Notre-Dame de Runan et cimetière

Quand on a quitté l'espèce d'entonnoir au fond duquel gît Pontrieux et qu'on s'est dirigé sur la route de Bégard, on arrive, après avoir monté pendant un kilomètre, à la chapelle de la Trinité, dite la belle église, dédiée à saint Jorand. Son architecture annonce le XVIe siècle, et elle montre sur ses murs la légende de son patron, dont elle possède aussi le tombeau. A trois kilomètres à l'ouest, est un joli bourg, entouré d'arbres et de verdure, et où l'on remarque une splendide église de la fin du XVe siècle : l'église de Runan. On y distingue surtout une maîtresse vitre restaurée avec soin ; un retable d'autel en pierre, divisé en plusieurs compartiments sculptés et représentant les scènes de la vie de la Vierge ; les tombeaux des sieurs de Kernec'hriou et de Boisboissel, et plusieurs piliers prismatiques très-délicatement travaillés. Le porche méridional abrite les statues des apôtres et est décoré extérieurement, ainsi que la façade de l'église, d'écussons à supports variés, mais dont le champ est martelé.

Dans le cimetière, un calvaire, composé de trois croix en granit, à sa base en forme de chaire à prêcher.

Runan obtint, par chartes des ducs Jean V et Pierre II, de 1414 à 1450, trois foires annuelles dont les droits devaient être consacrés à l'entretien de la chapelle de Notre-Dame. Ainsi s'expliquent les beautés architecturales que l'on y remarque. Les foires ducales existent encore, mais leurs revenus ont reçu une autre destination. On rejoint, par Ploëzal, la grande route de la Roche-Derrien.

Source : De Rennes à Brest et à Saint-Malo par Pol Potier de Courcy 1864.

Runan église

Étymologie et origine

La localité qui nous occupe, de vieux titres nous l'apprennent, se nommait autrefois Run-ar-Gan, trois mots celtiques dont l'usage a fait à la longue, par contraction, Runan. Son commerce et son importance relative datent évidemment de 1414, époque de l'institution de la première de ses foires ; mais son origine est moins facile à établir. Nous croyons, toutefois, que Run-ar-Gan ne prit naissance que dans le quatorzième siècle, après l'érection de Notre-Dame et lorsque la dévotion à cette chapelle eut attiré l'attention sur ce coin de terre.

Monuments

L'église est sous l'invocation de la Vierge, Notre-Dame de Runan. C'est un fort bel édifice de la fin du quinzième siècle, au pignons parsemés d'armoiries de toutes sortes, parmi lesquelles se remarquent les armes de Bretagne, d'hermine plein, avec cette devise : Potius mori quàm fædari, et cette autre : à ma vie, gravée sur le collier de l'hermine suspendue au-dessous de l'écu (Le collier de l'ordre de l'hermine, institué par Jean IV, en 1381, était composé de 2 chaines, attachées par leurs extrémités à 2 couronnes ducales renfermant chacune une hermine passante. Une des couronnes pendait sur la poitrine et l'autre était sur le cou. Les chaînes étaient composées chacune de 4 fermoirs, et ces fermoirs étaient une hermine avec un rouleau autour du corps, sur lequel ces mots étaient écrits : à ma nie. Les rouleaux étaient émaillés alternativement de blanc avec des lettres noires, ou de noir avec des lettres blanches. chacune des hermines portait un collier, d'où pendait un chainon composé de 4 ou 5 anneaux. Les colliers des chevaliers étaient d'or ou d'argent, suivant la qualité des personnes ; ceux des ducs étaient enrichis de pierreries. Les femmes étaient reçues dans cet ordre sous le titre de chevaleresses).

Au moment où nous écrivons (novembre 1855), les maçons et, les tailleurs de pierre ont mis à découvert la nef de droite ; ils relèvent plusieurs pignons, et, copistes fidèles, reproduisent les belles fenêtres ogivales à compartiments dont la conservation n'était plus possible. Les premiers ouvriers de cette église ont reçu depuis longtemps la qualification d'artistes, les seconds s'appellent simplement des tailleurs de pierre ; mais quand le temps aura noirci le travail de ces derniers, les soi-disant antiquaires s'arrêteront pour admirer ce chef-d'œuvre du quinzième siècle, et nos tailleurs de pierre, eux aussi, seront proclamés artistes, à moins qu'ils n'aient la malencontreuse idée de mettre une date à leur œuvre. Alors tout serait perdu ; car les admirateurs systématiques du passé n'accueillent les choses du présent qu'avec froideur et dédains.

