photo : ALEX
Porte-Joie, « Portus Gaudii », village s'étendant sur le bord de la Seine, avait un port qui servait autrefois de communication entre le Vexin et la vallée du Vaudreuil.
« Flumine Sequanio, portus qui Gaudia Portans Nomen habet, transfert in velgica rura meantes Et qui Rodoliam festinant pergere vallem. »
Ce que Philippe le Breton exprime ainsi dans sa Philippide est confirmé avec des détails intéressants par les Grands Rôles de l'échiquier de Normandie. On lit dans le compte de Henri de Pont-Audemer, en 1198 : « Roberto, filio Aelardi, ad operationes pontis Portus Gaudii, centum libras per idem breve ». Un article identique se trouve également dans les comptes de Nicolas de Viliers, Gislebert le Changeur et Gislebert Belot, en 1198 : « In liheratione tribus servientibus, qui custodiebant bacum apud Portum Gaudii, Lxi. solidos, per breve régis. Inliberatione sex servientium balistariorum, qui custodiebant domum régis de Portu Gaudii, centum et octo solidos, per idem breve. Pro hachis régis de Portu Gaudii reparandis, LXXII. solidos VIII. denarios, per breve régis. Pro bretescha et ponte torneiz faciendis super pontem de Portu Gaudii, XXVI. libras, per idem breve. In liberationibus eorum, qui custodiebant et ducebant quatuor bacos apud Portum Gaudii, priusquara pons factus esset, LXVI. libras XIII. solidos IV. denarios per idem breve ». A l'époque où Richard Cœur de lion faisait construire un pont à Porte-Joie, il ordonnait d'édifier dans la grande île de Porte-Joie une tour avec de fortes murailles.
En 1209, Raoul Recusson donna à l'abbaye du Bec un ténement à Porte-Joie et un pré dans la prairie de Vauvrai. Dans une charte de Charles le Bel, de 1327, en faveur de Bonport. on lit : « Item, de sex solidis redditus ex venditione heredum Philippi de Valle, percipiendis super uno guordo in parochia Portus Gaudii in feodo praedicto... » Voyez le Cartulaire de Bonport, où il est, à différentes reprises, question de Porte-Joie à propos d'intérêts particuliers.
Un certain nombre de fiefs de la sergenterie du Vaudreuil et de Vauvrai, en la châtellenie du Vaudreuil, s'étendaient sur Porte-Joie; mais le fief de Portpinché est le seul qui y eût son chefmois. Ce fief, rangé jusqu'en 1573 dans la sergenterie du Vaudreuil, fut, à partir de cette époque, mis au nombre des tenures nobles de la sergenterie de Vauvrai.
En 1390, Guillaume le Chambellent, écuyer, était seigneur de Portpinché. Son fils Jean commit sur Jean de la Mare un guet-apens dont les détails sont atroces, et il fut condamné à être pendu par arrêt de la cour de l'Echiquier. La sentence reçut son exécution à Rouen, et voici ce qu'en dit une chronique manuscrite de la Bibliothèque impériale: « En 1391 fut pendu au haut gibet de Rouen un escuyer de noble lignée nommée Portpinchié.» La chronique remarque même « qu'il estrena le gibet». Les sieurs de Jeucourt succédèrent à Guillaume le Chambellent.
Décembre 1403. Guillaume de Jeucourt, dit Sauvaige, seigneur d'Espreville.
Avril 1414. Pierre de Jeucourt, dit Compagnon, écuyer.
Novembre 1419. Pierre de Jeucourt, chevalier.
1457. Pierre de Jeucourt.
1590. Jean de Jeucourt.
1610. Claude de Roncherolles, veuve de Jean de Jeucourt.
Claude de Roncherolles, épousa en secondes noces René d'Epinay, comte de Rozendal, et eut pour héritier son fils Pierre d'Epinay, vicomte de Buffon.
Vers 1660, le fief de Portpinché fut acheté par la famille Druel. Aux Druel paraît avoir succédé le sieur Lecornu de Bimorel.
L'église de Porte-Joie est un édifice du XVIe siècle, ne présentant aucun intérêt architectural. Cependant Porte-Joie a eu deux églises successivement; la première, dédiée a Sainte-Cécile, fut donnée en 1006 par Richard à l'abbaye de Fécamp : «... In villa Rologivilla... ecclesiam Sanctae Ceciliae. » Cette donation fut confirmée par Richard II, qui ajouta deux hôtises dans une charte postérieure : « Ecclesiam de villa quae dicitur Portus Gaudii et hospitia auo. »
L'église actuelle est dédiée à sainte Colombe.
Source : Mémoires et notes de M. Auguste Le Prevost 1864.