photo : Patrice
Maison construite en front de mer sur la pointe de la Malouine sur un terrain escarpé qui a nécessité la construction de plusieurs murs de soutènement. Un escalier extérieur permet l'accès à la plage dite du Port Salut. Maison en maçonnerie de granite avec éléments rapportés en bois. Façade antérieure avec décrochement de la tour d'escalier couverte d'un toit en pavillon. Tour d'escalier et partie du gros oeuvre avec appareillage décoratif de brique. Porche en bois. Toiture débordante à aisseliers décoratifs en bois. Bow-window , en bois, sur façade mer. Deux étages de soubassement sur mer. Jardin en terrasses.
Maison de villégiature construite vers 1892 (année d'imposition) à l'initiative d'Auguste Poussineau, promoteur de la Malouine, par l'architecte Alexandre Angier, de Saint-Brieuc.
Source : Ministère de la culture.
L'ancien prieuré de Dinard, dont les beaux vestiges archéologiques, témoins de l'art breton du XIVe siècle, furent redécouverts en 1840 par un des fondateurs de la colonie anglaise qui y fixa sa résidence, a sans doute inspiré le style choisi pour l'église anglicane, commencée en 1871. L'édifice, peu développé en élévation, de plan dissymétrique et accessible par un porche hors œuvre plaqué au sud, veut délibérément s'inscrire dans une silhouette traditionnelle qui le rattache à une large famille allant des îles anglo-normandes à la Basse Bretagne. Son parti bas, qui n'est alors pratiquement jamais retenu pour les édifices du culte catholique, l'inscrit de façon harmonieuse dans le site de la pointe du Moulinet. A l'intérieur, le choix d'une nef à charpente apparente, que portent des fermes moulurées en arc brisé ancrées en dessous du sommet des murs, est une véritable citation archéologique des exemples anglais médiévaux.
La villa Sunnyside, réalisation hors norme due au chirurgien-dentiste John Millard, est obtenue à partir de la réunion en 1887 de deux anciennes maisons banales, littéralement métamorphosées par l'emploi du pan de bois. Par-delà l'outrance de son accumulation hétéroclite de statues de qualité, de style et de périodes différentes, exposition publique permanente d'une collection enrichie au cours des années, qui lui valut dès son époque d'être baptisée, "Maison des bonshommes" ou "Château des Vieux Saints", Sunnyside correspond indéniablement à une authentique démarche archéologique. En témoignent encore aujourd'hui l'élégance et la rigueur de mise en œuvre de ses pignons à encorbellement en pans de bois, dans lesquels le principe du vitrage généralisé n'est pas sans rappeler les anciennes maisons "à vitrine" du Saint- Malo d’avant-guerre. De même, sa tour d'escalier en vis polygonale qui articule et distribue verticalement trois corps de logis disposés en éventail, reprend un système de distribution proprement médiéval. Derrière son apparente extravagance, cette réalisation à connotation rationaliste, qui rappelle les écrits de Viollet-le-Duc, annonce quelques quarante ans en avance les créations des architectes régionalistes autour de 1920. L'auteur de cette œuvre, dans laquelle la personnalité du commanditaire, collectionneur et “ antiquaire ”, joua un rôle de première importance et dont l'impact à Dinard et sur la côte d'Emeraude fut certainement considérable, est peut-être l'architecte de Saint-Brieuc, Alexandre Angier, qui dessine quelques années plus tard, en 1892 les plans de la villa Port Salut pour Auguste Poussineau, promoteur du lotissement de la Malouine. La villa Port Salut, devenue Cézembre, sorte de synthèse du pittoresque architectural, reprend dans un agencement raisonné, les thèmes de la polychromie et du pan de bois déjà employés à Sunnyside et intègre dans sa composition de véritables citations qui permettent de lui attribuer la même paternité. Ce même goût “ archéologique ” se retrouve dans une autre réalisation majeure de Dinard à la fin du XIXe siècle. La villa la Garde, entreprise en 1897 pour la famille Hennessy, célèbres négociants de Cognac d'origine irlandaise, sur l'emplacement d'une première grande villa construite pour l'américain John Camac, s'affiche comme un véritable manifeste architectural, dans la mouvance du gothic revival. Son plan éclaté articulé autour d'un vaste hall pouvant servir de salle de bal, rappelle par son système organique la conception de Sunnyside. L'emploi de références d'une étonnante fidélité aux modèles anglo-saxons, le traitement du porche hors œuvre en bois, qui reprend avec plus d'ampleur celui de Port Salut, permet quelques rapprochements. L'auteur présumé de cette énorme castel de style Tudor, qui consacre à la fin du siècle la référence anglo-saxonne de la station ne serait autre, selon une tradition orale, qu'Alexandre Angier lui-même, dont, il est vrai, la réputation après ces réalisations de la Malouine n'était plus à faire. Cette ambiance gothicisante a sans doute également inspiré vers 1906 la construction, dans la rue du casino, de Breton House, autre réalisation étonnante destinée à héberger l'extraordinaire escalier en bois d'une maison de Morlaix. Granite House enfin, ultime et tardive réalisation néo-gothique pour la même famille Hennessy a de quoi étonner en 1923. Sa construction s'inscrit en fait dans une véritable tradition balnéaire propre à Dinard, il est vrai déjà vieille d'un demi siècle. Le transfert à la même époque du portail d'un manoir gothique des environs de Dinan à l'entrée du parc de la villa Saint-Germain par la famille Darblay, est révélateur du même phénomène de goût.
Source extrait de : Un siècle de goût balnéaire par Jean-Jacques Rioult