photo : Jacques Héritier
C'est à Villeneuve-les-Maguelonne que M. Germain fixe la résidence des évêques de Maguelonne après la ruine de cette ville. Au onzième siècle, l'évêque Arnaud entreprit de relever l'ancienne cathédrale; il rétablit et restaura l'église, entoura la ville de Maguelonne de murailles, fit construire des maisons et fonda une nouvelle ville qu'il alla habiter avec ses chanoines en 1037; il soumit son chapitre à la règle de Saint-Augustin et pourvut libéralement à sa subsistance. Il acquit à l'usage des chanoines l'étang de Maguelonne avec sa pêcherie, puis il les dota de terres, à Villeneuve et à Cocon, propres a leur fournir des aliments nécessaires en fruits et en légumes avec un moulin sur la Mosson. Afin de mettre la ville à l'abri des pirateries sarrasines, il ferma l'ancien grau qui, en servant de port à Maguelonne, pouvait donner accès à l'ennemi ; il en ouvrit un autre moins périlleux, conduisant à un nouveau port mieux abrité et relia l'île à la terre ferme au moyen d'un pont. C'est en 1054 environ que, l'église étant terminée, il en fit la dédicace assisté d'un grand nombre d'évêques. Arnaud mourut sans avoir entièrement terminé son entreprise qui fut menée à bonne fin par Godefroi, un de ses successeurs.
Celui-ci termina les bâtiments commencés et compléta la réforme canoniale. Il dota les chanoines, qui étaient au nombre de douze, plus douze prébendiers, avec les revenus d'un grand nombre d'églises dont on trouve les noms dans les chroniques et dont voici la liste : les églises de Montpellier et de Montpelièret, de Villeneuve, de Vic, de Mireval, d'Exindre, de Maurin, de Cocon, de Montels, de Chaulet, de Prunet, de Juvignac, d'Autignac, de Pignan, de Saint-Jean de Vedas, de Saint-Georges d'Orques, de Murviel, de Sautairargnes, de Sauret, de Novigens, de Montauberon, de Saint-Michel et de Saint-Vincent de Sauviac, de Perols, de Saint-Jean de Frejorgues, de Notre-Dame d'Auroux, de Sainte-Agnès de Marou, du Saint-Sépulcre de Salaison, de Saint-Romain de Melgueil, de Saint-Etienne de Ginestet, de Saint-Brès, de Saint-Félix de Substantion, de Castelnau, de Saint-Seriès, de la Vêrune, de Clapiers, de Saint-Jean et de Saint-André de Buèges, etc. Les laïcs eux-mêmes vinrent bientôt enrichir le chapitre.
En 1055, la comtesse Adèle de Melgueil, d'accord avec son fils Raimond et sa belle-fille Béatrix, lui fit donation de la partie de l'étang de Maguelonne située à droite de l'embouchure de la Mosson jusqu'à la plage. En 1083 le comte Pierre de Melgueil engagea aux chanoines, moyennant finance, ses droits sur les navires qui abordaient soit dans l'île, soit sur la côte, et finit par s'en dessaisir complètement en leur faveur. Ce même comte, en 1085, fit hommage de toute sa seigneurie à Saint-Pierre de Rome, en la personne de Grégoire VII, en signe de quoi il s'obligea à payer chaque année une once d'or au Saint-Siège. Pierre de Melgueil se désista en même temps des prétentions de sa famille sur le choix des évêques de Maguelonne et en laissa la nomination au chapitre sous l'autorité du pape.
Urbain II inaugura son pontificat en acceptant au nom du Saint-Siège à la place de Grégoire VII, mort trop tôt pour avoir pu s'acquitter de ce soin, la donation de Pierre de Melgueil, et en confiant à l'évêque de Maguelonne la surveillance spéciale de ce nouveau domaine de l'Eglise. Ce fut là comme le prélude de la prise de possession du comté de Melgueil qui eut lieu plus tard de la part des évêques de Maguelonne. L'évêque Gantier ou Galtier reconstruisit en partie le bâtiment de l'église qui menaçait ruine. Raimond I, son successeur, fit bâtir la salle capitulaire, suivant la vieille chronique éditée par M. Germain en 1853, et creuser la citerne destinée à l'usage commun ; il acheva la tour du Saint-Sépulcre et construisit celle de la Cuisine. C'est à lui que l'on doit l'autel de Saint-Pierre, la chaire épiscopale placée derrière, le bassin qui est dans le cloître, les murs et le portail du cimetière des laïcs, la maison du moulin, celle où l'on enferme les lits,celle des convers, celle qui, près du pont, sert à abriter les chevaux des arrivants ; il enrichit sa cathédrale de livres, de chapes en soie, de tuniques, de dalmatiques, de chasubles, de tapis et d'ornements de divers genres.
Jean de Montlaur doit aussi être considéré comme un des fondateurs de l'église de Maguelonne. Il en fit reconstruire une portion et fournit à une grande partie de la dépense. C'est en 1178 que les travaux dont il prit l'initiative furent terminés.
On peut voir dans l'ouvrage déjà cité de M. Germain (Maguelone sous ses évêques et ses chanoines, p. 70 et suivantes), la description de l'île de Maguelonne au quatorzième siècle et des églises et bâtiments qu'elle renfermait. Aujourd'hui il ne reste plus debout que la cathédrale.
Au commencement du seizième siècle la ville de Maguelonne était presque entièrement dépeuplée. Il n'y avait d'autres habitants que les chanoines de la cathédrale et ceux de la collégiale de la Trinité, qui faisaient même leur résidence à Montpellier où ils avaient leurs maisons. Le pape Paul III, à la demande des chanoines et des habitants de Montpellier, transféra la cathédrale de Saint-Pierre de Maguelonne dans l'église de Saint-Benoît et Saint-Germain de Montpellier, en vertu d'une bulle du 27 mars 1536. Les bénédictins qui desservaient cette dernière église furent unis aux chanoines réguliers et ne firent qu'un chapitre ; leur nombre fut fixé à vingt-quatre.
La cathédrale de Montpellier était une fort belle église, bâtie en pierres de taille ; elle fut détruite par les protestants, en 1561, avec trente-cinq autres églises de la ville. La nouvelle cathédrale doit son existence à la générosité de Louis XIII et du cardinal de Richelieu, qui séjournèrent à Montpellier en 1629. Cette ville, divisée en six quartiers, avait autrefois autant de paroisses ; le nombre en fut réduit à trois : Saint-Pierre dans la cathédrale, Notre-Dame des Tables et Sainte-Aune. On en a érigé depuis une quatrième dans le faubourg, sous l'invocation de S. Denis.
Portail de Maguelonne par du Mège Alexandre (1780-1862)
Source : Histoire générale de Languedoc par Claude de Vic 1872.
Voir aussi Cathédrale en architecture.