l'homme d'armes qui en devint alors le possesseur: Flamenolt, dont on a fait Flamenovilla (villa de Flamenolt). Cette étymologie est, du reste, conforme à l'opinion communément adoptée pour un grand nombre d'autres dénominations locales analogues, c'est-à-dire se terminant en ville, qu'on rencontre partout dans la Normandie.

On ne sait en quel temps le domaine de Flamanville sortit des mains des souverains de la Normandie, ni comment il en sortit, ni à qui il passa d'abord. Un écuyer obscur, du nom de Robin Benois ou Benoît, en était possesseur lorsque l'abbaye de Blanchelande en fit l'acquisition; et celle-ci le vendit, au prix de 1,200 écus d'or, à Colin Bazan, par contrat du 7 mars 1406, passé devant Jehan Breton, garde du scel de la vicomte de Coutances, par Guillaume Tolissac, tabellion juré du siège de La Haye-du-Puits.

Voici la liste généalogique des seigneurs et châtelains de Flamanville depuis cette époque jusqu'à nos jours.

  • I. Colin Bazan, acquéreur du domaine ou fief de Flamanville, épousa, en 1373, Jeannette de Gatteville, fille unique et héritière de feu Jean, seigneur de Gatteville, et en eut deux fils, Robert et Nicolas.

    Colin Bazan et son frère Robert s'étant retirés dans le château de Cherbourg, sur l'ordre de Charles V, y furent faits prisonniers quand les Navarrois livrèrent cette place aux Anglais en 137S. et n'obtinrent leur liberté qu'en donnant caution.

    Lorsque les Anglais s'emparèrent de nouveau de Cherbourg en 1418, et firent acte de conquête dans la contrée, le domaine de Flamanville fut donné à deux des leurs, Gaultier Chalton et Thomas Clamorgam, qui l'exploitèrent pendant plus de 30 ans. Mais après la reprise de Cherbourg en 1450 et l'expulsion de l'ennemi de toute la Normandie, Charles VII réintégra les fils de Colin Bazan dans l'héritage de leur père. Par contrat de partage, en date du 16 mai 1451, Nicolas devint propriétaire du fief de Flamanville.
  • II. Nicolas Bazan, seigneur de Flamanville, fils de Colin, épousa Guillemette de Beuzeville, fille du seigneur de Beuzeville-sur-le-Vey, et en eut cinq fils, Richard, Guillaume, Jean, Robert et Colin. Richard fut tué au siège du château de Gavray, Guillaume fut tué en Angleterre, Jean mourut religieux.
  • III. Robert Bazan, seigneur de Flamanville, fils de Nicolas, épousa Marguerite de Hettehou, fille du seigneur du Saussey aux Pieux, et en eut deux fils, du nom de Jean.

    L'aîné hérita du fief de Flamanville, par acte de partage daté du 12 avril 1482.
  • IV. Jean Bazan, seigneur de Flamanville, fils de Robert, épousa Jeanne Le Marchand, fille du seigneur de Sotteville, et en eut trois fils, Thomas, Jean-Jacques et Pierre.
  • V. Thomas Bazan, seigneur de Flamanville, fils de Jean, et dont on ne connaît pas la femme, eut un fils du nom de Jean.
  • VI. Jean Bazan, seigneur de Flamanville, fils du précédent, épousa Jeanne du Tertre, fille du seigneur de Longueville, et en eut plusieurs enfants.
  • VII. Thomas Bazan, seigneur de Flamanville, fils aîné de Jean, épousa, en 1561, Jeanne Jallot de Beaumont, et en eut un fils dont le nom suit.
  • VIII. Guillaume Bazan, seigneur-baron de Flamanville, épousa, en 1596, Gabrielle de Renty, et en eut deux fils, Hervieu ou Hervé et Emile.

