Eglise de Norrey-en-Bessin

Norrey, Noereium, Noerum.

L'église de Norrey que j'ai décrite dès l'année 1824, est sans contredit une des plus remarquables du département, et l'on s'étonne qu'un édifice aussi somptueux ait été élevé dans une paroisse dont la population n'a jamais dû être très-considérable : il est vrai que l'abbaye de St.-Ouen de Rouen en avait le patronage, et que les églises d'abbaye sont toujours plus remarquables que les autres ; mais ce fait n'explique pas l'élévation et la somptueuse ordonnance du monument ; il faut qu'un architecte habile ait voulu se distinguer par cette œuvre.

Il existe une tradition d'autant plus singulière qu'elle a le plus grand rapport avec celle que le Père Pommeraye a consignée dans son histoire de St.-Ouen de Rouen. D'après cette tradition, dit le père Pommeraye, les deux roses du transept de la basilique de Rouen avaient été faites en 1439, l'une par Alexandre Berneval, maître maçon, l'autre par son apprenti ; or, la dernière fut jugée plus belle que celle à laquelle le maître avait travaillé, et celui-ci se laissa tellement emporter a l'envie et à la colère qu'il tua son élève dans un accès de jalousie. Voici maintenant ce qu'on raconte dans la campagne de Bretteville et de Norrey :

« Le père ou le maître de l'architecte de Norrey avait construit la tour de Bretteville, et voyant celle de Norrey fort avancée, et jugeant qu'elle ferait bientôt oublier la sienne, il fut pris d'un violent accès de jalousie et précipita son élève du haut des échafaudages : on explique ainsi l'inachèvement de la tour de Norrey. »

Cette légende n'a peut-être eu d'autre origine que l'envie d'expliquer, au moyen d'un conte, l'état d'imperfection dans lequel se trouve la pyramide : ce ne serait pas le premier exemple que nous aurions de semblables explications. Toutefois, elle me paraît bonne à consigner à cause de son analogie avec celle qui se rattache à l'église St.-Ouen de Rouen dont Norrey dépendait.

Quoi qu'il en soit, l'église de Norrey, se compose d'une nef simple, d'un transept avec chapelles annexées et d'un chœur entouré de bas-côtés, le long desquels s'ouvrent deux chapelles.

La nef, moins élevée que le reste, probablement parce que les décimateurs n'étaient chargés que de l'entretien du chœur, doit être un peu plus ancienne : on y voit, au nord, une porte en ogive dont l'archivolte est ornée de têtes plates ; elle peut dater de la 1er moitié du XIIIe siècle : je ne crois pas le chœur et le transept antérieurs aux dernières années de ce siècle, si même ils ne sont, en partie , du commencement du XIVe .

La principale porte ouverte dans le transept nord est précédée d'un porche.

La planche ci-jointe montre l'élévation intérieure du chœur, de la tour et de la nef ; elle montre les piliers et les arches du premier ordre, le triforium formé d'une suite d'arcatures portées sur des colonnettes, l'étage supérieur ou clerestory, et les voûtes dont les arceaux viennent se réunir entre les fenêtres et reposer sur des colonnes qui s'élèvent depuis le rez-de-chaussée jusqu'aux combles. Deux bordures de trèfles en creux forment des ligues au-dessous des saillies de l'entablement. On y voit encore l'ordonnance des bas-côtés dont les murs sont tapissés d'arcatures trilobées.

Les sculptures qui décorent les murailles de cette partie de l'église sont remarquables : on y trouve des feuilles de vigne parfaitement fouillées, et d'autres feuillages dont une partie ressemble a des feuilles d'aulne ou de charme. Au milieu de ces végétaux sont des oiseaux mangeant des raisins ou becquetant des fruits, des têtes humaines, etc. , etc. On peut encore citer des rosaces très-bien fouillées.

Dans les travées qui répondent a la courbure de l'abside, entre les fenêtres et au-dessus des arcatures, sont trois personnages en bas-relief : deux de ces figures représentent des musiciens, dont l'un joue du violon et l'autre donne de la trompe ou de l'oliphant.

Celui qui joue du violon foule aux pieds une espèce de dragon.

Du côté du nord, un bas-relief représente le massacre des saints Innocents et l'adoration des Mages (J'ai fait mouler ce bas-relief pour le musée d'antiquités de Caen où il se trouve avec trente autres fragments de la même église).

Les chapiteaux des colonnes sont tous extrêmement élégants, j'en ait fait mouler plusieurs en plâtre : l'un d'eux, très-élancé, a ses volutes terminées par des fleurs.

Les plus riches décorent l'ouverture de la chapelle, appliquée au N.-E., près de la courbure des bas-côtés du chœur : ils offrent des feuillages d'une exubérance remarquable et fort rare, même au commencement du XIVe siècle. La coupe que je présente montre encore la décoration intérieure du transept nord et la partie de la tour qui reste ouverte et forme, au dessous du transept, un dôme éclairé par des fenêtres géminées. Cette disposition des tours centrales se rencontre Mans plusieurs églises du Calvados ; je la crois caractéristique du XIVe siècle ou de la fin du XIIIe : elle produit un très-bel effet.