L'intérieur de l'église de Runan est d'une grande irrégularité. Il se compose de trois nefs, dont l'une, celle de gauche, est étroite et écrasée, tandis que celle de droite, plus large et plus élevée, se divise en compartiments communiquant entre eux par des arcades disposées dans le sens de la largeur de cette nef, circonstance en dehors, croyons-nous, des règles de l'art architectural et du bon goût. Les piliers diffèrent presque tous : les uns sont de forme carrée et chargés d'ornements, d'autres sont composés de colonnettes en faisceau, d'autres enfin sont ronds, massifs, sans aucune ornementation. Cette nef renferme l'autel du Rosaire, les fonds baptismaux à l'extrémité opposée, et, dans le compartiment du milieu, une énorme pierre sépulcrale sur laquelle sont grossièrement sculptés un homme et une femme, reposant à côté l'un de l'autre. Ces statues ont de 15 à 20 centimètres de relief ; elles sont de grandeur naturelle, et comme l'ouvrier leur a donné à toutes les deux même taille et mêmes proportions, la femme apparaît sur cette pierre froide comme un phénomène de stature. Pauvre Jeanne de France ! car cette femme c'est la fille de Charles VI, roi de France : le guerrier qui repose à ses côtés est Jean V, dit le bon (Jean V fut élevé a la cour de France. Il fit hommage au roi Charles VI; envoya des ambassadeurs en Italie pour travailler a l'extinction du schisme ; marcha plusieurs fois au secours du roi de France, qui lui restitua St-Malo ; conclut une trêve avec le roi d'Angleterre ; retourna à Paris après le massacre des Armagnac ; conduisit le dauphin à Saumur ; fut arrêté à Chantoceaux par Marguerite de Clisson, puis délivré par ses sujets ; confisqua, à la suite de cette trahison, les terres des Penthièvre ; fit alliance avec le dauphin a Sablé. peu de temps après avec le roi Charles VI ; fit armer les communes ; rendit hommage au roi Charles VII ; traita avec le duc de Belfort et ratifia le traité de Troyes), son époux dont les restes mortels, comme nous le verrons plus bas, reposèrent pendant une nuit dans l'église de Runan, il y a de cela 404 ans ! Les statues dont nous venons de parler ont beaucoup souffert de la part du temps ou des hommes.

La maîtresse-vitre a conservé plusieurs fragments de vitraux peints, au milieu de ses gracieux enroulements de granit. Mais, pour admirer les uns et les autres, il faut d'abord savoir que cette maîtresse-vitre existe, complètement cachée par un énorme baldaquin en menuiserie formant tout-à-la-fois et comme d'une seule pièce, autel, tabernacle et retable ; puis, certain de trouver ce que l'on désire derrière cette boiserie malencontreuse, chercher longtemps des yeux un passage. On finit par découvrir deux petites portes placées de chaque côté du maître-autel ; celle de gauche résiste ; mais celle de droite cède à la première pression, et l'on se trouve tout-à-coup en présence de l'objet de ses recherches, dans un couloir étroit et encombré de vieilleries sans nom.

La chaire est ornée de sculptures d'un travail remarquable.

Le clocher a été refait en entier en 1822, mais sans tenir compte du style architectural du reste de l'édifice, avec lequel il n'est plus en harmonie.

Cette jolie église est désignée dans les vieux titres sous le nom de chapelle de Notre-Dame de Plouëc ; et, en effet, nous verrons plus loin que Runan était jadis simple trêve de cette paroisse. Elle appartenait, lorsque éclata la révolution de 1789, à la commanderie du Paraclet, ordre de Malte, et lorsque les commandeurs venaient y faire des visites pastorales, on était tenu de leur présenter les comptes des fabriciens. L'évêque de Tréguier ayant voulu, lui aussi, se faire servir ces comptes, l'ordre plaida et obtint de Louis XIV une ordonnance qui rappelait l'évêque comme d'abus.

Dès les premières années du quinzième siècle, Notre-Dame de Plouëc était en grande vénération parmi les fidèles, et comptait au nombre de ses bienfaiteurs Jean V, dit le Bon, 21° duc de Bretagne, dont les dépouilles mortelles furent solennellement transportées à la cathédrale de Tréguier en 1451, après de vives contestations entre le clergé de cette cathédrale et celui de Nantes. A l'occasion de cette translation, voici ce que rapporte la tradition : Le char funèbre roulait lentement et à petites journées pour se rendre au lieu de sa destination, lorsqu'arrivé en face de la porte de la chapelle de N.D. de Plouëc les roues se brisèrent en éclats ; il fallut donc renoncer à poursuivre la route. On descendit le cercueil renfermant les reliques précieuses, et on le déposa dans l'église de Runan, où il passa la nuit. Dès le lendemain, l'évêque de Tréguier, Jean de Plœuc, accompagné de son clergé, vint au-devant des restes mortels de son ancien duc et les conduisit en grande pompe à Tréguier.