    Guillaume Bazan, qui possédait avec le domaine de Flamanville les seigneuries des Pieux et du Saussey, et avait le grade de capitaine de la côte, était l'un des personnages les plus considérables du Cotentin. Il fut nommé gentilhomme de la chambre du roi par brevet de Henri IV du 22 janvier 1605, et chevalier de l'ordre de Saint-Michel en 1613.

    C'est en faveur de Guillaume Bazan que la seigneurie de Flamanville fut érigée en BARONNIE par lettres-patentes de Louis XIII du mois d'août 1610.

    La charte de cette érection baronniale créa en même temps trois foires ou marchés « dans trois paroisses dudit seigneur baron: »
    • à Flamanville le jour de la Saint-Gilles;
    • 2 aux Pieux le jour de la Saint-Jean-Baptiste;
    • 3 à Grosville le jour de la SaintMartin d'été.


    Le roi le gratifia plus tard d'une compagnie dans le régiment de Piémont-infanterie; son fils Emile en eut le commandement.

    En 1635, Guillaume Bazan, alors âgé de 75 ans, obtint une sentence du bailli du Cotentin qui le déchargea du service de l'arrière-ban.

    Vers cette époque, il tua en duel le sieur de Vaudricourt. Le roi lui accorda pour ce fait des lettres de grâce datées du mois de juillet 1639.
  • IX. Hervieu ou Hervé Bazan, baron, puis marquis de Flamanville, fils de Guillaume, épousa en premières noces, en 1634, Jeanne d'Argouges de Rane, et en secondes noces, en 1652, Agnès Mole, fille du garde-des-sceaux. Il eut quatre fils, Jean-René, Charles-Mathieu, Jean-Hervé et Edouard-Nicolas: le premier succéda à son père dans son titre seigneurial, le second fut lieutenant des gendarmes du roi, le troisième mourut évêque de Perpignan, le quatrième devint commandeur de Malte.

    Hervé Bazan fut grand-bailli du Cotentin, charge qu'il acheta au prix de 25,000 livres, par acte passé au chatelet de Paris le 29 juillet 1643.

    Son mariage avec la fille du garde-des-sceaux Mathieu Molé le mit au comble de la faveur et de la fortune.

    La baronnie de Flamanville fui érigée en MARQUISAT au mois de mars 1654, par lettres-patentes de Louis XIV, qui lui reconnaissaient comme mouvances les fiefs de Tréauville, Siouville, les Pieux, Grosville, Prestreville et Ipesville. C'était une seigneurie de premier ordre.

    Aussitôt après l'érection de son domaine en marquisat, dès le printemps de l'année 1654, Hervé Bazan fit raser son vieux manoir et commencer la construction du château actuel de Flamanville. Le bâtiment seigneurial fut terminé en 1657, et toutes ses dépendances en 1660. Le marquis de Flamanville vint l'habiter au mois de mai 1658, et en fit l'inauguration par une fête splendide, à laquelle furent conviés tous les châtelains des environs, toutes les notabilités du Cotentin.

    Le premier enfant né dans ce nouveau château, où il reçut le jour le 16 février 1660, fut un des fils issus du mariage du marquis de Flamanville et d'Agnès Mole, Jean-Hervé Bazan, qui entra dans les ordres, fut d'abord prêtre à Cherbourg, puis vicaire-général à Chartres, et enfin nommé, en 1695, évêque de Perpignan. Il termina sa carrière toute de bienfaisance le 5 janvier 1721, après 25 ans d'épiscopat et une vie édifiante de bonnes œuvres. Lorsqu'il vint au monde, la chapelle du château n'était point encore consacrée au culte, et il fut baptisé dans l'ancienne église de Flamanville, aujourd'hui détruite.