Au moyen de l'échelle jointe au dessin, il est facile de reconnaître les proportions de l'édifice, soit en longueur, soit en hauteur, et cette coupe qui reproduit fidèlement l'ensemble de l'édifice m'autorise à en abréger la description, tout en le recommandant spécialement à l'étude des architectes et des artistes : les moulages que j'ai fait faire des sculptures les mieux traitées leur fourniront d'ailleurs des types excellents, s'ils ont à construire dans le style de cette époque.

Deux autels en pierre existent encore dans les chapelles qui accèdent aux bas-côtés du chœur ; voici l'un de ces autels : colonnettes dont deux sont complètement dégagées : ils sont l'un et l'autre très-bien conservés.

Il y a dans le chœur plusieurs pierres tombales qui peuvent être du XVIe. siècle.

J'ai fait graver une vue extérieure de l'abside et de la tour, qui complétera ma description : on y voit l'ordonnance et la forme des fenêtres en lancettes, le toit pyramidal eu pierre qui surmonte chacune des petites chapelles des bas-côtés, les fenêtres du clerestory de l'abside, au-dessus du toit des bas-côtés, avec les arcs qui contreboutent les murs et les fortifient contre la poussée des voûtes, puis la corniche décorée de feuillages, et de gargouilles pour l'écoulement des eaux.

Sur le troisième plan, les transepts et, au-dessus, la tour planant sur le tout. La partie éclairée par des fenêtres géminées est celle que nous avons examinée à l'intérieur : de longues ouvertures trilobées au sommet forment l'étage supérieur dans lequel se trouvent les cloches. La pyramide, à 8 pans, qui surmonte la tour carrée se trouve tronquée, et l'on croit généralement qu'elle n'a jamais été achevée ; un toit en ardoises, de la même forme, mais bien moins élancé que n'eût été le toit de pierre, s'il eût été continué, surmonte le tout. Nous avons observé un fait semblable à l'église d'Audrieu, dont la tour doit être à peu près du même temps que celle de Norrey: les toits pyramidaux des chapelles absidales paraissent aussi, à Norrey, une imitation des toits pyramidaux du XIIe siècle, qui couvraient à Audrieu les absidioles du transept et dont une est encore intacte.

L'une des fenêtres extérieures de Norrey montre que les cannelures des archivoltes et des pieds-droits se faisaient souvent après coup, car elle n'offre de cannelures que d'un côté, l'autre n'ayant pas été achevé : d'autres fenêtres confirment cette observation. Le porche avait été peint et les sculptures en étaient fort belles ; malheureusement elles ont beaucoup souffert.

Pris dans leur ensemble, le chœur et les transepts de Norrey fournissent on modèle excellent aux architectes qui voudraient construire, dans le style ogival, une église d'une certaine importance.

L'église de Norrey et celle de Rots que je vais examiner appartenaient à l'abbaye de St.-Ouen de Rouen : cette abbaye possédait toutes les dîmes dans les deux paroisses. Avant la révolution les deux églises étaient desservies par le même curé, celui-ci faisait l'office à Rots et son vicaire à Norrey ; mais chaque église avait son cimetière.

On voit accolé au transept sud un petit bâtiment carré dans lequel était une chambre où un prêtre pouvait coucher : on ne se rappelle pas dans la paroisse si cet appartement était habité par le vicaire ou par quelqu'autre prêtre habitué.

L'église est sous l'invocation de Sainte Barbe.

Source : Statistique monumentale du Calvados, par Arcisse de Caumont

Localisation et informations générales

  • identifiant unique de la notice : 13623
  • item : Eglise de Norrey-en-Bessin
  • Localisation :
    • Basse-Normandie
    • Calvados
    • Saint-Manvieu-Norrey
  • Code INSEE commune : 14610
  • Code postal de la commune : 14740
  • Ordre dans la liste : 2
  • Nom commun de la construction :
    • La dénomination principale pour cette construction est : église
  • Etat :
    • L'état actuel de cette construction ne nous est pas connue.

Dates et époques

  • Périodes de construction :
    • La construction date principalement de la période : 14e siècle
  • Date de protection : 1840 : classé MH
  • Date de versement : 1993/11/22

Construction, architecture et style

  • Materiaux:
    • non communiqué
  • Couverture :
    • non communiqué
  • Materiaux (de couverture) :
    • non communiqué
  • Autre a propos de la couverture :
    • non communiqué
  • Etages :
    • non communiqué
  • Escaliers :
    • non communiqué
  • Décoration de l'édifice :
    • non communiqué
  • Ornementation :
    • non communiqué
  • Typologie :
    • non communiqué
  • Plan :
    • non communiqué

Monument et histoire du lieu

  • Interêt de l'oeuvre : 18 04 1914 (J.O.).
  • Eléments protégés MH (Monument Historique) :
    • Notre base de données ne comprend aucun élément particulier qui fasse l'objet d'une protection.
  • Parties constituantes :
    • non communiqué
  • Parties constituantes étudiées :
    • non communiqué
  • Utilisation successives :
    • non communiqué

Autre

  • Divers :
    • Autre Information : propriété de la commune 1992
  • Détails : Eglise de Norrey-en-Bessin : classement par liste de 1840
  • Référence Mérimée : PA00111691

photo : michel

photo : Pascal-Jean Rebillat Photographies

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