Cette halte, a dit l'histoire, était réglée dans le cérémonial ; mais la tradition n'est pas de cet avis ; elle l'attribue à l'impossibilité, où fut le char de continuer son chemin, par suite de la rupture de ses roues, et regarde cet accident comme une circonstance miraculeuse, comme un avertissement de déposer là les précieuses et saintes reliques, Jean V, de son vivant, ayant eu, comme nous l'avons dit plus haut, une grande dévotion pour cette chapelle de Notre-Dame de Plouéc, devenue depuis église paroissiale de la commune de Runan.

Calvaire et bas-relief en granit

Dans le cimetière, assez mal entretenu, de Runan, le touriste visite avec admiration deux créations artistiques paraissant, l'une et l'autre, appartenir au quinzième siècle. C'est d'abord, au milieu d'une enceinte en maçonnerie formant balustrade, un superbe Calvaire dont la base a 6 pans et supporte trois croix d'inégales grandeurs. Ce monument, de même que l'église, était chargé d'armoiries et de riches sculptures ; mais le marteau des mauvais jours de notre révolution de 1789 a laissé là des témoignages nombreux de la fièvre de destruction qui fut un des traits caractéristiques de cette terrible époque.

le Bas-Relief a été préservé de toute atteinte. Découvert, en juillet 1854, par un enfant qui s'amusait à gratter le mur qui le soutient

Plus heureux que le Calvaire, dont les profondes cicatrices attristent les regards, le Bas-Relief a été préservé de toute atteinte. Découvert, en juillet 1854, par un enfant qui s'amusait à gratter le mur qui le soutient, et débarrassé, à cette époque, de l'épaisse couche d'argile sous laquelle la paroisse l'avait caché en 1793, il est devenu depuis un but de pèlerinage assez fréquenté, et laisse voir maintenant sans crainte les gracieuses statuettes, disposées en groupe, dont nous regrettons de n'avoir pu reproduire ici qu'une partie. Cette œuvre représente les scènes principales de la vie de la Vierge. Elle est incrustée maintenant dans la muraille intérieure d'une masure dont la toiture est complètement détruite. Située dans un coin du cimetière et transformée en mairie lors de l'érection de Runan en commune, cette masure était anciennement disposée en oratoire et formait une petite chapelle. Il ne serait donc pas impossible que ce bas relief eût été fait pour la place qu'il occupe ; mais on suppose qu'il servait autrefois de retable au maître-autel de l'église. Quoi qu'il en soit, nous pensons qu'on ne saurait mieux faire aujourd'hui que de faire revivre l'oratoire des temps anciens, et de lui conserver surtout les admirables sculptures dont nous venons de parler.

Source : Les Côtes-du-Nord, histoire et géographie de toutes les villes et communes par Benjamin-Philibert Jollivet.

L'église est un édifice des 14e-15e siècles conservé presque intact dans ses détails architecturaux. Un ossuaire de la Renaissance accolé au clocher. Dans le cimetière, présence d'un calvaire orné de statues dont le socle forme une chaire à prêcher extérieure. A la fin du XIXe siècle, les trois croix qui le surmontaient ont été déposées et remplacées par une croix en fonte qui s'est brisée au milieu du XXe siècle.

Source : Ministère de la culture.

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 31726
  • item : Notre-Dame de Runan et cimetière
  • Localisation :
    • Bretagne
    • Côtes-d'Armor
    • Runan
  • Adresse : place des Templiers
  • Code INSEE commune : 22269
  • Code postal de la commune : 22260
  • Ordre dans la liste : 1
  • Nom commun de la construction : 3 dénomiations sont utilisées pour définir cette construction :
    • église
    • cimetière
    • calvaire
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction : 2 différentes époques marquent l'histoire du lieu.
    • 14e siècle
    • 15e siècle
  • Dates de protection :
    • 1907/12/19 : classé MH
    • 1925/03/06 : inscrit MH
    • 1951/12/04 : classé MH
  • Date de versement : 1993/07/08

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Détail :
    • Eglise (cad. B 143, 142) : classement par arrêté du 19 décembre 1907
    • Clôture du cimetière : inscription par arrêté du 6 mars 1925
    • Calvaire sis à l' angle de l' ancien cimetière : classement par arrêté du 4 décembre 1951
  • Référence Mérimée : PA00089576

photo : pierre bastien

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photo : gerardgg

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