    Hervé Bazan était un homme distingué par l'intelligence. Il mourut au commencement de l'année 1666.
  • X. Jean-rené Bazan, marquis de Flamanville, fils d'Hervé, épousa Marie-Anne Le Camus, fille du premier président de la cour des aides, et tante de ce premier président Le Camus qui prononça à Versailles, en 1745, une harangue au roi que Voltaire cite comme « un monument singulier de style. »

    Jean-René Bazan était mineur lorsqu'il hérita du marquisat de Flamanville. Dès qu'il eut atteint l'âge exigé, le roi lui accorda des lettres d'émancipation, datées du 4 avril 1672.

    Il embrassa la carrière des armes et parvint à une haute fortune militaire.

    En 1676, il acquit du comte de Lusignan, au prix de 80,000 livres, la charge de sous-lieutenant des gendarmes écossais, grade pour lequel il lui fut accordé, en 1678. une pension de 4,000 livres.

    En 1683, il acheta du comte de Broglie. au prix de 143,000 livres, la charge de capitaine-lieutenant des gendarmes de Bourgogne, et obtint une pension de 6,000 livres pour cette charge, qu'il revendit, en 1702, au comte de Lignière, moyennant 150,000 livres.

    Nommé brigadier de la cavalerie légère le 30 mars 1693, et maréchal-de-camp le 29 janvier 1702, le marquis Jean-René Bazan de Flamanville fut élevé au grade de lieutenant-général des armées du roi le 26 octobre 1704.

    Il mourut vers 1715, laissant pour héritier un fils qui était encore mineur en 1724, et dont le nom suit.
  • XI. Jean-jacques Bazan, marquis de Flamanville, épousa Françoise-Bonaventure de Mauconvenant. Il en eut un fis, Jean-Thomas, qui mourut à l'âge de 25 mois, et une fille, Marie-Jeanne-Françoise-Elisabeth, qui hérita du titre seigneurial de son père.

    En Jean-Jacques Bazan s'éteignit la branche masculine des marquis de Flamanville.

    Le domaine passa, par le mariage de l'héritière de ce marquisat, dans une autre famille, celle de Nonant-Raray.
  • XII. Marie-jeanne-françoise-elisabeth Bazan, marquise de Flamanville, fille unique de Jean-Jacques, épousa Jean-Joseph Le Conte de Nonant, marquis de Raray, et en eut deux enfants, Marie-Bonaventure-Jean-Joseph-Augustin et Monique-SophieLouise.
  • XIII. Marie-Bonaventure-Jean-Joseph-Augustin Le Conte De Nonant-raray, marquis de Flamanville, mourut jeune et célibataire, étant chevalier non-profès de l'ordre de Malte. Il termina ses jours à Lyon, dans les derniers mois de l'année 1778 ou au commencement de 1779. Selon les uns, il fut emporté par la petite vérole; selon les autres, et cette dernière version est la plus probable, il se brûla la cervelle. C'est lui qui, comptant avoir l'honneur d'être l'hôte de J.-J. Rousseau, fit bâtir, pour loger l'auteur de l'Emile, le petit pavillon circulaire qui existe encore à l'extrémité du parc de Flamanville, près du village, et qui porte le nom du grand homme qui ne vint point l'habiter.
  • XIV. Monique-Sophie-louise Le Conte De Nonant-Raray, marquise de Flamanville, née à Paris en 1754, épousa Marie-François de Brue, marquis de la Guierche. De ce mariage naquit une fille, Modeste de Brue, qui épousa M. de Clermont-Tonnerre, et mourut en 1810, à l'âge de 24 ans, sans laisser de postérité. Son cœur a été déposé sous un marbre noir, dans le mur de la chapelle du château de Flamanville.

    La marquise de Brue, sa mère, restée seule, mourut à Cherbourg le 17 juillet 1820, en léguant son château et sa terre de Flamanville à M. le comte Donatien de Sesmaisons, avec réversibilité entière à son fils, qui les possède aujourd'hui.

    Les restes mortels de la marquise de Bruc reposent dans le cimetière de Flamanville.
  • XV. Le Comte Claude-louis-gabriel-donatien De Sesmaisons, pair de France, gentilhomme de la chambre du roi, colonel d'état-major, devint propriétaire usufruitier du domaine de Flamanville après le décès de Mme de Brue, en 1820, et le posséda jusqu'à sa mort, arrivée à Paris le 28 avril 1842, après de longues années de souffrances.

    Né le 23 décembre 1781, et fils d'un officier général, M. le comte Donatien de Sesmaisons épousa à Rouen, le 12 février I805, MUo Anne-Charlotte-Françoise Dambray, dont le père est mort chancelier de France et président de la chambre des pairs en 1830. Il succéda par substitution à la pairie de son beau-père. C'était un homme d'un grand mérite, réunissant aux qualités du militaire le talent de l'écrivain et l'esprit du législateur.
  • XVI. Le Marquis Marie-charles-donatien-yves De Sesmaisons, châtelain actuel de Flamanville, a épousé à Paris, le 5 juillet 1832, Mlle Louise-Marie-Françoise-Anne de Choiseul-Beaupré. Quatre enfants sont issus de ce mariage: Yvonne-Françoise-Caroline, aujourd'hui Mme la vicomtesse de Brimont, née à Paris le 22 septembre 1834; Allain-Anne, né à Paris le 23 février 1836; Louis-François, né au château de Flamanville le 29 février 1840, et Hervé-Marie-Edgard, né à Orléans le 23 octobre 1844.

    M. le marquis Yves de Sesmaisons, né à Rouen le 19 novembre 1805, fit de brillantes études qui lui méritèrent d'être l'un des lauréats au concours général de l'université. Il embrassa fort jeune la carrière diplomatique, et fut successivement secrétaire d'ambassade à Rome lorsque Châteaubriand y représentait la France, à Vienne avec M. de Rayneval, et à Turin avec M. de Barante, à titre de Ier secrétaire d'ambassade.

    Mme la marquise Louise de Sesmaisons est née à Paris le 16 septembre 1812. Son père, le marquis César de Choiseul-Beaupré, chef de la famille de Choiseul, était maréchal-decamp; il fut aide-de-camp du duc de Berry, et remplit les mêmes fonctions jusqu'à sa mort auprès du duc de Bordeaux. Sa mère, Ida du Cluzel, fille du marquis du Cluzel, mourut jeune, sa fille étant dans la plus tendre enfance.

    Ces nobles époux, aussi nobles par le cœur que par leur blason, appartiennent à deux des plus anciennes maisons de France.

    La famille de Sesmaisons, l'une des plus illustres de Bretagne, alliée aux Beaumanoir, aux comtes de Nantes, tenait un rang éminent dans cette province dès le XIe siècle. Elle compte parmi ses membres des preux dans les Croisades, des sénéchaux, des grands-baillis, des commandeurs de Malte, des prélats, des lieutenants-généraux de nos armées.

    La grande famille de Choiseul, qui remonte aussi à l'origine des titres nobiliaires, occupe une place importante dans l'histoire. Pendant une partie de la seconde moitié du XVIIIe siècle, quatre hommes tenaient en Europe les rênes de l'opinion et absorbaient l'attention publique : Voltaire à Ferney, J.-J. Rousseau où sa pauvreté lui trouvait un asile, Frédéric II à Berlin, le duc de Cboiseul à la cour de Versailles et mieux encore dans son exil de Chanteloup, où toutes les grandeurs intellectuelles de l'époque lui firent la plus brillante auréole que puisse recevoir un homme d'Etat déchu du pouvoir.

Ainsi, depuis l'an 1406 jusqu'à 1862, pendant une période de plus de 450 ans, le domaine de Flamanville a eu seize possesseurs et est passé dans trois familles. Il fut érigé en baronnie par Louis XIII en 1610, en faveur de Guillaume Bazan, et en marquisat par Louis XIV en 1654, en faveur d'Hervé Bazan, devenu l'un des seigneurs les plus opulents de la province par son mariage avec Agnès Molé, petite-fille du riche financier Samuel Bernard, le Rothschild de son temps.

C'est Hervé Bazan, avons-nous dit, qui a fait bâtir le château actuel de Flamanville. Commencé en 1654, l'édifice principal fut achevé en 1657, et les bâtiments accessoires entourant la cour d'honneur, les deux pavillons saillants, la chapelle, les beffrois, tout était terminé en 1660. On avait fait en même temps les fossés d'enveloppe avec escarpe et contre-escarpe; car, par une fantaisie assez dans les goût. des châtelains du XVIIe siècle, Hervé Bazan voulut donner à sa somptueuse demeure l'air d'un manoir féodal, en l'entourant d'une apparence de fortifications. Quant aux pièces d'eau, la plus grande et la plus voisine du château, celle qui longe les écuries et les remises, existait déjà; les deux autres sont de date plus récente.

Ce château est sans contredit le plus beau monument architectonique de toute la contrée; aucun des édifices de ce genre qui existent dans nos environs n'a ce ton de grandeur et cette magnificence princière.

Description

Situé sur un plateau dans un riant vallon à surface presque plane, et dont le parc occupe toute l'étendue, vallon délicieux, parsemé de pelouses et d'herbages plantureux, de verdoyantes prairies, de féeriques étangs, flanqués d'un côté par un taillis et de l'autre par une futaie centenaire, le château de Flamanville a un aspect grandiose, que font ressortir encore ces bois qui l'avoisinent et ce paysage qui l'entoure. A sa majestueuse régularité s'harmonise avec un art gracieux le charme du pittoresque des bâtiments accessoires. Il s'étend dans la direction du sud au nord, et a sa facade au levant. C'est un spacieux édifice à un étage, tout construit en granit ouvré, contenant plusieurs appartements et un grand nombre de pièces, auxquels on accède par deux vastes escaliers. Il fait corps avec deux magnifiques pavillons qui encadrent la cour d'honneur à droite et à gauche. Dans l'un de ces pavillons est la salle de l'orangerie, galerie à arcades d'une grandeur royale, et à l'extrémité se trouve la chapelle, sous le vocable de la sainte vierge.

Cette chapelle fut bâtie en 1659. Deux actes de permission donnés par l'évêque de Coutances, Eustache Leclerc de Lesseville, le 17 et le 30 mars 1660, autorisèrent de la consacrer, d'y célébrer l'office divin, et d'y chanter les vêpres tous les dimanches et les jours fériés. Un chapelain y fut attaché. Hervé Bazan légua à ce desservant 150 livres de rente, par acte du 2 mai 1663; d'autres dons lui furent faits, et la principale de ces libéralités fut la perception des revenus de la chapelle de Notre-Dame-des-Prés à Tréauville.

La façade du château était en partie masquée par des constructions qui lui donnaient un semblant de forteresse des siècles passés. M. le comte Donatien de Sesmaisons s'empressa de faire disparaître cet anachronisme féodal d'assez mauvais goût. Il fit en même temps combler les fossés derrière le château et du côté des jardins, et créa, en unissant les agréments de la symétrie à l'utilité, le magnifique potager qui est l'un des ornements de cette charmante habitation.

C'est aussi à M. le comte Donatien de Sesmaisons qu'est due la plantation du vaste espace d'arbres verts qui prolonge les bois du parc jusqu'au Gros-Nez ou cap de Flamanville, promontoire s'élevant comme un rempart de granit au-dessus des flots, et que couronne un dolmen gigantesque, le plus beau monument druidique de toute la contrée. De ce cap la vue plane au loin sur l'immensité de la mer: à la limite de l'horizon apparaissent les îles d'Aurigny, de Guernesey et de Jersey; et la nuit, par une atmosphère pure, on voit briller en Manche les phares des Casquets.

Le château est entouré d'un parc d'une étendue considérable, dont l'une des extrémités touche au village de Flamanville. C'est à cette extrémité que se trouve le pavillon en forme de tour dit de J.-J. Rousseau, et qui fut en effet élevé pour ce grand homme, au commencement de l'année 1778, par le marquis de Flamanville (Marie-Bonaventure-Jean-Joseph-Augustin Le Conte de Nonant-Raray).

Nous avons peu de notions sur les rapports qui pouvaient exister entre l'austère philosophe et le jeune marquis, et moins encore sur les circonstances qui portèrent celui-ci à lui faire construire cette cellule inhabitée, qu'un illustre souvenir fait seul respecter. Corancez est le seul auteur contemporain qui donne à cet égard quelques renseignements. « Je rencontrai un jour, dit-il, un jeune chevalier de Malte, nommé Flamanville. Il m'avait donné de lui une excellente opinion, par le prix qu'il mettait à se conserver chez Rousseau. Il y venait assez fréquemment, et souvent nous nous rencontrions. En m'abordant, il me serre la main, me dit qu'il arrive d'Ermenonville, et me témoigne un grand désir de m'entretenir particulièrement. Il m'apprend que la tête de Rousseau travaille, il ne m'étonné pas; il m'ajoute qu'il lui avait remis un papier écrit de sa main pour le prier de lui trouver un asile dans un hôpital. Ce jeune homme sensible et sincèrement attaché à Rousseau avait les yeux en larmes. Il m'ajoute qu'il lui avait offert d'habiter une des deux terres qu'il possédait en Picardie et en Normandie, toutes deux, ou bien certainement l'une d'elles, situées sur le bord de la mer; que là il y serait seul, puisqu'il ne les habitait point. Je n'ai pas, me dit-il, perdu l'espérance de l'y déterminer. Il se proposait un second voyage, dont il me rendrait compte. Hélas! ce second voyage n'eut pas lieu, Rousseau mourut trop lot. »

Le pavillon de J.-J. Rousseau forme l'angle nord-est du mur de cloture du parc de Flamanville. Sa porte donne sur la campagne, mais il a une accession dans le parc par un escalier hélicoïdal qui conduit à la plate-forme peu élevée de la tour, d'où la vue plane sur la mer et embrasse un panorama aussi varié qu'étendu.

Tout près et en face de ce pavillon qui fait en quelque sorte partie du village, de l'autre côté de la route, s'élève l'église paroissiale, due aux libéralités d'un marquis de Flamanville. Elle est intéressante sous plus d'un rapport. On y remarque particulièrement la châsse contenant les reliques de sainte Réparate, découvertes dans les catacombes de Rome en 1838, et données par le pape Grégoire XVI à Mme de Sesmaisons, qui les rapporta d'Italie. Leur exaltation eut lieu à Flamanville le dimanche 15 juin 1845, et fut l'occasion d'une solennité magnifique. Mgr l'évêque d'Orléans présidait à cette cérémonie, à laquelle assistaient plus de cent prêtres, beaucoup d'étrangers et la population des communes environnantes. Les reliques de la sainte, qui subit le martyre sous le règne de Dioclétien, vers l'an 284, furent processionnellement transportées de la chapelle du château, où elles se trouvaient depuis 18 mois, dans l'église de la paroisse, à laquelle elles avaient été destinées par le Souverain-Pontife.

Source : M. Vérusmor 1860.

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 81080
  • item : Château de Flamanville
  • Localisation :
    • Basse-Normandie
    • Manche
    • Flamanville
  • Code INSEE commune : 50184
  • Code postal de la commune : 50340
  • Ordre dans la liste : 2
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : château
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction :
    • La construction date principalement de la période : 17e siècle
  • Années :
    • 1654
    • 1670
  • Date de protection : 1930/01/06 : inscrit MH
  • Date de versement : 1993/11/22

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété d'une personne privée 1992
  • Détails : Château : inscription par arrêté du 6 janvier 1930
  • Référence Mérimée : PA00110400

photo : Normandie Héritage

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